Suite, remake, reboot

Power Rangers : question d’adaptation

Après plus de 20 saisons, Power Rangers débarque au cinéma dans uen version Hollywoodienne, loin des deux films sortis dans les années 90.

Plus de budget, reboot complet de la franchise, origin story, Power Rangers par Dean Isrealite (Project Almanac en 2015) est un film qui se veut dans la mouvance logique des superhéros au cinéma. John Gatins s’occupe du scénario. Le bonhomme est derrière les histoires de Kong: Skull Island, Need for Speed, Flight et Real Steel donc plutôt adepte des gros trucs qui font du bruit et du chantier.

Après 2 heures de film, Power Rangers est à ranger du côté des films discutables. Ni mauvais, ni bon, le film réussit sur de nombreux plans mais échoue sur des choses fondamentales qui font pencher la balance.

 

Jason Scott est l’ancien footballeur star d’Angel Grove mais une blessure et un comportement maladroit l’ont éloigné des terrains et de la célébrité. Quand il aide un petit génie, Billy dans une de ses passions qu’est la géologie. Un concours de circonstances (et il y en aura beaucoup dans le film) réunit 3 autres jeunes gens. Ils trouveront des pierres de 5 couleurs et… vous savez la suite.

power rangers

Le film s’attache pendant les deux tiers de son temps à raconter une Origin Story assez balisée. La bonne idée est de s’affranchir de pas mal de clichés adolescents. On se base sur des archétypes de personnages et on en fait des personnages perdus. Le footballeur n’est pas footballeur, il s’efface pour être un adolescent, chacun semble coincé dans une enveloppe qu’il n’a pas choisi. On s’affranchit aussi de clichés de situations. L’accident de voiture surprend en détournant une scène rincée du genre action, la bagarre entre adolescents se finit avec un geste inédit, l’adolescent qu’on croit perdu dans sa sexualité n’est pas celui que l’on croit… en somme, le script a suffisamment d’éclairs de lucidité pour offrir des moments plaisants et qui soulagent beaucoup. Malheureusement, les clichés sont là où on s’y attend le moins. Le ralenti ignoble sur une certaine scène vous fera surement rire.. Les scènes d’action n’ont aucune âme et ce qui devait être le point d’orgue du film, là où tout bascule, où chaque film de superhéros atteint son paroxysme, celui où le héros devient superhéros, où il embrasse sa destinée, tombe à plat. La vraie partie Power Rangers arrive bien trop tard et le script n’a pas l’idée de s’attarder sur ce que le spectateur un peu connaisseur de la marque Power Rangers sait déjà mais qui était quand même ce qui attire. Il est en effet regrettable de ne pas voir les 5 personnages faire connaissance avec leur armure et leur Zord. C’est à peine si la caméra de Dean Isrealite veut bien nous les montrer en détail, on ne voit strictement rien. Même l’assemblage en Megazord se fait dans une bouillasse pyrotechnique qui n’offre aucun moment de grâce divertissante, de jouissance geek.

Sur ces points essentiels, le film pêche. En se penchant sur le cahier des charges, le film coche des cases qu’il n’aurait pas du caser. Le méchant (Elizabeth Banks qui fait ce qu’on lui demande) est caricatural, la menace inexistante et les enjeux simplifiaient au maximum. On parlait des concours de circonstances mais le script ne s’embarrasse d’aucun obstacle. Il n’y a que l’aspect « valeurs fraternelles » qui empêchent les héros d’avancer. Sinon, tout est facilité. La découverte des pouvoirs, la menace qui débarque au même moment, le premier et seul combat, les adjuvants absents, les opposants réduits au minimum (Bryan « Zordon » Cranston se fait plaisir), Power Rangers ne s’embête de rien. Et tant mieux dans un monde où le blockbuster est devenu tellement boursoufflé d’enjeux ! Mais tant pis quand on essaye d’adapter Power Rangers. La réussite de l’adaptation a ses limites. Parvenant sans mal à reproduire le schéma « tactique » de chaque aventure PowerRanger-esque, le film ne cherche pas une identité maîtresse. Oscillant entre le premier et le second degré, le film a le cul entre deux chaises. C’est aussi peu profond que la série et donc fidèle mais ça ne prend aucun risque et donc ça n’apporte que peu de choses.

power rangers

Reste que le ton du film reste constant même si la première vanne du film nous surprend par son côté potache. Le métrage est gentil sur les phases d’humour qui désamorçent la moindre tension. La scène poignante du film arrive bien trop tôt. Le public ne s’attachant pas méditativement aux personnages, on ne croit pas en cette phrase larmoyante qu’on sait temporaire. Dans un second film, l’idée passerait volontiers. D’ailleurs, les 5 prochains films ont intérêt à proposer un script un peu plus fourni (et un meilleur réalisateur). Le style du film se permet de citer les références évidentes comme Spider-man ou Transformers et tend vers une proposition nouvelle et fraîche du blockbuster. On en avait quelques uns à l’époque où le teen était la vedette. Number 4, Jumper ou d’autres films décomplexés mais trop simplistes avaient émaillé les écrans il y a dix ans et il serait de bon ton de revenir à ce genre de film grand spectacle que Marvel essaye de faire mais en s’imposant un cahier des charges moins contraignant. La violence de Power Rangers à l’écran ou suggérée est tout de même plus intéressante que dans les blockbusters actuels. Il y a donc une note d’intention plutôt agréable pour un film qui devait s’adresser aux grands enfants.

Agréable spectacle, Power Rangers fait l’équilibriste entre l’hommage vibrant second degré et l’adaptation adulte premier degré. Le film n’était pas un projet facile et il s’en sort finalement avec peu de casse vu le produit d’origine. La base n’est pas sublimée mais utilise au mieux le médium où il est. Il y a 15 ans, le film aurait été une franche réussite mais nos attentes ont été bouleversées par la lente évolution des films à grand spectacle.

Tom Witwicky

Créateur de SmallThings, 1er Geek Picard de la planète Exilé dans le 92

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