Critiques de livresRentrée Littéraire 2015

À l’enseigne du cœur épris : premier roman de Jean-François Pigeat

À l’enseigne du cœur épris est le premier roman de Jean-François Pigeat, paru au Dilettante pour la rentrée littéraire.

À l’enseigne du cœur épris est l’histoire d’un type. Et d’une femme. La vie les a marqués, le mariage ne leur a pas réussi. Lassés du célibat mais devenus exigeants par l’expérience, ils se rencontrent par l’intermédiaire d’un site spécialisé. Ils s’approchent, se testent, partagent des diners, des films, des spectacles, des expos. Chacun sait ce qu’il recherche mais est-ce que l’autre y correspond ? Le cahier des charges était clair, les règles ne l’étaient pas moins. Ce n’est pas un compte de fée, mais les fées ça n’existe pas. Oui, c’est sûr, Stéphane et Geneviève sont compatibles. Indépendants et partageant pourtant une complicité que beaucoup jalouseraient : l’accord parfait. Ils étaient heureux. Et si ça n’était pas le bonheur, ça y ressemblait.

a-l-enseigne-du-coeur-eprisEt puis un jour, c’est la chute. Pourquoi a-t-il fallu qu’elle glisse bêtement dans la baignoire ? Des semaines de plâtre, autant de revalidation. Une éternité. Une période infinie au cours de laquelle le grand fils de Geneviève revient à la maison « juste le temps de se refaire ». Un fils ? Stéphane est stupéfait. Comment a-t-elle pu lui cacher une chose aussi importante ? Tout à coup, les moments de bonheur s’embrument. Émotionnellement, il s’éloigne. Physiquement, la cheville plâtrée, et les antidouleurs, et l’humeur de Geneviève ont déjà réglé la question. Est-ce que le casting était finalement bon ?

Pour cette rentrée littéraire, le Dilettante ose à nouveau un premier roman (voir Petits plats de résistance). Dans À l’enseigne du cœur épris, Jean-François Pigeat propose un thème mille fois traité : l’histoire d’amour. L’intrigue est vieille comme le monde (marchera/marchera pas ?) et le sujet a été repris par les plus grands (ou les plus vendeurs). Qu’à cela ne tienne, Pigeat l’éloigne des clichés habituels et offre à ses lecteurs des personnages et une intrigue auxquels on a envie de croire. Il n’est pas le plus fort, elle n’est pas la plus belle. Leur vie n’est pas la plus extraordinaire non plus : pas la moindre trace d’un milliardaire séduisant, pas d’événement surnaturel, pas de vampire, pas de voiture de luxe. Juste des gens. Des vrais gens. Des gens qui ont vécu, qui se rencontrent et qui tentent de construire autre chose. Mais comment faire ? Chacun arrive avec ses valises, plus ou moins lourdes, et finalement, il faut faire avec. Le passé a érigé des murailles entre le corps et le monde extérieur : trop souffert, plus jamais ça. Il faut réapprendre à faire confiance, à se laisser aller à y croire, se reconstruire pour pouvoir construire à nouveau. Ensemble.

Dans une société qui reconsidère fondamentalement ses standards familiaux, Pigeat revisite l’histoire romantique à l’eau de rose pour nous proposer une intrigue crédible. C’est touchant et bien écrit, la plume est efficace. C’est drôle quand il le faut et le style ne manque pas de piquant, même si les maladresses des débuts plombent parfois la lecture. Dès la première phrase d’À l’enseigne du cœur épris, on est emporté : « De toute façon, Stéphane n’avait jamais aimé l’appartement ». Le lecteur est pris en otage, obligé de poursuivre et de se laisser glisser dans cette sympathique aventure.

Retrouvez cette critique et bien d’autres sur le blog d’Audrey Chèvrefeuille par ici

Une réflexion sur “À l’enseigne du cœur épris : premier roman de Jean-François Pigeat

  • Christine DUJARDIN

    Peu à peu, on prend goût à ce style littéraire, où les dialogues sont retranscrits non pas de façon directe, mais comme en voix off, des dialogues « digérés » par l’un des personnages, donc vus avec le filtre de ce personnage.
    Cela confère une certaine élégance, et apporte un plus au lecteur qui subtilement, apprécie de l’intérieur la psychologie des personnages.
    La fin retient l’attention, appelle la réflexion, on sort du domaine de la bluette, d’ailleurs on n’y était pas vraiment, tant ce récit était somme toute celui d’un désaccord consommé, entre deux êtres, mais vraiment la fin mérite que l’on persévère dans la lecture des désaccords.
    C’est bien que cet auteur continue

    Répondre

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *