Belleville Editions est une toute petite et nouvelle maison d’édition. Fondée par deux jeunes femmes motivées, Marie et Dorothée, elle allie deux tendances très contemporaines : le voyage et le numérique. Les deux éditrices prospectent au gré de leurs voyages pour découvrir des livres dont les libraires raffolent mais qui n’ont pas encore conquis Amazon. Ces livres sont ensuite joliment illustrés et traduits avec talent, et surtout : enrichis numériquement !
Nous avons testé pour vous Sainte Caboche, de la brésilienne Socorro Acioli. Cette auteur brésilienne a été encouragée à écrire cette histoire lors d’un atelier d’écriture animé par Gabriel Garcia Marquez. Journaliste, auteur jeunesse, elle s’attaque à la littérature adulte en nous proposant un drôle de conte couleur locale : une histoire teintée de réalisme magique sud-américain rendant hommage à sa région du Nordeste.
Le héros de Sainte Caboche, Samuel, part à la mort de sa mère sur le chemin de la toute petite ville de Candeia, afin d’y trouver son père. Il découvre une ville désolée et quasi-vide. Plutôt mal accueilli, il se réfugie dans une grotte en lisière de la ville et réalise à son réveil qu’il se trouve dans la tête d’une statue de Sainte Antoine tombée du corps du saint. Dans cette tête résonnent les voix de femmes demandant à Saint-Antoine son aide dans leurs désirs de mariage. Dans un enchaînement farfelu de péripéties, Samuel va réveiller la ville de Candeia, se retrouver marieur et riche, et peut-être redécouvrir ses racines.
Socorro Acioli est habilement traduite par Régis de Sa Moreira (si ce n’est le titre de Sainte Caboche auquel on préfère l’original : La tête du saint). Le récit est burlesque et réjouissant, la galerie de personnages hauts en couleur amuse le lecteur et cette découverte du Nordeste au travers du conte est fantastique, on a envie d’aller y jeter un œil de soi-même.
Quant au procédé de livre enrichi, qui permet de découvrir (une fois que l’on a, difficilement, trouvé la rubrique sur le site) des notes sous forme de photographies, anecdotes ou musique, il est intéressant. On sent qu’il y a encore beaucoup à faire dans ce domaine et on espère que le monde de l’édition saura prendre ce tournant. Le petit bémol : on découvre les notes plutôt hors-contexte après avoir lu le livre dans le métro. Les playlists sont cependant de très bons moments et permettent de se replonger a posteriori dans un voyage entre Brésil et Cap-Vert.
A l’occasion de la venue de l’auteur à Paris, une lecture en musique de Sainte Caboche a eu lieu à la librairie Les Nouveautés. L’occasion de découvrir en personne l’auteur, de demander une dédicace pour la grand-mère, d’en savoir plus sur ses inspirations, d’apprendre notamment que la tête tombée d’une statue d’un saint est une histoire vraie ! Occasion ratée en revanche d’en apprendre plus sur Belleville Editions, les éditrices n’étant pas très disponibles… dommage.
Extrait :
Samuel se retourna pour voir où il avait passé la nuit. Le ciel était couvert, à la faible lumière du jour il découvrit que la grotte était en réalité une tête géante, vide, effrayante. La tête d’un saint. Malgré l’herbe qui la recouvrait, il distinguait un nez grotesque formé par deux énormes trous, une bouche tournée vers le ciel, des lèvres épaisses et fermées, des yeux protubérants, un air grave. Le plus effroyable, c’étaient les globes oculaires : deux boules de ciment attachées aux orbites par des fils d’acier.
Pour en découvrir davantage : www.belleville-editions.com/