Alien : Earth (Disney+) – la nouvelle pierre dans la saga Alien peine à convaincre.
Entre tentative de renouvellement et lien fort avec la franchise, Noah Hawley signe une relecture brouillonne d’Alien qui laisse plus de frustrations que de frissons.
Avec Alien Earth, Noah Hawley — créateur acclamé de Fargo et Legion — s’attaque à l’un des monuments de la science-fiction et de l’horreur. La série tant attendue est enfin là avec un univers remanié, des personnages à foison et la créature légendaire créée par Giger.
En 2120, la société est dominée par cinq grandes corporations se disputant territoires, richesses naturelles et technologies. Les humains côtoient une humanité « augmentée » : les Cyborgs, les Synthétiques et les Hybrides.
Sur une île secrète, un petit groupe d’enfants malades servent de cobayes à la corporation Prodigy du richissime Boy Kavalier (Samuel Blenkin). La petite Marcy et ses camarades sont transférés dans des corps synthétiques adultes pour être les premiers Hybrides entre l’homme et la machine. Ils se rebaptisent comme les enfants perdus du Pays imaginaire dans Peter Pan. Marcy, rebaptisée Wendy (Sydney Chandler), une machine à la conscience d’un enfant et au cœur sensible, cherche à retrouver son frère Joe (Alex Lawther), devenu médecin urgentiste.
Au même moment, le USCSS Maginot, cargo marchand de la Weyland-Yutani, revient d’une mission aux confins de l’espace avec des spécimens extra-terrestres dont les ADN serviraient à la recherche médicale et militaire. Mais le vaisseau, hors de contrôle, s’écrase brutalement sur Terre, en territoire contrôlé par Prodigy. Ce qui donne le droit à Boy Kavalier de récupérer la cargaison. Il envoie Wendy et ses camarades dans les débris du cargo.
Evidemment, le xénomorphe bien connu fait partie des survivants.
Manque de frissons
Sur le papier, l’idée de déplacer le cœur de l’action vers la Terre et d’ancrer le récit davantage du côté humain avait de quoi intriguer. Dans les faits, le résultat est plus mitigé.
Dès les premières minutes, Alien Earth révèle sa principale faiblesse : une narration brouillonne. Noah Hawley, habitué aux récits éclatés et labyrinthiques, tente ici de déconstruire la trame classique de la saga Alien. Le problème, c’est que cette déstructuration ne produit ni tension ni profondeur. Le crash du vaisseau, censé lancer le récit sur des bases dramatiques, manque d’impact. On n’y trouve ni émotion, ni frisson, ni spectacle. La traditionnelle phase de « complication » est suggérée par des mini-flashs et un montage épileptique.
Mais le plus gênant reste l’utilisation des créatures. Les aliens « secondaires » introduits dans cet univers se révèlent bien plus intéressants, visuellement et narrativement, que la créature culte de Giger. Lorsque le Xénomorphe apparaît enfin, il ressemble à un simple acteur coincé dans un costume trop familier. Sa présence sonne artificielle, presque forcée, comme un ajout de dernière minute destiné à rassurer les fans. Le contraste avec les Facehuggers, mis en avant de manière plus organique et efficace, est flagrant. Résultat : l’alien, censé incarner la terreur absolue, paraît incongru, comme tombé là. Une hérésie pour une saga construite sur la puissance d’une imagerie horrifique unique.
Un univers Alien en développement
Pourtant, tout n’est pas à jeter. L’écriture des personnages, par exemple, témoigne d’un soin certain. Chaque membre de l’équipe dispose d’un background esquissé avec minutie, ce qui permet au spectateur de s’attacher un peu. On pense notamment à Wendy qui occupe le rôle central avec conviction. Son parcours, ses fragilités et sa détermination confèrent un minimum d’ancrage émotionnel à deux épisodes qui en manquent.
Cette jeune équipe devient une équipe suicidaire. Le problème est que leurs motivations restent floues. Sommes-nous face à des cobayes sacrifiés par une organisation plus vaste ? Ou à des pionniers véritablement missionnés pour explorer et survivre ? Cette ambiguïté aurait pu nourrir le récit mais, mal exploitée, ne fait que renforcer la confusion générale.
Il est aussi fou de se dire que l’esthétisme des années 70, du premier film, est gardé lors de la première séquence. C’est froid, blanc et beige, avec une technologie rétro-futuriste (langage DOS et écran 4/3).
Manque d’urgence
Ce qui finit d’achever l’élan du spectateur, c’est l’absence de sentiment d’urgence. Le crash, le sauvetage, les explorations souterraines : tout se déroule comme une longue histoire de couloirs, sans véritable montée en tension. La saga Alien a toujours su utiliser ces espaces confinés pour jouer sur la claustrophobie et l’angoisse. Ici, les couloirs sont un prétexte, alors qu’à l’extérieur, c’est le branle-bas de combat. L’ennui s’installe rapidement, et l’on se surprend à guetter une étincelle de mise en scène qui ne viendra jamais.
Alien : Earth avait tout pour surprendre : élargir l’univers, multiplier les menaces, déplacer l’enjeu au-delà du sempiternel duel contre un monstre. Mais en cherchant à se réinventer, Noah Hawley finit par perdre l’essentiel : la peur viscérale et la tension dramatique. Alien : Earth n’est ni un désastre complet, ni une réussite : nous ne sommes qu’à 2 épisodes de la saison et on se dit que la suite pourrait nous surprendre. Même si on a déjà épuiser le cahier des charges.




