Suite, remake, reboot

Lego Batman, le film : quand le merchandising s’accouple avec la culture

Après la franche réussite qu’était Lego Movie, les petites briques reviennent sur le grand écran pour une bombe hilarante de pop culture et de bonne humeur, centrée sur l’univers DC, Lego Batman le film !

Alors que Batman a une fois de plus déjoué un plan maléfique du Joker sans lui apporter plus de considération, ce dernier décide de partir dans un autre univers pour former une équipe de vilains redoutables. Le justicier solitaire de la nuit va devoir apprendre à aimer son prochain et à travailler en équipe si il veut mettre à bas cette odieuse machination … 

L’effet de surprise passé, on pouvait craindre ce nouveau film Lego. La franchisation vidéo ludique de cet univers si particulier continue son petit bout de chemin au cinéma, et Lego Batman est la seconde grosse brique en ce qui concerne ce média culturel. Mettons de suite la halte aux sceptiques : comme Lego Dimensions et le film Lego avant lui, Lego Batman est une irrésistible réussite en terme d’humour pur.  Tout fonctionne dans ce film qui s’adresse, comme la célèbre marque avant lui, aux humains de 7 a 999 ans. Sans se mentir, le film de Chris McKay est un pur objet marketing, une publicité longue  d’1h47, et dans ce sens, il remplit inexorablement son cahier des charges.

 

Lego Batman
C’est une itération classique du Joker que Batman affronte !

 

On sait que la sphère hollywoodienne a un problème quand le film que l’on vient d’apprécier plus que beaucoup de blockbusters actuels  ne contient absolument aucune surprise… et que ça nous va (même si pour ma part je lorgne plus vers Marvel que vers DC en disant ça). L’effet de Lego Movie est passé, on sait à quoi s’attendre en allant voir Lego Batman : du fun, des références bien ampoulées, des rires et des bons sentiments. C’est exactement ce que l’on a, on sent que Warner veut capitaliser sur ce qui est devenue pour elle une valeur absolument sûre, à la manière des adaptations de JK Rowling, et elle remplit les cases des attentes des spectateurs de manière inexorable et convaincante. La grande force du film est la même que celle de Lego Dimensions et Lego Movie : sa parfaite gestion de son univers qui n’est pas si partagé que ça puisque, pour des raisons évidentes de droits, seules les grandes franchises Warner sont à l’affiche : de Harry Potter à Gremlins en passant par le Magicien d’Oz (on ne dira rien de plus pour ne rien vous gâcher), le monde de Lego est tout de même une véritable orgie geek.

 

Lego Batman
Toute la Bat-Family est présente.

 

Rien n’est là pour la figuration dans Lego Batman. Le projet est parfaitement maîtrisé, la technique est un peu en retard comparée au film précédent (l’action n’est pas toujours lisible, les informations visuelles sont en surcharge) mais le plaisir et l’envie sont là. On sent clairement que certaines blagues (le passage du beat box qui rappelle Ninja Turtles) sont là pour faire rire les enfants perdus par trop de références s’adressant clairement à la génération Y. Au delà de quelques passages pour le coup plutôt inattendus, l’aspect référentiel du film lorgne clairement vers les années 90. Étrangement, les rares gags méta du film sont plutôt des moqueries du merchandising cinématographique des années 2000, entre vannes sur le ton des films DC et tacle à Iron Man et Marvel franchement rafraîchissants.

C’est d’ailleurs le problème du film : ces fameux tacles. Quand ils arrivent, et c’est rare, ils sont finalement assez gentillets et sans vrai relief. On est loin de la critique du capitalisme qu’engageait le premier film, quand bien même l’engagement perdait vite de sa superbe pour cause de postulat bancal (comme disait un critique de Mad Movies sur le Robocop de Padilha : « un film contre les corporations fait par des corporations »), ici le film parle de pop culture et ne parle que de ça, sans se préoccuper des aspects sombres de la dite culture et de son merchandising. Ici, Lego Batman a le poids des dites corporations sur ses frêles épaules et il leur fera tout juste un signe de tête, un clin d’œil complice et amusé de temps à autre sans aller plus loin de peur de froisser ceux qui ont demandé sa conception. C’est la note plus froide, plus tendue du film, celle que l’on a du mal à passer sous silence malgré une appréciation subjective évidente.

 

Lego Batman
Comme à son habitude, Batman botte pas mal de popotins.

 

Pourtant, le film ne perd pas tout recul, loin de là. La critique de la société s’est volatilisée, mais une grande culture est présente et ravit le spectateur avide de références et de profondeur qui font aussi le sel de cette grosse production, qui ne se distinguerait sinon par la simple technique de stop-motion, dont on a déjà relevé l’imperfection. L’aspect intelligent de Lego Batman est le traitement du personnage éponyme, franchement insupportable puis attachant quand il dévoile sa solitude : DC fait du DC et on a hâte de voir les fameux « haters » dire que, pourtant, ils ont aimé le film. Batman, dans le film, est tour à tour humain (Bruce Wayne presque incapable d’enlever son masque), héros (le final presque emprunté à Avengers), et objet culturel (les innombrables références aux précédentes incarnations du personnage). Le film gagne en culture ce qu’il perd en subversion.

 

Lego Batman
Batman va devoir réapprendre le travail d’équipe …

À l’arrivée, Lego Batman est à voir. Le film est rafraîchissant et cultivé, même s’il est presque fatiguant au fur et à mesure de sa surcharge sonore et visuelle. Au delà des travers attendus, un excellent moment est à attendre si on se prend au jeu.

 

AMD

Adrien Myers Delarue

Résidant à Paris, A.M.D est fan de Rob Zombie, de David Lynch et des bons films d'horreurs bien taillés. Sériephile modéré, il est fan de cultes comme X-Files, Lost, ou DrHouse, ou d'actualités comme Daredevil ou Bates Motel.

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