Critiques de films

Sans un bruit : Shyamalanesquement vôtre

John Krasinski réussit sa reconversion post The Office avec son troisième film en tant que réalisateur, Sans un Bruit, gros succès aux Etats-Unis.

Après le peu connu Brief Interviews with Hideous Men en 2009, John Krasinski s’est essayé à la réalisation de trois épisodes de The Office dont il jouait le personnage de Jim Halpert. A la fin de la série en 2012, il a pu se consacrer à sa carrière d’acteur et de réalisateur. Côtoyant les estimés Clooney ou Mendes pour Jeu de dupes ou Away We Go, Krasinski a su apprendre et a tâté le terrain de la comédie et du film d’action (13 Hours de Michael Bay, c’était avec lui !)

En 2016, il réalise La Famille Hollar (The Hollars en VO) et c’est l’année dernière qu’il reprend un script et décide de tourner A Quiet Place avec sa femme Emily Blunt.

Sorti aux Etats-Unis, le film a été un immense succès dépassant la barre des 180 millions de dollars, score impensable pour un film de genre.

Sans Un Bruit raconte l’histoire post-catastrophe d’une famille de cinq qui essaye de survivre dans le silence le plus total pour ne pas attirer des créatures qui ne réagissent qu’au bruit. Plus d’un an après l’arrivée de cette créature, la population semble avoir disparue ou vit recluse dans le silence complet.

sans un bruit

Un film muet et de genre ? C’est osé surtout pour un film produit par Michael Bay destiné au marché international. Et Krasinski s’en sort merveilleusement bien. Le film est tendu du début à la fin, ose pas mal de choses, a des centaines d’idées et consacre le talent du duo Krasinski / Blunt. On sent pertinemment que le film aura un préquel tant l’univers qui s’installe dès le début (et on comprend aisément le pourquoi du comment si on est attentif) utilise des ellipses narratives qui vont nourrir l’imaginaire des producteurs qui veulent du money money.

Le film ose une première scène peu vue dans les films de ce genre et même dans les drames que produisent Hollywood. Cette prise de risque fait ressortir alors cette volonté infime de proposer un métrage un peu à côté des standards. Et avec cette scène, on sent tout de suite le sentiment, non pas d’urgence, mais de danger. La tension sera palpable dans chaque scène. Les moments de suspens sont généreux même si, parfois voire souvent, les jump scares non nécessaires et attendus, annihilent un peu l’atmosphère au couteau que l’on ressent. Sans un Bruit aurait pu être beaucoup plus conceptuel. C’est d’ailleurs une volonté certaine de Krasinski qui a choisi de déconstruire la piste sonore avec brio quand le point de vue est celui de sa fille, muette. Par moments, on pointera du doigt des scènes un peu téléphonées ou faciles qui permettent de faire avancer le récit comme celle en milieu de film qui sort un peu de nulle part, arrive comme un cheveu sur la soupe et permet d’assurer un quota de scène tendue. Ce balisage est largement excusable.

En effet, les moments de bravoure sont très bons, il reste juste les moments intimes ou centrés sur la relation familiale qui sont davantage clichés qu’autre chose. Le dernier tiers, qui se veut évidemment héroïque et dramatique, se perd dans des facilités. Le film rentre alors dans un cahier des charges dramaturgiques un peu rincé.

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C’est un vrai survival comme on en voit trop peu au final avec des personnages qui doivent se débrouillaient dans un monde avec de nouvelles règles. Sans Un Bruit entre dans le cercle fermé des high concepts bien ficelés non sans défaut mais généreux. Et ça donne envie de jouer à tous ces jeux de survie disponibles pour smartphones… On veut presque voir Krasinski et sa famille récupérer du bois et des pierres pour construire des haches de fortune… La mise en scène du réalisateur est sobre. Il gagne des points dans le fourmillement d’idées de décors qui expriment plus qu’il ne faut comme l’idée de construire une sorte de cercueil pour le bébé avec de l’oxygène comme une image soulignant le fait d’être condamné. La survie est montrée avec intelligence. Les lumières, les routines et les marques d’adaptation de cette famille à l’environnement ont un aspect ludique foncièrement positif. On reste constamment attiré par la découverte de leur univers, ce qui permet une immersion encore plus pertinente. Elle était rapide mais elle gagne en efficacité au fil du film.

Sans un Bruit est une réussite, amène du nouveau dans le genre et permet de découvrir des acteurs dans un milieu rarement vu chez eux. C’est prenant, efficace et en salles le 20 juin.

 

 

Tom Witwicky

Créateur de SmallThings, 1er Geek Picard de la planète Exilé dans le 92

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