L’été circulaire est le nouveau roman de Marion Brunet, également auteure pour la jeunesse, publié aux éditions Albin Michel. Lors d’une fête foraine comme on en connaît tous, dans une petite ville du sud, Céline, seize ans, fait un malaise et est obligée d’avouer qu’elle est enceinte. Ses parents, sa sœur et ses amis sont sous le choc. Comment cela a-t-il pu arriver ? Et qui est le père ?
L’été circulaire n’est pas un polar, malgré les nombreuses questions qui restent en suspens et le mauvais pressentiment que quelque chose, à un moment, va très mal se passer… C’est un roman noir et un roman social parfaitement maîtrisé, comme je n’en avais pas lu depuis longtemps. On a l’impression d’être mille fois passé par ce genre de petit ville, d’y avoir croisé ses personnages, d’y avoir pressenti ces histoires, ces drames, ces regrets… Cette galerie aussi cruelle que détestable en devient finalement touchante de vérité, touchante de fatalité.
L’action principale se déroule au cœur de la famille de Manuel, chef de chantier, marié à Séverine, jeune mère un brin dépressive et résignée, qui considère être passée à côté de sa vie. Ils ont deux filles : la belle Céline, qui est tombée enceinte, et Jo, quinze ans, la cadette un peu bizarre, un peu à part, un peu dans son monde, mais qui pige tout plus vite que sa sœur. Les deux jeunes filles sont très liées et traversent la vie au rythme des baffes que leur donne leur père, des remarques de leur mère, des regards de leurs copains de classe, au rythme des conneries et des rêves lointains.
Dans L’été circulaire, rien n’est laissé au hasard. Marion Brunet crée une véritable galerie de personnages, tous plus écorchés par la vie les uns que les autres. On y rencontre aussi Patrick et Valérie, le couple d’amis de Manuel et Séverine, Saïd, le voisin arabe qui sort avec Jo mais que Manuel soupçonne d’avoir mis sa fille aînée enceinte, et d’autres. On se croirait sur la place de l’un de ces villages ensoleillés du sud, où tout a l’air si beau, si calme, si lumineux, mais où rôdent remords, jalousies, rancœurs et gens malheureux…
Marion Brunet parvient à distiller ce pressentiment que quelque chose va mal finir… On ne sait quoi, on ne sait comment. On reconnaît rapidement les personnages les plus dangereux, les plus borderline, et les innocents qui en pâtiront. L’été circulaire est un roman magnifiquement sombre, qui ne nous laisse aucun répit et auquel on ne peut s’empêcher de penser plusieurs jours après l’avoir refermé.
Certains passages sont bouleversants de vérité. Des phrases courtes, efficaces, des coups de poing pour la plupart. D’autres passages sont bouleversants, d’une beauté rare. La beauté de cette lumière qui surgit au moment où on s’y attend le moins, ces moments de grâce partagés, que les personnages subissent plus qu’ils ne les vivent. Comme une trêve, une pause, avant la tempête.