Messiah, la série Netflix ne prend aucun risque mais installe une sacrée ambiance
Messiah débarque sur Netflix du haut de ses 10 épisodes pour raconter l’arrivée d’un nouveau Messie. Du moins sur le papier. (Sans Spoiler)
Michael Petroni est un habitué des miracles puisqu’il avait créé la série Miracles en 2003 où on voyait Skeet Ulrich (Scream, Riverdale) jouait un enquêteur pour l’Eglise.
Il propose Messiah depuis le 1er janvier sur Netflix. Il réunit Michelle Monaghan (True Detective, Young Americans, Source Code), Tomer Sisley (Balthazar) et John Ortiz (avec sa tête ultra sympathique vue dans Togetherness ou Rake)
Dans cette série, un jeune homme du Moyen Orient semble vouloir mener de plus en plus de personnes vers une destinée. Associées à certains événements étranges, il semble être un nouveau Messie.
Le seul Messie qui existe actuellement joue au FC Barcelone et les miracles sont tout autre.
La thématique du retour d’un Messie est forte, elle permet d’ouvrir le champ des possibles, de proposer des tas de sujets, de poser les bonnes questions, de réécrire beaucoup de choses. Evidemment, ce genre de postulat de départ marche sur du mystère, de l’intrigant. Messiah installe doucement mais sûrement une certaine atmosphère où règne la crédulité, le scepticisme, bref le public est en droit d’y croire ou non. Simplement, il a aussi le droit d’être face à ses propres convictions. Et si c’était possible ? Voilà ce que Messiah propose à ses débuts.
Pendant la plupart de ces épisodes, on ne joue ni sur du fantastique, ni sur du thriller. On est en pleine réflexion perpétuelle. On installe une à une des choses. On construit des bases fortes.
Mais ce qui manque cruellement est une sorte de cohérence des évènements. Une telle révélation doit bousculer plus d’une personne. Messiah semble ne pas avoir l’ambition nécessaire et le pouvoir de montrer les gros changements que cela produirait à tous les niveaux. Les médias, la société, la religion, rien ne semble vraiment bousculé par ce genre de nouvelles. Même les éléments se déchainent mais tout est traité légèrement. Il faut voir le peu de sécurité autour du personnage d’Al-Masih, ce néo-Jésus (incarné par un Mehdi Dehbi, parfait). On semble vivre dans un monde où cet événement est traité comme un fait divers qui ne concerne qu’une frange de la population.
Si la série traite tout ça avec une certaine plausibilité, marchant sur les pas d’un Homeland, justifiant son approche réaliste en prenant en compte les menaces terroristes, on s’attendait à un ou deux faits étranges, des miracles. Quand ils arrivent, la série ne les gère pas comme des fais extraordinaires. Personne ne semble bluffé. Ce sont des non-événements.
Le côté religieux aurait pu peser fortement. Si la partie musulmane et la partie chrétienne semblent être au cœur des scènes, ce sont surtout des épiphénomènes. Aucune remise en question, aucune incidence sur les habitudes. Aucun vrai bouleversement ne vient entacher le quotidien des gens.
La seule approche dramaturgique se fait du côté des petits drames personnelles des personnages qui ne pèsent aucunement dans la balance. Des fausses couches, des couples en dérive, tout ça ne semble être que des artifices pour gonfler un peu la galerie des personnages qui subissent plus qu’ils n’agissent.
Alors on contemple la série pendant 9 épisodes. On ne sent pas spécialement de montée en puissance mais on est happés par l’ambiance, on veut savoir, on veut comprendre.
Vient le dernier épisode qui semble pointer du doigt les dérives médiatiques. D’un coup d’annonce officielle, un fait est classé. Ce serait presque un pied de nez à tous les faits historiques qui sont validés par une décision politique incontestable. Pire, ce serait presque une vision de l’influence et de la montée en puissance du « rien », de la non-influence, du bizarre, de l’incompréhension montée en épingle pour créer des faux événements. En gros, on peut paraitre sans faire. Le doute s’installe facilement et les esprits sont contrôlés.
Tant pis pour les réponses. Les thèses officielles sont donc totalement gratuites, les complots faciles ne sont pas si idiots que ça ? La série aurait pu dangereusement aller dans ce thème si elle n’offrait pas une scène finale qui, finalement, prouve que la série n’a pas vraiment avancée. On reste stoïques, frustrés.
Messiah pose son sujet et aurait pu poser des tas d’excellentes questions. Hélas en frôlant son sujet, elle n’a aucune force, ni politique, ni religieuse, ni sociétale. Elle ne bouscule rien. Peut-être est-ce la faute à ses producteurs dont fait partie Roma Downey. Mais si (pun intended), l’Ange du Bonheur de la série du même nom ! Une croyante fervente et motivée qui semble ne froisser personne.
C’est très dommage de ne pas avoir traiter les questions de politique ou de religion plus profondément quitte à couvrir plus de sujets et d’offrir une série somme, riche et dense. Au-delà de ça, Messiah impose son rythme avec un grande efficacité. Elle permet au moins d’ouvrir le débat hors-écran.
Si saison 2 il y a, il faudrait aller plus loin, prendre des risques. Pente savonneuse ? Oui sûrement, mais il serait peut-être temps de le faire.
https://www.youtube.com/watch?v=hnGtgjb-hdk