The WALK : réalité déséquilibrée
Après Flight, Robert Zemeckis reste dans le film live avec The Walk. Il raconte encore une histoire vraie, celle de Philippe Petit, un funambule français qui a relié les deux tours du World Trade Center.
Une « petite » histoire peut donner un grand film. Mais Zemeckis a loupé le coche, disons-le. Son flop récent au box-office (6 millions en dix jours) démontre que les histoires les plus incroyables ne sont pas toutes cinématographiquement parlantes. Oui, The Walk est maîtrisé de bout en bout, oui techniquement c’est superbe mais non, The Walk ne sera pas un grand film, voire même un film aussi dense qu’un Flight. Tout est une question de structure. Le film est balisé, morcelé de passage en voix-off où un Joseph Gordon-Levitt est au sommet de la Statue de la Liberté pour nous raconter son histoire. Cet artifice nous détache un peu du film, ne permet plus l’immersion totale. La dramaturgie est pourtant facilement décelable. Le film dépeint la vie d’un homme ordinaire et son rêve extraordinaire, et tout est fait pour qu’on s’attache au rêve de cet homme simple. Gordon-Levitt s’ajoute un petit accent français pour rendre le personnage plus crédible mais comme pour toute idée semblable, ça ne passe pas pour un spectateur français. On sent le jeu forcé et surtout, lors d’une scène chez le dentiste, on trouve ça faux.
Malgré tout, ce petit défaut s’efface progressivement. Aidé par une Charlotte LeBon impeccable, Gordon-Levitt donne vie à Philippe Petit. L’homme est de tous les plans, de chaque seconde. La première partie est d’une facture classique avec l’apprentissage du métier de Petit. Les phases clés d’un bon biopic sont là : le conflit parental, l’apprentissage seul, la rencontre avec un mentor, la rencontre amoureuse et l’entourage. Pendant 40 minutes, le film est d’un classicisme absolu. Dès lors que la troupe débarque à New-York, le film aurait pu et aurait dû se transformer en film de « casse ». Mais en se rapprochant à tout prix de la véracité des faits, le film perd un peu d’ambition même si l’histoire est stupéfiante. La mise en place du projet a une dimension cinématographique un peu moindre que l’ambition créative de Zemeckis. A ce niveau, la mise en place du câble et l’entrée illégale dans les tours manquent un peu de tension. Tout se passe de nuit et le suspens reste un tantinet léger. L’anecdote du visiteur du toit par exemple est… anecdotique, on aurait aimé plus de contenu autour de tous les aspects de l’histoire plutôt que de rendre l’histoire étiquetée d’un label « incroyable mais vraie ».
La dernière partie est aussi tendu que le câble reliant les deux tours. La traversée va commencer et la poésie opère immédiatement. Les images sont d’une pureté absolue. Si la mise en scène reste sobre, on note tout de même une grande maîtrise de l’espace. La 3D n’est pas si vertigineuse mai son ressent vraiment la beauté de ce rêve, de l’espace et du temps. On admire la traversée et on se questionne. Zemeckis a calqué son film sur des faits, il est alors impossible de trouver ça surfait. Oui, Philippe Petit a fait des allers-retours et s’est allongé sur le fil. L’incroyable pari de ce Français est vrai. Zemeckis ne peut alors pas se dire qu’il doit rendre ça cinématographique. Ça l’est déjà. Impressionnant ? Ça l’est aussi. Simplement, l’aspect global de cette aventure est léger pour rendre le film dense et prenant. Il manque un tout petit peu d’Hollywood dans ce long-métrage. The Walk reste techniquement irréprochable mais manque de consistance quand on sait qui est derrière ce projet, cast et crew.