Astérix et Obélix : L’Empire du Milieu, la vraie critique (spoilers)
Un peu tard pour faire la critique d’Astérix et Obélix : L’Empire du Milieu ? Je ne sais pas, mais si le (bad) buzz est passé, il est parfois sage de voir le film après tout le monde.
Astérix au cinéma, ça a été d’abord des films d’animation à succès avant de passer le cap du live action en 1999. Cinquième film et quatrième duo d’acteurs pour la célèbre BD d’Uderzo et Goscinny, L’Empire du Milieu est un scénario original.
C’est Guillaume Canet qui s’y colle, mais ça, vous savez. Après Clavier / Depardieu, Cornillac / Depardieu, Baer / Depardieu, voici Canet / Lellouche. Et on l’affirme de suite, Lellouche est effectivement un Obélix plaisant. Mais ce n’était pas gagné.
Rien n’était gagné. Personne ne voyait ce duo dans la peau de ces personnages et, à la vue de la bande-annonce, personne ne misait sur ce film. Rien n’était gagné non plus à la vision des premières minutes. On peine à voir les acteurs dans les personnages, on y voit avant tout une parodie, une appropriation pour un sketch. C’est d’ailleurs ce qui ressort globalement des projets Astérix. Avec le temps, on voit mal comment un film live peut encore intéresser. Les costumes, les personnages, les noms des personnages, les intrigues, plus rien ne peut faire sourire. On a passé l’époque où c’était nouveau, pertinent, curieux. Peut-on encore rire avec des noms de personnages comme Antivirus ?
En revoyant Mission Cléopâtre (2002) d’Alain Chabat, film quasi culte pour beaucoup et immense succès, j’ai été un peu étonné de voir combien il avait vieilli. Les scènes musicales sont passées d’âge, l’humour de Jamel aussi, les références sont datées (hélas, oui, Itineris, il faut avoir un certain âge pour comprendre). On ne peut pas ne pas saluer l’entreprise, la reconstitution, les effets, l’ambition (le mot est lâché) du projet de Chabat qui en a fait une œuvre essentielle.
Et cet Empire du Milieu alors ? C’est gentillet. Le budget immense est passé dans les acteurs, dans les décors, dans les effets pas trop vilains, dans M, qui compose la musique. Pour le reste, c’est assez simpliste. Les 20 premières minutes frôlent la comédie bon enfant avec des idées d’humour bas du front. Plus on avance, plus l’histoire prend le pas sur les gags. Mais comme on est dans une comédie française, il faut avoir de l’idée dans le gag. La Bande à Fifi en raffole. Mais trop de gags ne fait pas non plus rire.
L’Empire du Milieu se suit sans déplaisir. Le rythme est assez délicat puisqu’on oscille entre César, Astérix, La Chine et les méchants. Chaque séquence est basé sur un gag, rarement efficace. Exemple avec César qui accueille la danseuse jouée par Laura Felpin. On est dans une représentation du combat féministe sans une once d’originalité dans le dialogue, l’audace et l’humour. C’est donc une scène inutile. Preuve suivante, toujours avec César (il faut bien utiliser Cassel et son salaire), avec Cléopâtre, c’est tiré en longueur, il y a une scène musicale longue et très dispensable.
Parlons du casting. Angèle a deux scènes dont une où elle fait la référence évidente à une de ses chansons. Long, laborieux. Orelsan s’en sort bien, mais il ne sert à rien. Il termine par une référence à une de ses chansons… McFly et Carlito sont là pour deux scènes. Ils auraient pu être utilisés pour une troisième vu qu’on voit un duo de légionnaires plus tard. L’optimisation de la guest laisse à désirer. Zlatan Ibrahimović a une scène à sa gloire plutôt bien fichue, où son personnage explose de charisme. Mais c’est encore anecdotique. Jonathan Cohen est un personnage important. Il est omniprésent, incarne un personnage vif (remarquez comment il touche ses tresses régulièrement) et amène quelque chose. Les haters du bonhomme ne seront pas aux anges. Ramzy Bedia est excellent, tout en nuance, énergique. Cassel et Cotillard en César et Cléopâtre font le taf. Cassel est plutôt à l’aise dans la majorité des scènes même s’il peine un peu dans le ton. On sent qu’il a évolué au fil du tournage. Cotillard n’a pas grand chose à faire. Son rire forcé est agaçant, inutile, accessoire. José Garcia en assistant de César n’aurait pas du faire cet accent brésilien. Sans, le personnage n’aurait sûrement pas existé sous cette forme tellement l’accent donne le ton de la blague plutôt que son texte. Vincent Desagnat en perfide Perfidus justement est parfait. Son look lui va à ravir. La bonne idée était de mettre Pierre Richard en Panoramix. Son peu de temps d’écran lui suffit à faire une référence à La Chèvre. Les pères des boomers apprécieront. Canet et son Astérix rejoint Clavier, Baer et Cornillac. Jouer un tout petit personnage à moustaches n’est pas donné à tout le monde. Il fait le maximum, mais comme dans tout duo , c’est souvent le second héros qui est plus intéressant. J’ai toujours préféré Donald à Picsou, Dingo à Mickey, et Obélix à Astérix. Son manque de charisme naturel fait que Canet n’a rien à faire ou presque pour ne pas être aimé. Enfin, terminons par la princesse Fu Yi jouée par une actrice dont je ne mettrai pas le nom tellement elle est en deçà de tout. Sans intonation dans la voix, elle joue avec une platitude et une fausseté rarement atteintes…
Côté mise en scène, rien à dire, c’est plutôt propre, ça n’a pas été modernisé. Revoyez Mission Cléopâtre, il y a exactement les mêmes effets sans une once de changement. les scènes de combats sont filmés sans envergure. La caméra est trop proche des personnages. Résultat, la bataille finale en extérieure n’a aucun charme.
Astérix et Obélix : L’Empire du Milieu ne croûle pas sous les références, il vieillira bien. Le contexte de « film sauveur du cinéma français » a été trop mis en avant. Il est vrai que peu de films de cette trempe arrivent dans nos salles. On parle d’ambition, de genre, et outre nous sortir des Astérix, des comédies ou des adaptations de romans, la France peine à faire exister le divertissement.