L’Amour, c’est Surcoté, de Mourad Winter : l’adaptation du livre vaut-elle le coup ?
Drôle en livre, drôle sur Instagram, Mourad Winter présente son premier film, adapté de son bouquin, L’Amour, c’est surcoté.
Si vous n’avez pas vu passer cette couverture bleu ciel d’un livre appelé sobrement L’Amour, c’est Surcoté, vous êtes peut-être passé à coté d’un livre très drôle qui n’épargne personne à base de blagues référentielles, de bêtises simples, de jeux de mots enfantins. Ce petit phénomène littéraire a conquis un public jeune à la recherche d’humour frais et décomplexé, loin des conventions traditionnelles de la comédie.
Sorti en 2021, le premier livre de Mourad Winter, auteur de stand-up, avait eu bonne presse. Son style incisif et sa manière unique d’aborder les relations amoureuses contemporaines ont séduit critiques et lecteurs. Sa plume, tantôt caustique tantôt touchante, dresse un portrait sans concession de la génération des trentenaires face aux défis sentimentaux. Rapidement il lui donne une suite appelée « Les Meufs sont des mecs biens », et se permet d’adapter le premier tome au cinéma pour avril de cette année, une consécration pour ce jeune auteur qui s’est d’abord fait connaître dans les cafés-théâtres parisiens.
Comédie d’amour ?
L’Amour, c’est Surcoté raconte la rencontre entre Wourad et une fille. Maladroit dans les relations, il tente de la séduire tout en gérant la pression de ses potes. Un récit universel qui parle à tous ceux qui ont déjà douté d’eux-mêmes face à l’être aimé, mais raconté avec une fraîcheur et une autodérision qui lui confèrent une identité unique dans le paysage littéraire contemporain.
Diagnostiqué “nul avec les meufs” depuis son plus jeune âge, Anis (Hakim Jemili) mène une existence charnelle placée sous le signe du calme plat. Trois ans jour pour jour après la perte d’Isma, son meilleur ami et mentor, il prend son courage à deux mains et se décide enfin à sortir faire de nouvelles rencontres. Sauf qu’en abordant Madeleine (Laura Felpin), Anis ignore que débute une grande aventure. Un truc inattendu. Un truc qui s’appelle “l’amour”.
Changement de noms, et gros choix créatifs pour adapter ce livre qui mise tout sur les pensées du héros, sa vision des choses, ses souvenirs. Mourad Winter peine à retranscrire ce procédé introspectif. Il utilise pourtant des stratagèmes différents comme la voix-off ou le quatrième mur brisé. Sauf qu’en ne prenant pas parti sur quel procédé mettre en avant, cette partie, qui faisait l’identité du livre, s’en trouve peu exploitée. Le passage du texte à l’image s’avère délicat, et la mise en scène, parfois hésitante, n’arrive pas toujours à capturer l’essence du roman original. L’humour venant principalement des vannes sorties de la tête de Wourad, le film s’en trouve amputé d’un capital sympathie important.
Drame d’amour ?
L’Amour, c’est Surcoté, est plutôt une comédie romantique qu’une franche comédie de potes, ou de héros perdu. Malgré tout, l’entourage d’Anis, mené par Benjamin Tranié, permet de retrouver quelques fulgurances. Le personnage de Paulo (Tranié) est celui qui fournira le plus de rires. Côté love interest, Laura Felpin est impeccable. Son interprétation de Madeleine apporte une profondeur bienvenue au personnage, qui, sur le papier, pouvait paraître un peu lisse. Jamais vraiment mise en avant, Madeleine subit beaucoup, même si, en connaissant le livre, vous comprenez son rôle primordial dans le récit final. La comédienne parvient à insuffler nuances et sensibilité à ce personnage pourtant souvent relégué au second plan. Le duo Jemili / Felpin fonctionne, sauf qu’on sent une retenue dans beaucoup de scènes. L’alchimie est là, sans jamais transformer l’essai et rendre les scènes mémorables. On regrette parfois ce manque d’abandon qui aurait pu élever certaines séquences au-delà du simple divertissement.
L’Amour, c’est Surcoté, est gentillet, doux, poignant, sans jamais reproduire l’aura du livre. Un film qui trouvera certainement son public parmi les admirateurs de la première heure de Mourad Winter, mais qui risque de laisser sur leur faim ceux qui espéraient retrouver l’insolence et l’originalité qui ont fait le succès de l’œuvre originale. Dommage.
Le 23 avril en salles.