Suite, remake, reboot

Donjons & Dragons, l’honneur des voleurs : une aventure honnête et fun

Voilà enfin l’adaptation attendue de Donjons & Dragons, après une tentative nanar en 2000.


Vous savez quoi ? J’ai bien aimé. Je m’attendais à un film raté, et bien mal m’en a pris puisqu’avec des intentions basses, on se retrouve agréablement surpris.
Le film est réalisé par deux bonhommes qui n’ont pas fait des films à lyncher. Le duo Jonathan Goldstein et John Francis Daley vous est peut-être inconnu mais ils ont scénarisé Comment tuer son boss ? 1 et 2 (2011 et 2014), Tempête de boulettes géantes 2 (2013) et Spider-Man : Homecoming (2017). Mais surtout, ils ont réalisé deux comédies réussies à savoir le remake de Vacation (Vive les Vacances en 2015) en signant également le scénario, et Game Night (2018) dont ils ont seulement signé la réal.

Déjà dans Game Night, on sentait cette volonté de raconter un jeu à l’échelle humaine. Bien mise en scène, le film, qui est passé inaperçu, était une réussite formelle. Et avec Donjons & Dragons, ils s’attaquent donc à un jeu de rôle culte qui n’a pas vraiment d’univers arrêté. Le duo a donc tout loisir de proposer un univers avec une base quasi vierge. Et c’est ce qu’ils ont fait. Donjons & Dragons instaure un vrai décor avec ses créatures, ses règles, ses lieux. Et on peut saluer la traduction française qui nous fait dire qu’il y a eu un vrai travail pour proposer quelque chose de plausible, ludique qui rappelle les grandes heures de Harry Potter. C’est d’ailleurs agréable de sentir un film qui rappelle l’époque des adaptations young adults quand il y avait un peu d’ambition. On pense alors au Secret de Terabithia (2007) ou même à Percy Jackson (2010 et 2013).

Critique sans spoilers  de donjons et dragons

Seulement là, le film Donjons & Dragons propose des héros adultes. Ce petit switch apporte une grande différence dans l’approche du film. Les grandes franchises d’aventures et d’héroïc fantasy se comptent sur les doigts d’une main de troll. Il n’y a quasiment plus rien au cinéma. C’est en séries qu’on retrouve Le Seigneur des Anneaux, Le Trône de Fer, Willow ou A la Croisée des Mondes

Ce qui marche dans Donjons & Dragons est donc cet univers qu’on retrouve par petites touches avec des créatures montrées de ci de là, et  des paysages naturels, où le CGI s’ajoute par endroits sans jamais être noyés dedans. Evidement, nous avons des séquences en full cgi mais ce n’est pas comme les blockbusters récents qui tentent de proposer des décors irréalistes en fonds verts. Il y a une certaine sobriété bienvenue dans le film avec, en plus, des animatroniques qui rajoutent une sorte de non-modernité qui rafraichit. On s’étonne même que ces animatroniques soient si voyants. Les mouvements sont peu fluides. On se demande si ce n’est pas voulu, histoire de donner un côté presque intemporel. Le film pourrait être sorti il y a quinze ans que ça ne gênerait pas. Cet aspect daté mais anachronique techniquement donne un nouveau cachet au film.

Avec ce duo de scénaristes, il faut s’attendre à de l’humour. Et Donjons & Dragons aurait pu faire peur avec un comic relief à la Marvel qui désamorce la moindre tension. C’est moins le cas ici avec une ambiance relativement détendue. Les rares tensions sont plutôt gardées. Les punchlines sont peu surprenantes mais elles fonctionnent. On notera la scène du cimetière, véritable scène comique, qui fait le tour de son idée farfelue avec efficacité.

Critique sans spoilers  de donjons et dragons

Mais alors pourquoi Donjons & Dragons est réussi ? Les idées de mise en scène ou de narration sont plutôt bien vues et font mouche à chaque fois. Que ce soit dans les combats où le rythme est là, dans l’utilisation d’éléments du décor, dans le choix d’un élément pour sortir d’une situation (la scène du dragon et de l’eau et du feu est un exemple parfait de comique intelligent), le film ne rate jamais ses effets. On peut tiquer sur quelques scènes où les effets spéciaux sont un peu bancals. Surtout que la sortie du film était prévue en 2021, les effets auraient pu être retravaillés. Evidemment, le budget était déjà bouclé.
On retrouve le plan séquence, à l’instar de Game Night, où on essaye d’attraper quelque chose. C’est réussi, ce n’est pas gratuit et c’est toujours mieux qu’un bête montage plan / plan. Ce duo Daley / Goldstein a vraiment de l’idée. On pense aussi au portail. Sans dévoiler quoi et comment, le portail permet de proposer des idées de mises en scène et de plans judicieux. Les réalisateurs ont vraiment voulu s’amuser plutôt que de faire un « bête » film de genre.

Le petit bémol est dans le troisième tiers. On arrive dans une vraie proposition de jeu grandeur nature. C’est plutôt malin, on y voit même d’autres groupes de personnages. Mais en tendant vers la fin, la résolution du conflit et le grand combat contre le méchant n’ont pas une ambition folle. Le méchant, le Mage Rouge, n’a aucune vraie envergure et le combat est digne d’un mauvais Marvel. Il faut le dire, Marvel a donné une identité aux blockbusters. D’ailleurs, il n’y a qu’eux et Fast and Furious qui peuvent encore proposer des blockbusters franchisés qui attirent du monde. Donc, c’est gris, monté rapidement et sans grande tension. La peur d’avoir un film avec un groupe de personnages contre une menace illusoire, comme dans beaucoup de films Marvel-isés (et de séries, voir Willow), était là. Heureusement, tout le reste du film efface cette idée. Juste que le climax n’a pas une folle identité. La moralisation et le non-suspens finissent par achever le pouvoir de cet épilogue.

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Chris Pine, Michelle Rodriguez, Regé-Jean Page, Justice Smith, Sophia Lillis et Hugh Grant font le job. On ne pourra pas dire que Chris Pine a une grande carrière, mais il prend plaisir à jouer. Cette réunion de personnages très jeu de rôle fonctionne. Justice Smith n’a toujours pas de charisme mais il met toute son énergie et sa sympathie dans son personnage. Sophia Lillis (la petite dans It chapter 1) est parfaite, comme toujours. Regè-Jean Page joue un PNJ impeccable. On sent l’idée derrière d’en faire un personnage qui ne sort en rien de sa case, sans nuance, sans une once de second degré. Michelle Rodriguez est le parfait mix entre Vin Diesel et Dwayne Johnson. Elle tire la gueule, a l’air perdue et sourit de temps en temps. Comme Vin et Dwayne. Hugh Grant cabotine mais son rôle ne lui permet pas de faire grand chose.

Une série de l’univers Donjons & Dragons va arriver sur Paramount+ pour muscler encore plus la franchise. Il faut une franchise d’héroïc Fantasy par plateforme, sinon, ce n’est pas drôle. On souhaite que ce film ait un petit succès, histoire d’avoir quelque chose de différent, pour une fois, et de revenir à des films où l’aventure prime sur la fidélité à l’adaptation. Donjons & Dragons est un film coincé entre Jumanji 2 et le film Willow. Toujours aussi peu de dragons, pas mal de dungeons (des oubliettes), et de l’envie !

En salle le 12 avril !

Tom Witwicky

Créateur de SmallThings, 1er Geek Picard de la planète Exilé dans le 92

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