Des hommes dépourvus de sentiments : un polar britannique convaincant

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La collection Rouergue Noir nous propose avec Des hommes dépourvus de sentiments, un quatrième roman du britannique Peter Guttridge, traduit par Jean-René Dastugue. Ce quatrième tome se déroule toujours en partie à Brighton, ville de prédilection de l’auteur, mais aussi entre le Cambodge et la Hongrie. Nous suivons les aventures de deux policiers locaux, du préfet de police fraichement nommé, et d’un mystérieux narrateur sur les traces d’un passé trouble.

hommes-depourvus-sentimentsLe narrateur mystère a été mercenaire, en Amérique du Sud mais aussi au Cambodge sous le régime de Pol Pot. A l’occasion d’un voyage au Vietnam, il retrouve la trace d’un ancien collègue qu’il pensait mort. Il se lance alors dans une quête vengeresse le replongeant dans les douloureux souvenirs de son passé : y laissera-t-il sa peau ? A Brighton, la nouvelle inspectrice Sarah Gilchrist se retrouve en charge d’une affaire de profanation de tombes, à cette occasion elle se retrouve en présence d’ossements humains mais aussi d’antiquités d’Asie du Sud-Est. Elle va se retrouver embarquée, aux côtés de son petit adjoint Bellamy Heap et de son ancien amant le préfet Bob Watts, dans une enquête s’attaquant à un réseau de trafiquants bien plus puissant qu’elle ne le pensait.

Des hommes dépourvus de sentiments s’ouvre sur une citation de Fernando Pessoa : « Le monde appartient à ceux qui ne ressentent rien ». On se demande au passage pour quelle raison le titre évoque des hommes « dépourvus de sentiments » et non ces fameux hommes « qui ne ressentent rien », formule reprise tout au long de l’ouvrage et correspondant au titre anglais original. Il s’agit bien pour les héros du livre de s’attaquer à une puissante organisation de trafiquants, d’hommes près à profiter des situations politiques les plus sordides pour s’enrichir et servir leurs intérêts. Le roman est passionnant : l’action est menée tambour battant. On apprend énormément de choses sur le génocide cambodgien (aucune atrocité ne nous est épargnée) mais surtout sur l’art khmer et son pillage. On est fasciné par les riches descriptions des sculptures asiatiques mais aussi par les explications concernant le marché mondial de l’art et ses dérives illégales.

Tous les personnages de ces Hommes dépourvus de sentiments sont extrêmement attachants. Seul bémol : le procédé du récit en à la deuxième personne du singulier (en « tu ») pour les passages racontant le parcours du mercenaire au Cambodge sonne artificiel et fatigue. Cela n’empêche pas de suivre sa plongée dans ses souvenirs avec plaisir et l’on jubile lorsque tous les personnages se retrouvent réunis pour un dénouement haut en couleurs. La mention d’autres enquêtes menées par la petite équipe de Brighton titille la curiosité du lecteur et lui donne envie de lire les tomes précédents (même si, versant négatif, on ne comprend rien à ces allusions).

En bref, un récit palpitant, bien traduit et très documenté, à lire sans hésiter !

« Ton itinéraire était à la fois un pèlerinage et une commémoration. Il dessinait un voyage dans ton passé. La voix de la messagerie a résonné comme un écho de cette histoire mais elle t’a aussi fait changer de destination. A présent, tu veux entrer au Cambodge aussi vite que possible. A présent, ce n’est plus un pèlerinage, c’est une poursuite. Ce n’est plus une commémoration, mais une vengeance.

Tu n’as pas appelé Siem Reap. Tu n’as pas laissé de message sur le numéro de Brighton. Tu regrettes même d’avoir téléphoné.Tu ne veux pas qu’il soit averti que tu viens lui régler son compte. »

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