Nocturnal Animals : out of the night
L’année 2017 vient tout juste de commencer et tout le monde souhaite que ce nouvel an cinématographique tienne autant ses promesses que celui de 2016. Nocturnal Animals fut le premier film vu en salles cette année. C’est un uppercut.
Des corps de femmes fripés, obèses, vieux. Elles dansent devant nos yeux ébahis. Les notes d’intention de Tom Ford sont claires: Nocturnal Animals sera un portrait de la laideur, aussi bien physique que morale. Il est plus que difficile de résumer le film ou de le rattacher à une oeuvre préexistante. Tom Ford nous questionne sur plusieurs aspects: qu’est-ce qu’une fiction ? Quel est notre rapport à celle-ci ? A l’heure où n’importe quel film va tâcher d’expliquer son univers aux spectateurs, à l’heure où il faut le prendre par la main afin de l’accompagner, Tom Ford choisit de bousculer, voire d’exploser les codes. Le film pose les questions sans y répondre. Au spectateur de se faire sa propre idée sur ce qu’il a vu et tâcher de trouver les possibles connexions du film. Car Nocturnal Animals superpose plusieurs espaces diégétiques; l’un étant le monde de Susan, l’autre étant celui du livre de son ex-mari Edward. Existe t-il une passerelle entre ces deux récits ?
A bien des égards, on pourrait rapprocher la démarche de Tom Ford à celle d’un réalisateur moderne comme Michelangelo Antonioni. Des personnages inactifs, une vision dénué d’âme du monde, des personnages vivant une crise morale et existentielle ou encore étant dans l’incommunicabilité. Mais à l’instar de Apichatpong Weerasethakul (Cemetery of Splendour) ou de David Fincher (Gone Girl). Tom Ford laisse au spectateur le choix d’interpréter ce qu’il vient de voir. Il est intéressant de constater que ces trois films partagent plusieurs points communs. En effet, deux récits se superposent à l’intrigue principale; les héros sont en proie à des doutes moraux; le spectateur est dans une position d’enquêteur où il doit tâcher de comprendre et trouver le sens des images.
Autant dans la forme que dans le fond, Nocturnal Animals est une oeuvre aussi importante dans le cinéma contemporain que Mulholland Drive de David Lynch. Un film puissant, profond, obsédant et porté par un casting au diapason. Oui, l’année cinématographique 2017 commence sur les chapeaux de roues.
T. Bonnet