Amuse-bouche de Stéphane Carlier, quand le roman se fait vaudeville

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Stéphane Carlier a décidément l’art et la manière de prendre le réel pour le transformer en aventure vaudevillesque étourdissante. Dans Amuse-bouche, paru le 11 mai au Cherche Midi, il met en scène Julien, jeune conseiller des Affaires Etrangères, à la carrière florissante, dont la vie dérape sur un texto envoyé au mauvais destinataire…

Une erreur bien commune, me direz-vous, sauf qu’il s’agit d’un sexto plutôt cru arrivé sur le téléphone de Philippe Rigaud, diplomate haut placé et levier potentiel de la carrière de Julien. La situation, déjà compliquée, dérape alors définitivement quand c’est Marie-Ange, l’épouse très droite et pudibonde du dit diplomate, et non Philippe qui trouve le message. Pour celle c’est la goutte qui fait déborder le vase et elle décide de découvrir qui est la maîtresse de son mari qui se cache derrière l’écran.

Dès les premières lignes d’Amuse-bouche, l’ambiance est posée : salons feutrés, champagne et costume de rigueur, un monde de portefeuilles diplomatiques où les remous sont à éviter. On navigue ici dans un milieu autorisé où connivence et convenances sont un maître mot. Autant dire quiproquos et situations gênantes en vue, on s’en amuse d’avance. D’autant plus que Stéphane Carlier n’a pas son pareil pour croquer avec férocité des personnages plus vrais que natures, taillant au passage un costard (ou plutôt un smoking !) à une certaine bourgeoisie parisienne et aux hautes sphères du fonctionnariat.

Dans ce monde feutré des ambassades, où le scandale a vite fait d’éclabousser les fauteuils en cuir les mieux placés, il se plaît à imaginer l’effet domino d’un tel imbroglio sur la carrière des concernés. Sans compter la vie de cette pauvre Marie-Ange Amandine Gasparde Henri Vimont de la Bouillerie tout droit sortie de La Vie est un long fleuve tranquille. Avec cette plume incisive et pétillante qui faisait déjà mouche dans Les Perles Noires de Jackie.O, il joue sur mots (rien le titre en soi est un régal en la matière) les quiproquos, les retournements de situations jusqu’au dénouement final, digne du meilleur vaudeville. On rit, oui. Dès les premières pages d’Amuse-bouche, car l’affaire s’annonce cocasse. Et si au final cela n’a pas ce petit éclat de loufoquerie des Perles Noires, on n’en passe pas moins un moment absolument délectable tant les personnages sont truculents et la satire acide. On n’attendrait plus qu’une chose : voir Amuse-bouche au théâtre !

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