Le Prophète : conte onirique inspiré de l’œuvre de Khalil Gibran
En ces temps bien mornes, Le Prophète est un film animé qui fait du bien. Réalisé par Roger Allers, d’après l’œuvre du même nom du libanais Khalil Gibran (Albin Michel, 1996, et nouvelle édition à paraître), Le Prophète est un projet qui tenait particulièrement à cœur à Salma Hayek, qui prête sa voix au personnage de Kamila en anglais comme en français. A partir d’aujourd’hui dans les salles.
Sur une île imaginaire, la petite Almitra, huit ans, rencontre Mustafa, prisonnier politique assigné à résidence. Ils deviennent amis et vont entreprendre ensemble tout un voyage onirique. Almitra se laisse bercer par les récits de Mustafa et témoigne d’une grande imagination qui va entraîner le spectateur dans une danse de scènes colorées, aussi poétiques que philosophiques.
Roger Allers n’est autre que le scénariste de La Belle et la Bête, d’Aladdin et du Roi Lion ! Avec Le Prophète, on sent qu’il se lâche complètement et laisse libre cours à son imagination, ainsi qu’à son amour de l’œuvre de Gibran. C’est un véritable hommage qu’il lui rend, à travers ce long-métrage hypersensible qui ne se refuse rien. Certains trouveront le film trop métaphorique, certains se laisseront complètement embarquer dans cette poésie qui fait sens. Si le réalisateur du Prophète a choisi d’utiliser la 2D, c’est pour coller parfaitement à l’œuvre de Gibran et ne pas faire appel à l’humour et la distance qui caractérise les films d’animation actuels. Non : pas de distance dans le traitement de l’amour du pays et l’amour tout court. Pas de distance dans le discours sur la vie, le bien, le mal, et l’espoir. C’est le choix du film, qui ne plaira pas à tout le monde.
« Le livre de Gibran aborde toutes les grandes questions de l’existence. Il parle de l’amour et de la mort, des enfants et du travail. Pour rendre justice à son œuvre, ce film ne pouvait pas jouer sur le ridicule. » (Roger Allers)
Le film, qui contient un fil rouge, se découpe en petits chapitres très visuels, qui correspondent à certains récits de Mustafa à Almitra. Différents réalisateurs de diverses nationalités, tels que Joann Sfar, Tomm Moore, etc., se sont vus confier la création de ces passages, très beaux et hautement métaphoriques.
Le Prophète est un projet très personnel pour ceux qui l’ont porté. Que ce soit dans la réalisation, dans l’adaptation d’une œuvre emblématique, dans la pose de voix sur les personnages… Lors d’une conférence de presse il y a quelques semaines, Salma Hayek s’est confiée sur son ressenti vis-à-vis du film, qui est pour elle une sublime mise en image de la poésie de Khalil Gibran. Si elle a accepté d’être la voix de la mère d’Almitra, c’est dans un désir de transmission à sa fille. « Le Prophète peut aussi intéresser les adultes », dit-elle. « En effet, le film permet d’expérimenter la vie et la philosophie à travers les yeux d’une petite fille ». Le choix de Mika pour la voix française de Mustafa a été comme une évidence pour Salma Hayek : « il a la pureté et le cœur d’un enfant ». La voix anglaise est celle de Liam Neeson, très différente de celle de Mika car plutôt grave. « Je n’ai pas cherché à créer une voix pour Mustafa : j’ai décidé de raconter l’histoire tout simplement. »
A découvrir si vous aimez la poésie. A éviter si vous n’êtes pas prêt à vous laisser porter par ce conte onirique tout en images et en philosophie.