Entre emprise psychologique et emprise sociale, le nouveau roman de Valérie Gans

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Emprise est le nouveau roman de la journaliste Valérie Gans, récemment paru chez JC Lattès. A vingt-neuf ans, Claire mène une vie de célibataire presque idéale : un travail en free-lance qui lui permet d’organiser ses journées, des copines toujours partantes pour une sortie, un appartement cosy et un chat pour lui tenir compagnie. Jusqu’au jour où, au détour d’Internet, sa route croise celle de Mark…

Et là tout se précipite. En quelques mois, la célibataire endurcie qu’elle était se retrouve mariée, à tout lâcher pour suivre l’homme de sa vie à Ryad en Arabie Saoudite.

Du jour au lendemain, Claire voit son monde basculer. Dans cette société où la femme n’est rien sans son mari, elle voit ses libertés se restreindre comme peau de chagrin et se sent déprimer en dépit de ses efforts pour s’adapter à sa nouvelle vie. Mark quant à lui semble très bien s’en accommoder et révèle peu à peu sa vraie nature. Pour Claire, le conte de fée tourne à la descente aux enfers alors qu’elle réalise dans quel piège elle s’est laissée prendre.

Emprise psychologie et emprise sociale, tels sont les deux axes du fascinant roman au tour très féminin et féministe que nous livre Valérie Gans. Emprise psychologique car on découvre vite que le personnage de Mark, éminemment toxique, n’est pas celui qu’il veut paraître. Séducteur, charmeur, il parvient vite à briser l’indépendance de Claire et la manipuler pour obtenir d’elle ce qu’il désire. Quels desseins poursuit-il ? Est-ce pour le simple plaisir d’avoir une proie sous sa coupe ? Même Claire serait en mal de le dire tant les événements se précipitent. La jeune femme n’a pas le temps de se poser de questions ou les écarte par amour. De toute façon, voilà que rapidement elle doit aussi faire face à l’emprise sociale de ce nouveau pays qui n’aime pas les femmes, qui les rabaisse au rang de possession masculine. Pas le droit de conduire, d’aller au restaurant, de sortir seule. Il faut se cacher, porter le voile, porter une abaya. Son existence entière se retrouve enfermée, piégée, emprisonnée sous la coupe d’un homme que bientôt elle ne reconnaît plus. Sous le choc, la jeune femme commence à sombrer lentement dans la dépression, la soumission, la démission de soi. Heureusement qu’ici aussi existe, en dépit de tous les interdits, une solidarité féminine. Le lien de celles qui savent. Et cela va lui sauver la vie.

L’histoire de Claire dans Emprise, c’est à la fois celle de la rencontre des cultures orientales et occidentales, de deux conceptions radicalement opposées de la femme et de sa place, mais c’est aussi l’histoire de toutes ces femmes prises au piège de leur couple, d’un mari dominateur, parfois violent, qui ne savent ni pourquoi elles en sont arrivées là, ni comment en sortir.

Ces deux trames se mêlent pour tisser une histoire édifiante et fascinante, qui vous entraîne parfois jusqu’au malaise. Si au premier abord, on est gêné, agacé par l’aspect trop idyllique de la vie de Claire et de sa rencontre avec Mark, Emprise referme rapidement sa sombre emprise et on se retrouve enferré jusqu’à la dernière page.

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