Rétro Pixar, J-4 : Rebelle
Après un passage par les voitures, nous voici arrivés au début de la fin de notre rétro Pixar, avec un film fait d’humains en chair et en os ( et en cheveux roux pour beaucoup d’entre eux, ainsi qu’en ours : parlons un peu d’un des films les moins évoqués en parlant de la firme avec sans doute également le moins de retombées dans la pop culture : Rebelle.
Promise à devenir une sage princesse, la jeune Mérida est impétueuse, manie l’arc comme personne et refuse de se plier aux conventions. Elle formule le voeu que sa mère, un jour, change et ne soit plus en mesure de lui dicter cette conduite réductrice. Elle pourrait bien avoir ce qu’elle souhaite ….
Le premier tiers de Rebelle est absolument excellent. Pixar place les bases d’une histoire sur fond de légendes antiques assez intéressantes, on nous présente vite Mérida et sa famille et le film s’installe confortablement dans un rythme où on le suivra avec plaisir. Le message du film est très louable à la base : féministe. Mérida est enfermée dans une société partiarcale et n’est bonne qu’à attendre qu’un prince l’épouse comme dans tout bon Disney. Seulement, elle ne l’entend pas de cette oreille du tout, veut rester indépendante et ce n’est pas les leçons de bonne tenue de sa mère qui l’en empêcheront : le film touche ici un point très intéressant et ultra sensible, bien loin de former un manichéisme stupide et pourtant parfois en vigueur dans notre monde en séparant les hommes sexistes et les femmes qui s’en détachent, le film est réaliste, connaît la réalité des choses et montrent aussi que certaines, et c’est sans doute le point de plus problématique pour la libération des femmes qui doit advenir, ne veulent pas être libérées et se complaisent dans leur « rôle » institué par les hommes : assez profond pour un film pour enfant, voir osé dans les temps qui courent.
Il est problématique que le film, de ce point de vue moral, ne tienne pas ses engagements. Assez vite en fin de compte, on ramène tout l’intrigue au devoir de chacun de respecter son destin et de l’acquérir, sans que le patriarcat ne soit de nouveau évoqué, tout est mis au même niveau et le film a l’air d’encourager au même niveau celles qui souhaitent s’en libérer et celles qui s’y enferment. Le problème de Rebelle est que, de par son simplisme, le film en devient assez maladroit, on peut se tromper sur le message qu’il véhicule car le sous texte disparaît trop vite du film, comme si Disney avait tapé sur les doigts de Pixar et demandé une universalisation, une globalisation plus importante du message véhiculé pour que le film ne soit pas trop engagé et puisse plaire à tous. D’autant que le film de Brenda Chapman et Mark Andrews ne concerne que les humains, cette fois, et sans doute devait aux yeux des producteurs faire preuve de moins de liberté dans son message.
Car Pixar a laissé l’antropomorphisation de côté. Hourra ! Pardon mais après avoir passé des heures devant Cars et les autres, on commençait à penser que la firme était devenue routinière : que nenni ! Rebelle est fait d’humains et c’est la première erreur dont la firme a appris : quand une bonne histoire ne nécessite pas forcément d’êtres autres qu’humains pour la faire vivre, alors gardons les humains, sans doute ce qui faisait aussi pour beaucoup la réussite de Là-Haut. Le seul animal important du film, c’est la mère qui se change en ours, et le personnage devient alors complètement mutique, dans la normalité la plus totale. Un animal parle bien dans Rebelle, un certains corbeau ensorcelé qui effraie l’héroine de par son babillage incessant, comme si la firme avait finalement pris conscience de quelque chose. Paranoia ou mise en abyme, cette scène ? Le mystère reste entier mais on croit Pixar suffisamment intelligent pour la seconde option : quand les humains sont les héros, alors le normal devient anormal, tout se renverse et le récit peut avoir les pieds sur terre.
D’autant plus étrange dans cet état de fait que l’émotion soit à ce point négligée dans Rebelle. L’écriture des personnages est assez satisfaisante bien que trop biaisée (concrètement, seul l’héroine a droit a un vrai développement, sa mère un peu aussi et puis basta), l’intrigue est assez bien menée et a une fois de plus le mérite de privilégier le micro au macro (quasiment une seule unité de lieu, les enjeux sont personnels, il ne s’agit jamais de sauver le monde mais bien de régler des difficultés d’ordre presque psychologiques), on finit par s’ennuyer un peu au vu de l’aspect un peu répétitif de l’intrigue mais le film reste assez modeste est cohérent. Pourtant, l’émotion réelle en est absente, c’est presque une première pour Pixar : à part un passage assez fake à la fin du film avec une musique grandiloquante alors qu’on sait bien que cela finira bien pour tout le monde, rien à se mettre sous la dent, aucun trauma enfantin ni rien de bien symbolique (la tapisserie qu’il faut recoudre ? C’est mince…). Le film, intéressant et partant d’une bonne intention, en est finalement presque impersonnel sur certains points, bien que lui reprocher une mécanisation serait injuste.
On arrive demain à la suite d’un des films les plus aimés de Pixar : soyez prêts pour Monstres Academy !
AMD