Marseille : retour sur un naufrage marketing (et artistique)
Annoncée en grande pompe dans les métros parisiens, Marseille, la première série française de Netflix, débarque le 5 mai sur la plateforme. Mais cette semaine de lancement a été ponctuée par de nombreux couacs.
Marseille avait tout pour réussir : des noms réputés (Thomas Gilou, Florent Siri, Dan Franck, Gérard Depardieu, Benoit Magimel), un diffuseur qui produit peu de déchets (Netflix) et une proposition un peu plus carrée au niveau des productions francaises.
Le résultat est sans appel pour beaucoup : Marseille est une série ratée.
Quand fin avril, Series Mania a proposé un Work In Progress de la série Marseille alors que la série était terminée, on avait vite compris que le projet en était encore à se chercher. Pourquoi proposer un WIP si la série est diffusée deux semaines plus tard ? Marseille était elle déjà en pleine recherche d’identité ?
Rapidement les retours sur cette session Series Mania avait fait prendre conscience que la série partait du mauvais pied. La série est issue du cinéma peut-on entendre de la bouche de Florent Siri, réalisateur sur la série et proclamé Showrunner. (lire dans le Daily Mars)
https://twitter.com/FloraBaculard/status/722842323529428992
#SériesMania: après quelques images et un débat, mon envie de m'abonner à Netflix pour regarder #Marseille est proche du néant.
— Pierre V (@lavisdemoi) April 20, 2016
C'est moi où les questions du public sont subitement abrégées suite à la polémique cinéma / séries ? #Marseille #Netflix #SeriesMania
— Alban Ravassard (@Alban_Ravassard) April 20, 2016
https://twitter.com/mildredfierce/status/722842652740304896
Encore une fois, le cinéma s’invite en tant que référence pour les séries. Le sujet est très touchy chez les adeptes de séries qui tentent encore de trouver une légitimité artistique et non un héritage. Histoire de combler les lacunes de cette première approche envers les « spécialistes », Marseille est annoncée dès le 12 mai sur TF1 (une semaine après sa mise en ligne) pour ces deux premiers épisodes. La série événement devient quelque chose de grand public, ou vert à ceux qui sont là pour voir du formatage estampillé TF1. Au final, Marseille fait profil bas et va chercher le coup de comm’ auprès de la ménagère. 5 millions de français pourront faire disparaître la malédiction ? La curiosité sera-t-elle au rendez-vous sur TF1 ?
Après ce premier galop d’essai, Marseille avait plusieurs semaines pour réajuster le tir. Mais les premiers épisodes présentés à la presse ont rapidement fait renaître le fantôme de l’échec artistique. Les premières critiques tombent et celle de Telerama signée Pierre Langlais ouvre le bal :
Fils narratifs maladroitement tendus, improbabilités, rebondissements qui tombent à plat… on se désintéresse vite de cette histoire mise en scène (par Florent Emilio-Siri et Thomas Gilou) à coups d’effets balourds, de ralentis, de voix-off, de coupes assommantes, le tout noyé dans une musique mélodramatique qui dicte au spectateur ce qu’il devrait ressentir – en vain.
Oh putain en effet, c'est festival international du facepalm ce premier épisode de Marseille ! Vulgos et ridicule à la chaine, impresionnant
— Anaël Alonso (@AlonsoAnael) May 5, 2016
L'accent de Magimel qui disparaît une phrase sur deux c'est magique #MarseilleNetflix
— Audrey (@jjamesbucky) May 5, 2016
La série arrive sur Netflix le 5 mais, le temps pour les sériephiles de se faire une idée et de confirmer ou infirmer la qualité de la série. Entre temps, l’équipe fait sa promo. Nos collègues des Chroniques de cliffhanger interviewent Florent Emilio Siri et Dan Franck, l’un réalise, l’autre scénarise. Au final, on se rend compte que le terme showrunner a été attribué non pas à la mauvaise personne mais à la mauvaise série. Personne ne sait vraiment qui est l’auteur de Marseille. L’exception française se fend de sa propre définition de showrunner. Le scénariste à écrit. Le réalisateur a pris le scénario et a raconté, avec ses outils, la série. Nous ne sommes plus dans un modèle mais dans un mariage de raison sans raison. La série semble incapable de se démarquer de ce problème interne. Dan Franck était showrunner par contrat d’après une interview publiée il y a 7 mois par Binge. Comment en est-on arrivé à de telles dérives de communication ?
Florent Siri a pris le scénario de Dan Franck et en a fait ce qu’il voulait. Crédité en tant que « créateur visuel », Siri a donc, on peut le dire, réécrit le scénario de Dan Franck et a adapté l’idée scénaristique du scénariste des Hommes de l’ombre. A 2 minutes de la vidéo ci-dessous, Siri confirme qu’il y a eu un showrunner à la française. Un réalisateur est l’auteur de l’oeuvre en France, pour lui.
Dan Franck, lui, se retire du projet par ses mots « j’ai écrit, je donne le scénario et je rentre chez moi ». Il est presque désemparé de faire la promotion. Il se permet de se dédouaner en disant « je n’ai pas signé le scénario et le dialogue, j’ai signé la création et l’écriture ». Phrase non sensique qui se permet juste de confirmer les problèmes contractuel et artistique du projet. Dan Franck trouve même la justification de tout ça dans le générique de la série. Si le générique dit que Dan Franck n’a pas écrit, il n’a pas écrit. Improbable.
Et pour achever le tout, le bad buzz se transforme en opportunité pour Canal+ et France 2. Caïn et Baron Noir se paient la tête de Marseille. Bel hommage s’il en est.
Envie d'une autre bonne série qui se déroule à #Marseille ? Caïn revient maintenant sur #france2 @France2tv pic.twitter.com/LoCx86da0u
— Fred Caïn (@CainLaSerie) May 5, 2016
https://twitter.com/STUDIOCANAL/status/727893501413888000
en réponse à
On a vu "Marseille" de Netflix avec @Telerama , @lobs et @lemondefr , et c'est une CA-TA-STRO-PHE https://t.co/nabul31WVI
— Le HuffPost (@LeHuffPost) May 4, 2016