Une belle fin – Seul face à la mort
Présenté en 2013 à Venise et actuellement en salles, Uberto Pasolini sublime dans Une belle fin (Still Life en VO) un Eddie Marsan au sommet de son art.
John May occupe un poste peu banal. Fonctionnaire, certes, mais chargé de retrouver les familles de défunts qui meurent seuls dans son quartier. Dès le début, un parallèle saute aux yeux du spectateur, May lui-même s’identifie à toutes les victimes qu’il prend en charge car visiblement, lui non plus ne déborde pas d’attaches familiales. A la fin de chaque dossier, il effectue son petit rituel en collant la photo du défunt dans un grand album bleu, très soigneusement. Malheureusement, sa minutie et son penchant à préférer les enterrements (plus coûteux) aux crémations en font une personne non grata au sein de son conseil municipal. Licencié, il tient tout de même à clore sa dernière affaire, un certain Billy Stoke qui s’avère être son voisin d’en face. L’ironie le frappe en pleine face, cela aurait très bien pu être lui, mort seul dans son fauteuil et retrouvé des semaines plus tard, il va donc tout mettre en œuvre pour prévenir son entourage.
Devant la caméra immobile de Pasolini, on se concentre sur l’isolement social de May, gentleman poli et apprécié de la plupart de ses collègues sauf de son nouvel employeur mais trop timide, et très prudent. Vivant sa routine quotidienne, rien ne l’ébranle même si on sent bien qu’il compatit énormément aux gens qui se retrouvent seuls le jour de leurs funérailles. Le film repose sur les épaules d’Eddie Marsan, rangé la plupart du temps dans des rôles secondaires étranges. Bon, ici aussi son personne est marginal, mais il lui va à merveille. Sa gentillesse et son implication dans son travail toucheront plus d’une personne, et petit à petit, il va s’ouvrir au monde. Toutefois, sans vouloir spoiler, la signification de la fin m’échappe, et c’est sans doute la raison pour laquelle je garde des réserves…
Le sujet ne paraît pas vraiment évident, puisqu’on peut rapidement tomber dans le morbide quand on traite de la mort, mais c’est loin d’être le cas ici. Au contraire, il s’agit bien de la vie et de l’importance des relations sociales que le réalisateur met en exergue. Sans fioriture, prenant une chose à la fois, que ce soit un plan de dîner ou la traversée d’une rue, le style un peu ringard colle bien au ton décalé du film. Malgré l’aspect tragique de l’histoire, c’est souvent avec le sourire en coin qu’on suit les péripéties de John May. Puis la bonne surprise reste l’intervention (un peu courte) de Joanne Froggatt (Downton Abbey) qui est toujours aussi brillante dans des rôles de femmes ayant surmonté des traumatismes.
(P.S. : Il ne manquait qu’une chanson « Eleanor Rigby, died in the church and was buried along with her name. Nobody came… » dans la BO un peu simpliste.)