Le principal : les coulisses mouvementées d’un collège

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Le principal vient de paraître chez JC Lattès. L’auteur, Arnaud Guigue, sait bien de quoi il parle, car il a été lui-même principal avant de devenir proviseur dans la région parisienne. Sa nièce lui ayant fait un jour une remarque des plus surprenantes – « une fois les emplois du temps terminés, tu te grattes les c******, non ? » – il s’est lancé dans l’idée de bien expliquer le travail d’un chef d’établissement. Et ça, du travail, il y en a ! À n’en pas douter !

Tout commence peu avant la rentrée des classes. Les professeurs doivent faire leur pré-rentrée, et rien ne se déroule comme prévu. Le principal est sur le pied de guerre et doit s’improviser chef de chantier pour une rampe d’accès aux handicapés qui n’est pas encore prête, ou pour un panneau qui ne convient pas aux parents d’élèves. Les paperasses s’accumulent et doivent être réglées en temps et en heure, et durant tout le livre, on se sent écrasé par la masse des tâches administratives que le principal, ainsi que ses secrétaires, doivent effectuer lors des grosses périodes de sortie ou de conseils de classe. Car non seulement il faut gérer les élèves, mais les professeurs également. Entre les couacs dans les emplois du temps, les classes surchargées, les arrêts maladie ou ceux qui oublient de signer un papier le Jour J, ça ne s’arrête guère.

le-principal-guigue-livreLe principal apporte sa touche de psychologie lorsqu’un enseignant fond en larmes dans le bureau du chef d’établissement, et que celui-ci doit à tous prix le requinquer. Parfois, des tensions plus graves apparaissent, et lorsqu’un professeur traite un élève agité de « connard », il faut s’occuper de cette affaire au plus vite avant que les parents n’aient l’idée de porter plainte. Les parents justement. Ce sont des juges implacables qui ne laisseront pas passer la moindre erreur. Tout doit être donc parfait en apparence, et rien du travail titanesque qui est réalisé en coulisses ne doit transparaître.

Tout pour les autres, rien pour soi-même. Le principal a donc un travail des plus chargé. S’improvisant chef de chantier, superviseur administratif, psychologue, négociateur, policier, arbitre, « il est père et maire de famille », comme disait Verlaine. Et il serait ridicule de penser que le chef d’établissement est cloîtré dans sa tour d’ivoire, à ne rien faire. Au contraire, Arnaud Guigue prend son métier très à cœur, et cela se ressent. Seul capitaine à bord de son bateau, il doit tout vérifier de A à Z. Ce qui rend la remarque de sa nièce totalement dénuée d’intérêt.

Loin des clichés des médias qui nous rabâchent sans cesse au sujet des professeurs, tout comme le reste des membres du personnel scolaire, Arnaud Guigue nous montre bien à travers Le principal que la réalité est tout autre. Un professeur ne peut pas être taxé de fainéant, dans la mesure où il doit gérer des classes de plus en plus agitées (et personne n’aimerait être à sa place) et qu’il doit préparer ses cours à l’avance et ses inspections, et qu’il peut totalement s’effondrer quand celles-ci se déroulent mal. Et que dire du métier de principal qui doit en plus chapeauter tout ça ?…

Pour ce qui est de l’écriture de cet essai, elle est très fluide et montre avec beaucoup de précisions le déroulé des journées du principal. Avec clarté et détachement, l’auteur nous relate des épisodes marquant de son année, sans jamais tomber dans la revendication ou dans le pathos. Tout est analysé dans un détachement bienvenu et efficace, et on se prend à dévorer Le principal, qui devient aussi intéressant qu’un bon roman. Un livre qui tombe très bien pour la rentrée. À lire d’urgence.

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2 commentaires

  1. Je viens de lire Le Principal grâce à cette note de blog. Incroyable plongée dans la vie quotidienne et secrète des collèges. Je n’en reviens pas. Super! Merci pour le conseil!

    • Merci pour ce retour ! Si nos critiques encouragent à lire les ouvrages, c’est encore mieux. On se sent vraiment apprécié dans notre travail. Merci !

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