Final Fantasy Kingslaive : (End of) Summer Wars
Le 15 septembre est sorti en VOD le film Final Fantasy Kingsglaive, introduction au monde et événements crées dans le nouveau jeu de Square Enix, Final Fantasy XV. Pour l’occasion, une avant-première a été faite au Grand Rex, à laquelle Smallthings a pu participer.
Avant-première haute en couleurs, puisque le Grand Rex y a mis les moyens : la gamer Kayane (au demeurant vite agaçante de fanboyisme), une présentation de trailers exclusifs du jeu, un épisode de la série animée Brotherhood (dont les événements ont lieu après ceux de Final Fantasy Kingsglaive), et enfin, la présence de toute l’équipe technique ainsi que du réalisateur, Takeshi Mazue (déjà co-réalisateur du précédent film, Advent Children). Un programme événementiel plutôt bon enfant, où le show a été assuré et les fans (pour certains cosplayés) gâtés. Mais c’est tout de même après 45 bonnes minutes que nous avons eu droit au film. Attention, critique NON-GAMER.
Final Fantasty Kingsglaive se déroule en parallèle du jeu Final Fantasy XV : alors que celui-ci conte la quête de Noctis, l’héritier royal, et de ses amis, le film s’intéresse surtout à la garde rapprochée du roi Régis, les Kingsglaive, guerrier maîtrisant la magie, dont le principal est Nyx Ulric (doublé par Aaron Paul). L’action prend place dans le Royaume de Lucis, en guerre contre l’Empire de Niflheim, qui prend finalement le dessus et propose une reddition : la capitale Insomnia sera laissée indépendante et la princesse Lunafreya, de la province voisine Tenebrae, sera donnée en mariage au prince Noctis. Le roi, en signe de paix, accepte les termes, mais les Kingsglaive, dispersés après la défaite, ne voient pas cela d’un bon oeil, y voyant une manoeuvre de Niflheim contre le Royaume et son cristal de pouvoir.
Un pitch bien dense, et c’est tout à l’honneur du film : il accomplit la difficile mission de faire entrer tous les curieux dans un vaste monde fait de magie, de guerre, d’intrigues et autres rivalités politiques. Mieux, il constitue un bon moyen, pour ceux qui y joueront, d’attirer vers le prochain opus de la célèbre saga, puisque les enjeux y sont clairement et fermement établis. Car la première grande qualité du film est son efficacité : très punchy, ne perdant pas son spectateur en cours de route, dynamique, le film va droit au but et, s’il ne peut s’empêcher un nombre incalculable de discours clichés sur le destin, le passé, le futur et autres thématiques plus ou moins mielleuses, est bien servi par des dialogues dynamiques, grâce notamment à son casting vocal de luxe (Lena Headey la joue « young Cersei » en princesse, Aaron Paul est lui un Nyx façon « epic Jesse Pinkman », et Sean Bean en bon soldat – SPOILER oui il meurt à la fin). Le film montre une ambition non-dissimulée et appréciable : non content de faire de la fantasy et faire plaisir à ses fans, Final Fantasy Kingsglaive tâche de se placer en tant que film au sens propre du terme, afin que ceux souhaitant à la fois découvrir l’univers mais aussi apprécier le genre fantasy sur grand écran puissent s’y retrouver. Il existe en tant que film, pas seulement en tant que produit.
De surcroît, visuellement, Final Fantasy Kingsglaive est absolument ébouriffant : l’équipe technique a mis tout le savoir-faire de la saga vidéoludique au service de son film, afin d’offrir une sorte de réalisme magique saisissant. Les décors, bâtiments, objets sont si bien restitués que le temps d’une course-poursuite en voiture, le film se transforme en pub ambulante pour la marque de voitures Audi. Mais mieux encore, les visages apparaissent profondément sculptés, tant et si bien qu’on croirait avoir affaire à des vrais acteurs agissant dans le film. Plus encore, et notamment dans la séquence finale qui voit le général Gaula et Nyx se livrer un combat titanesque, la caméra effectue une plongée dans l’action qui ne se relâche jamais, suivant ses personnages au fil de leurs mouvements, quitte à secouer son spectateur dans tous les sens ; le laissant bouleversé. Qu’importe, l’objectif est atteint : il aura vécu au coeur même de la bataille. Final Fantasy Kingsglaive se présente donc fort d’une capacité immersive essentielle et décisive pour apprécier le film : c’est là une grande différence avec son prédécesseur dans le coin gamer, Warcraft, qui non content de larguer complètement quiconque voudrait des précisions sur l’univers, restait à l’état de quasi-cinématique, se laissant regarder, mais avec moins de jouissance que ce qu’a pu provoquer Final Fantasy Kingsglaive en tant qu’expérience visuelle, émotionnelle et sensorielle.
Sa plus grande qualité est aussi son plus grand défaut : l’efficacité de Kingsglaive et son statut de prequel à un jeu vidéo le rendent forcément simple et peu risqué dans son projet. Comme mentionné plus haut, les discours sont assez classiques voire clichés du genre, et le film ne s’en cache pas, notamment quand Nyx dit à la princesse d’arrêter son numéro de princesse intrépide et de lui laisser les tâches de héros, prenant à lui toute la dimension sacrificielle (bien facilement offerte par des dieux prompts à retourner leur veste au premier mot engagé de Nyx). Dès lors, le personnage de Lunafreya devient inoffensif en tant que tel, tandis que Libertus est un peu bringuebalé dans tous les sens, quittant les Kingsglaive pour rejoindre une Résistance relativement bidon (trois péquenots dans une cave, peu ou prou) avant de revenir sur le devant de la scène, alors que Nyx prend toute la lumière, dans un film qui a fait de la trahison sa thématique principale. Si cet écueil marche toujours dès lors qu’il est bien amené, le film a trop capitalisé dessus (et sur une quête bateau de demoiselle en détresse) plutôt que de creuser quelque peu ce qu’il y a autour : le cristal de pouvoir trop rapidement évoqué, les exploits passés du roi Régis, les motivations profondes de chacun, les tensions politiques laissées à l’appréciation de ceux plus familiers du monde établi ; autant de choses laissées à l’état d’ébauches. Cela n’est d’ailleurs pas aidé par le montage du film, consistant à envoyer des écrans noirs maladroits à chaque fin de séquence, hachant quelque peu la linéarité du propos, comme si le film refusait de s’assumer complètement. Cela ne nuit heureusement pas à l’expérience que le film propose
Bien sûr, il ne fallait pas attendre autre chose qu’un divertissement efficace de la part de Final Fantasy Kingsglaive. Mais mieux que simplement faire le job, et malgré son classicisme, le film a toujours essayé de mettre la barre haut et de proposer au public les meilleures sensations possibles pour perpétuer tout ce que la saga a toujours proposé : un univers riche d’histoires. Et prendra encore plus de sens avec les suites et le jeu vidéo.