Thor Ragnarok : Vous ne verrez pas plus drôle cette année au cinéma
Après le deuxième opus des Gardiens de la Galaxie, toujours écrit et réalisé par un James Gunn en roue libre, et leur collaboration inédite avec Sony pour le deuxième reboot de Spider-Man, c’est au tour de Dieu du Tonnerre de clôturer 2017, avec Thor: Ragnarok, le troisième de opus de sa trilogie.
2017 marquera l’année la plus productive pour Marvel Studios avec l’émergence d’un nouveau rythme de productions et de sorties de films, qu’ils comptent bien prolonger pour les années à venir.
Thor a toujours été un personnage assez compliqué à traiter proprement au cinéma, et le constat était déjà on ne peut plus évident dès son premier opus assez timide en 2011. A cette époque antérieure au séisme Avengers, le géant Marvel marchait encore à tâtons, testant les eaux avec des productions parfois frileuses visant à mettre sur le devant de la scène des personnages bien peu populaires de son écurie. Le concept même de Thor et de son univers, empêtré dans ses liens directs avec la mythologie nordique et flirtant avec l’heroïc-fantasy, risquait de causer une dissonance critique avec Iron Man, ancien héros de second zone qui est devenu une figure culturelle aussi pertinente que Batman et figure de proue du Marvel Cinematic Universe. Mais depuis le succès d’Avengers, et ceux des paris fous qu’étaient Les Gardiens de la Galaxie, Ant-Man et Doctor Strange, les studios Marvel se dérident et assument sans complexe les concepts les plus farfelues de leur catalogue.
C’est ainsi que Thor s’octroie un ravalement de façade complet. La promesse était d’ores et déjà affichée dans un premier teaser ponctué du riff ravageur de Immigrant Song de Led Zepplin (que l’on retrouve avec grand plaisir dans le produit final). Plus fun, plus coloré, plus kitsch… Thor allait marcher sur le même chemin entamé par ses confrères galactiques portés par l’ancien trublion de la série B qu’est James Gunn. Les manettes de ce troisième volet frôlant le soft-reboot sont confiées au réalisateur néo-zélandais Taika Waititi (Vampire en Toute Intimité, Hunt For The Wilderpeople), un choix qui détonne au premier abord mais qui s’avère amplement judicieux. Avant tout connu pour son sens de l’humour, Waititi insuffle à ce Thor: Ragnarok une fraîcheur irrésistiblement jouissive. Ayant pris conscience du potentiel comique de Chris Hemsworth (que l’on avait pu apercevoir dans le reboot malheureusement raté de Ghostbusters), Waititi permet à l’acteur principal de se lâcher notamment à renfort d’improvisation et le personnage de Thor s’en retrouve revigoré. Le héros titulaire s’impose enfin dans son propre film et on prend plaisir à le suivre dans ses péripéties héroïques. La scène d’introduction est un pur concentré de délire pop, hybride entre un comic book et une pochette d’album de metal des années 80 prenant vie, le tout teinté de comique de situation qui donne le ton pour le reste du film. Car Waititi est sans relâche dans son traitement humoristique de cette aventure intergalactique. Mais ici le tout est maîtrisé. Les gags sont inventifs, le timing est précis, les punchlines fusent… Il n’est pas rare de se retrouver à se tenir les côtes devant tant de folie. Les acteurs s’en donnent à cœur joie dans cet immense bac à sable, avec en figure de proue une Cate Blanchett qui irradie l’écran sous les traits de la redoutable Hela, Déesse de la Mort sur-puissante.
Les autres personnages sont tout aussi amusants, et on retrouve avec plaisir Hulk. Pour la première fois riche en conversation (avec son vocabulaire toutefois limité), Hulk dépasse le statut de la brute en image de synthèse pour enfin composer d’avoir un vrai personnage, aussi attachant et drôle que triste et touchant par moment. Loki ici est mis un peu au second plan par rapport aux précédents films, mais sa présence reste toujours plus que bienvenue vu qu’elle donne lieu à de bons rapports fraternels entre lui et son héros de frère. Tessa Thompson en Valkyrie campe un nouveau personnage fort appréciable et enrichit la dynamique de groupe qui se créer au fur et à mesure du film. Jeff Goldblum apparaît lui aussi en tant que Grandmaster, l’extravagant despote de la planète Sakaar orchestrant des combats de gladiateurs cosmiques. Si son rôle se résume grosso modo à faire du Jeff Goldblum, le plaisir est plus que coupable.
Narrativement parlant, le film reste on ne peut plus classique et souffre d’un petit ventre mou en milieu de parcours. Le montage alterné qui suit les éléments de la trame scénaristique qui se déroule à deux endroits différents de la galaxie, révèle un petit problème de temporalité. Une sorte de stagnation narrative se fait alors un peu sentir avant que le film nous propulse vers son climax explosif. Mais encore une fois, le film déborde d’idées et de dialogues rythmées et drôles pour nous tenir diverti tout le long.
Si vous attendiez du premier degré solennel lourd de séquences dramatiques intenses… Vous n’avez clairement pas misé sur le pas le bon film. Non pas que le film soit dénué de moment d’humanité et de conséquences funeste, mais la mission de TaikaWaititi est clair d’entrée de jeu: confectionner un divertissement d’action débridé et fun aux ambiances rétro et pop, véritable lettre d’amour à l’esthétique comicbook avec des personnages hauts en couleurs et de l’action tout droit sorti des pages de bande dessinées.
Évidemment si vous n’aimez pas avoir du “comique” dans votre comic book movie, passez votre chemin. Pour le reste… Vous ne verrez pas de film plus drôle cette année au cinéma. La quintessence même du feel-good pop-corn movie à l’ancienne. Mission amplement réussie pour Waititi.
Aggy