Critiques de livres

(Très) Cher Cinéma : on a finalement lu le livre à votre place

Eric Neuhoff a été invité partout en 2019 pour parler de son brûlot sur le cinéma français. Les meilleures pages étaient évidemment commentées. Mais que vaut le livre en entier ?

Effectivement, quand un livre n’est commenté que via ses meilleures pages, on sait que l’ensemble ne volera pas bien haut.
Alors oui Eric Neuhoff m’était inconnu. Je n’avais rien lu de lui et les interventions TV pour ce livre me faisait dire qu’il était un aigri timide qui vidait son sac.

En finissant (Très) Cher Cinéma, je vois la liste de ses œuvres et beaucoup semblent être des bilans amers de beaucoup de choses. C’est alors que je sens que ce livre n’a été que le reflet de ses pensées historiques. Le Prix Renaudot de l’essai 2019 n’était pas une surprise venant de l’auteur. Pour le lecteur, peut-être qu’il était d’avantage une déception qu’autre chose.

Accumulant les imageries gonflantes et répétitives, le livre n’a guère d’autres arguments que de dire que c’était mieux avant. Pour quelles raisons ? On ne sait jamais vraiment, Neuhoff enchaine les impressions d’un cinéma d’antan, il déroule des moments de films en ne les ponctuant que d’un :« où sont passées ces scènes aujourd’hui ?« . Et Neuhoff n’a rien d’autre à dire que ça.

Dans un flagrant délit de râle, l’auteur ne cesse d’accumuler des souvenirs en les comparant à ce qui se fait aujourd’hui. Le gros problème est qu’on ne sait pas pourquoi le cinéma d’avant est mieux que celui d’aujourd’hui. Les exemples proposés ne sont guères plus engageant que ce qu’on pourrait trouver comme contre-argument avec le cinéma actuel. Les scènes citées n’ont d’aura que parce qu’elles sont liées à des souvenirs plus qu’à de vraies qualités.

A comparer le semblable, le livre finit par ne plus rien dire du tout. Les rares passages cités dans les émissions TV sont drôles, oui, mais elles ne sont pas à l’image du reste du livre.

Oui, après de longs passages redondants, on pense qu’une idée se dessine chez Neuhoff. Le cinéma d’avant semble un peu insouciant, s’oublie dans une légèreté qui a pondu des classiques. Le cinéma d’aujourd’hui ne serait que facile ou moribond en ne faisant que des répétitions de schéma ou des histoires trop ancrées dans le réel, réel que Neuhoff trouve pensant.

Alors que le livre se vendait sur un titre qui pouvait faire penser à l’économie chancelante du cinéma, il n’en est rien. A peine Neuhoff effleure les conditions de production, il préfère énumérer une liste d’acteurs ou d’actrices qu’il trouve énervant plutôt que de dresser une vraie liste d’arguments soulignant vraiment pourquoi le cinéma d’aujourd’hui est inintéressant.

Il n’arrête pas de faire de longs paragraphes d’images dont la moitié nous est inconnue pour encenser le passé.  Et nous, bêtement, on continue de lire pour voir si cette longue introduction de 100 pages va amener à quelque chose. Il préfère égratigner les critiques quand il en a fini avec les réalisateurs. Un peu gênant aussi quand il commence à faire le portrait de la garce qui n’existe plus. Au fil des pages, on sentait un désir de retrouver l’image des femmes séductrices réduites à ce simple rôle. Et quand il s’en va de sa fougue pour décrire le « retour de la putain ». On croit rêver.

Arrivé à la dernière page, on ne comprend toujours pas pourquoi les films d’aujourd’hui en sont là à être sujet de cet essai. Il crie à la fin du monde sans nous dire quelle est la menace. Même les cinéastes qui réagissent à (Très) Cher Cinéma pour AlloCiné semblent hors sujet tellement le vrai sujet n’a pas été saisi. Dommage.

Tom Witwicky

Créateur de SmallThings, 1er Geek Picard de la planète Exilé dans le 92

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