Cloud Atlas : à fond la forme
Rares sont les blockbusters en 2D de nos jours et Cloud Atlas propose 2h45 d’histoires sans lunettes et c’est déjà un bon point, mais qu’en est-il du film adapté d’un chef d’œuvre littéraire ?
Commençons par les bons points, les acteurs sont formidables. Les différents rôles les nourrissent et chacun excelle dans ce qu’il sait faire. Tom Hanks est impeccable dans l’émotion et la justesse quand Jim Sturgess (celui-ci je l’aime de plus en plus) arrive à être poignant d’un simple regard.
Si les maquillages rendent le jeu un peu rigide, on retrouve bien le jeu poussé de Hugo Weaving ou encore la douceur de Halle Berry. Un casting magnifié par l’environnement raconté permet de suite de s’attacher aux personnages.
Le soufflé retombe rapidement à la vision du film pourtant. Après la brève installation des 6 histoires, le spectateur recherche inlassablement deux choses : les acteurs maquillés dans chaque histoire et le lien entre tous.
Hélas, si les maquillages des acteurs sont plus ou moins réussis et devient un jeu malsain en nous écartant du récit et atténuant la force de chaque personnage, le lien entre les histoires n’est vraiment pas excitant.
Partant du principe que l’âme humaine se réincarne dans une forme résultant du bilan de la précédente, Cloud Atlas ne tient pas sa parole et délivre un film aux intrigues peu passionnantes et surtout artificiellement emballées. Les Wachowski et Tykwer ont compris que pour parler d’intrigues parallèles qui ont un retentissement l’une dans l’autre, il fallait utiliser l’effet Koulechov en le transcendant véritablement. Niveau charge émotionnelle il n’y a rien pendant 2h40 et ensuite on nous propose un message pendant 5 minutes. C’est creux. Si l’émotion, c’est monter deux intrigues en parallèle et mettre une musique pour créer de l’émotion qui ne marche que sur une seule intrigue pour nourrir l’autre, je n’appelle pas ça une entreprise réussie. Les moments de suspense, de tension ou d’émotion de certaines intrigues débordent sur l’intrigue parallèle. Sans cette astuce de montage, sûrement que les intrigues tomberaient à plat car une chose est certaine, on ne brille pas par l’originalité des histoires. Entre une histoire de serial-killer sur fond de 70s, un mini-film de SF, un spot-apocalyptique, une comédie, un film historique ou une histoire romanesque, rien n’est vraiment original. Le traitement l’est, oui, ça on est clair là-dessus mais il manque quelque chose. La note d’intention est clairement là, en lisant le dossier de presse mais le film n’aboutit pas à la même conclusion. Les efforts ne sont pas récompensés.
En lisant les déclarations de l’équipe, on se rend compte que l’entreprise était vraiment motivée et motivante. Les décors utilisés se répondaient entre chaque histoire, les formes, les objets également mais le spectateur lambda n’est pas censé savoir les dessous de la production, lui il veut voir un film qui lui propose un message avec la manière.
Passons sur le langage choisi pour la partie post-apocalyptique a base d’élisions qui rend très mal en français et fait perdre beaucoup de crédibilité à ce segment.
Cloud Atlas n’atteint jamais sa note d’intention et le climax n’atteint pas le cœur du spectateur.
Les liens artificiels entre chaque histoire rendent le film un tantinet creux, il manque une réelle substance qui ferait du film une histoire complète. Le message final n’arrive qu’à la toute fin, il n’est pas du tout distillé pendant les 2h30 précédentes. La victoire sans saveur de la forme sur le fond a eu raison du film. Peut-être certains seront touchés par le propos, mais il y a eu plus profond comme Mr Nobody (2009) dans l’aspect narration éclatée, intrigue parallèle et philosophie.