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Independence Day Resurgence : un jour normal dans la vie d’un blockbuster (100% spoiler)

20 ans après, Roland Emmerich et Dean Devlin nous offrent la suite d’un des plus gros succès mondiaux à savoir Independence Day. En 1996, le film avait révolutionné le blockbuster. A l’heure où le genre patine, le flop relatif de cette suite nous fait dire qu’ID4 a ouvert et clôt un pan du cinéma.

Après des tergiversations et des copycats surannés, Independence Day refait enfin surface. Après avoir démoli la Maison Blanche et conquis la planète, les aliens reviennent dans une suite longtemps réfléchie. Deuxième volet d’une trilogie, Resurgence sonne assez creux et empêchera sûrement toute suite sauf si le marché international répond mieux au film que les américains.
Avec à peine 80 millions de dollars en deux semaines et des critiques négatives, le film n’égalera jamais les 300 millions du premier film (chiffre énorme pour 1996, l’équivalent d’un Avengers aujourd’hui). Si le premier film n’était pas le meilleur film de cette année-là, cette suite vient un peu au milieu d’un niveau global assez bas dans les blockbusters. Rsurgence n’arrive pas à s’en sortir avec les honneurs.

Will Smith out, Jeff Goldblum, Brett Spiner ou encore Bill Pullman sortaient de leur retraite pour reprendre du service. Le cast s’étoffe avec Liam Hemsworth, Charlotte Gainsbourg, Maika Monroe ou Sela Ward. Et ce qu’on peut retenir déjà de Resurgence c’est qu’aucun acteur ne tire son épingle du lot. Il n’y a à proprement parler aucun héros dans le film. Personne n’a la prétention de succéder à Will Smith et encore moins à la paire bien sentie Smith / Goldblum. Resurgence se permet d’éclater son récit pour situer ses personnages dans plusieurs endroits pour baliser au mieux l’action. Mais sans leader, le film patine et semble se chercher constamment. Sans charisme véritable, le cast n’arrive jamais à élever le niveau et à donner une quelconque tension dans le film. Le script n’est pas aussi fautif, les morceaux de bravoure sont là mais Emmerich n’instaure aucun suspens, aucune tension. On ne ressent absolument rien pendant les scènes d’action. La seule tentative de suspens est totalement annihilée car on sait très bien que le « héros » ne peut pas mourir bêtement comme ça. Bon même quand on s ‘appelle Liam Hemsworth.
Comme pris par l’urgence du projet, Emmerich ne réfléchit pas et se contente de mettre les scènes bout à bout sans chercher à émouvoir ou à faire frissonner. Resurgence propose alors une galerie de personnages dénués de toute émotion et empathie. La Terre est une nouvelle fois détruite mais aucun personnage n’est touché par la tragédie. Des parents meurent, des amours sont perdus et à peine une larme vient se dessiner sur les visages. Un « Noooon » timide se fait entendre et le background psychologique n’est aucunement bouleversé. Londres est détruite, la Terre est forée jusqu’au noyau, la Présidente meure sans que personne ne s’en soucie vraiment.

independence day

Le Destruction Porn a atteint une sorte de paroxysme qui le prive de toute implication du spectateur (et après le rayon bleu vers le ciel, c’est l’anti-gravité de Man Of Steel et X-Men Apocalypse qui revient). Le gigantesque vaisseau débarque sur Terre sans le frisson de 1996, la côte Est est détruite sans dramaturgie. Dans les interactions, les personnages ne se concertent pas entre eux et sont tous d’accord. Le pilotage automatique du film fait vraiment tâche. Si Emmerich a produit le film catastrophe ultime avec 2012, le film catastrophe bien fait avec Le Jour d’Après, le film catastrophe étonnant avec ID4, il semble lui-même blasé. Le gigantisme de la destruction n’a plus aucun impact sur le spectateur. Alors que les catastrophes pouvaient être jugés à hauteur d’hommes quand la production faisait encore appel à des maquettes ou des fonds verts, voire du matte-painting, ici le CGI frôle l’indigestion. Faire de plus en plus gros ne produit rien quand on oublie notre propre condition d’humain d’1m80. C’est beau mais c’est terriblement fade. La jouissance de la destruction n’existe plus car nous avons à peine une demi-molle…

Le discours ultra patriotique qu’ID4 proposait en 1996 et qui était moqué rapidement est assez tassé dans Resurgence. Même si Pullman sort un discours surfait, il n’y a pas de Trum-isation du film voulant rendre l’Amérique « great again ». Emmerich veut rendre le monde uni. C’est pertinent mais maladroit.

Il y a bien une bonne chose dans Resurgence, c’est qu’Emmerich est honnête avec le projet. Il n’invente et ne réinvente rien. Si la modernité va bien au film (les aliens sont évidement plus mobiles, plus actifs avec le CGI, l’action plus fluide, moins artisanale), le propos et l’intention restent intact. Le film ne s’embarrasse de rien et propose ce qu’il a à proposer. Emmerich ne va pas plus loin que son pitch. Vous vouliez un film d’invasion alien ultime? Vous l’avez quasiment. Mais en gardant systématiquement l’idée que tout doit se passer sur Terre et dans la Zone 51, on perd beaucoup d’intérêt. Le caractère épique a beaucoup de mal à sortir des scènes d’action finalement assez pauvres. La visite du vaisseau amiral, la culture alien, les conséquences de 1996 sont à peine effleurées. Même l’idée d’une race ennemie arrive comme un cheveu sur la soupe et n’a véritablement aucun poids stratégique et donc dramaturgique dans l’équation. On prend son pied dans le dernier quart d’heure avec la reine-mère, on aime voir le vaisseau amiral, on aime les batailles entre vaisseaux, on a adoré voir les aliens armés, pourtant la nostalgie ne joue pas et Pullman ou Goldblum font à peine le minimum syndical. Spiner s’en sort admirablement bien et l’ouverture vers une troisième film peut s’avérer intelligent car il permettrait d sortir du modèle ID4. Cette race ennemie, finalement allier des humains pourra apporter sûrement des idées et une grosse baston interstellaire pourra mettre tout le monde d’accord et offrir une belle alternative à celle de Star Wars dans les années à venir.

Il faut continuer à soutenir le cinéma catastrophe, les rares films intelligents du genre sont oubliés et Hollywood peut offrir encore quelque chose. Resurgence loupe le coche. On ne s’ennuie pas durant les 2h de Resurgence, on ressort juste sans émerveillement, sans scène marquante. L’invasion alien se fait rare au cinéma et Emmerich a réussi à ne pas rendre ID4 dépassé. Il a juste échoué à faire quelque chose d’intéressant.

 

Tom Witwicky

Créateur de SmallThings, 1er Geek Picard de la planète Exilé dans le 92

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