Star Trek Discovery – épisode 3 (suivi critique)
Avant d’être reprise avec une sacrée pertinence par JJ Abrams, Star Trek était déjà une institution avec plusieurs séries, plus d’une dizaine de films et pas mal d’équipes différentes qui se sont succédées. En 2017, le projet qui semblait être une arlésienne maudite s’est enfin concrétisé avec l’arrivée de Star Trek Discovery.
Cet article, qui sera mis à jour au fur et à mesure des sorties d’épisode, contiendra par la force des choses des spoilers sur la déroulement des événements narrés dans Star Trek Discovery.Star Trek Discovery se situe des années avant la série originale. On y retrouve une nouvelle équipe, vite confrontée à l’assaut d’une race ennemie, que l’on croyait disparue. Très vite, les choses s’accélèrent et la bataille doit s’enclencher, a la fois au cœur de l’équipe qui s’écharpe sur le choix de diplomatie à privilégier, mais également face à la flotte rivale … Et pour cause : ce sont des Klingons.
ÉPISODE 3 : CONTEXT IS FOR KINGS
L’épisode est prisonnier d’une certaine ambiguïté qui le rend d’autant plus intéressant à suivre. On est clairement dans la même lignée que les précédents, qu’il s’agisse de la mise en scène ou du fond : quelque chose de très beau, d’original, de très calme, c’est vraiment très reposant à regarder alors que les enjeux (la vie de Michael après sa faite, la haine de l’équipage pour elle, et cette nouvelle mission mystérieuse qu’on lui propose … ) sont importants et très lourds. Ce jeu d’équilibriste entre le fond grave et sans cesse en mouvement et cette forme paisible, pleine de longs plans, de travellings semble tenir d’une maîtrise bluffante. On ne savait pas Akiva Goldsman si bon réalisateur.
Mais l’épisode pose un problème de taille, qui devrait là absolument être réglé ensuite : il se construit encore comme une introduction à la série en tant que telle. Le début de série était déjà la fin de quelque chose puisque les actes de Michael avaient coûté la mort à tout l’équipage, il s’agir maintenant de montrer son évolution et les raisons de l’intégration dans l’équipage du Discovery malgré. Son nouveau statut de paria, et tout l’épisode est passé à nous expliquer les raisons de cette intégration. L’épisode fait franchement pilote de série, on aperçoit le vaisseau qui donne son nom à la série et qui sera le théâtre de tous ses événements, et le final la montre intégrée à cette équipage pour de nouvelles aventures … L’épisode est bourré de qualités formelles, prend le temps de décrire l’état d’esprit de Michael et de la nouvelle équipe et fait donc tout le travail qu’on attendait de lui, mais la contrainte se voit trop et on a l’impression que la série va enfin commencer au bout de 3 épisodes.
Drôle d’épisode, donc, prisonnier d’un statut hybride presque handicapant. La suite devra lancer une intrigue, et faire le choix d’un demi statu quo si elle veut perdurer. Jason Isaacs, nouvelle tête de file en Capitaine Lorca, est totalement parfait et devrait surtout être le catalyseur, formant le fil rouge de cette nouvelle intrigue. Conscient que Michael avait de bonnes raisons d’agir, il l’integre a l’équipage presque de force. Il a beaucoup de choses à cacher … à suivre !
EPISODES 1 ET 2
Ce début de série devait faire fort pour s’assurer une place durable dans les séries de SF, et avoir plus ou moins le champ libre dans le monde du space opéra sériel. C’est ce qu’elle fait : les deux épisodes qui composent ce premier jet remplissent étonnamment toutes les attentes et les promesses qui nous avaient été délivrées. Le revival par Abrams avait pavé le chemin de cette reprise, et d’un point de vue formel la série lui doit beaucoup : les couleurs sont vives, les lens flares aussi et on croit reconnaître quelque chose de plus Abramsien que Trekkien dans ce rythme étourdissant. Tout est mobile, les événements s’enchaînent à une sacrée cadence et pourtant l’action ne prend jamais le pas sur les relations remarquablement étoffées (surtout pour un premier regard) entre les personnages.
Cette première proposition a en effet quelque chose du tragique, d’infiniment intimiste qui n’est pas sans rappeler les passages doux-amers de morceaux de mythologie comme À La Recherche de Spock. Par ailleurs, il n’est pas interdit de faire le rapprochement entre le personnage de Burnham, humaine qui a tout perdu enfant et a été élevée à la vulgaire, et celui, mythique, de Spock, fils d’une humaine et d’un vulcain. On retrouve en effet cette problématique fascinante d’une lutte intellectuelle constante entre une volonté de froideur logique proprement vulcaine et une incontrôlable émotion provoquée par l’humanité du personnage : cette humanité, elle est au cœur de ce premier jet puisque c’est elle qui va découler aux événements épouvantables qui suivent. Le double épisode a en effet le culot de nous proposer de suivre le récit d’une équipe qui se voit détruite dans son intégralité, pour que l’histoire de Burnham commence enfin. Dès le début, le ton est donné, et ne privilégiera pas la légèreté.
Chose surprenante, Star Trek Discovery a pour une fois la bonne idée de ne pas s’appuyer sur une nostalgie mal placée dans son récit. À peine quelques notes rappelant la série originale dans le générique, et on est lancés dans une nouvelle histoire, avec de nouveaux personnages, sans artifices ni propositions faciles. Pourtant, la série est bien fidèle à l’œuvre qu’elle adapte, que ce soit comme déjà dit dans ses propositions visuelles, mais également dans son fond. Comme toujours, Star Trek est progressiste, montrant plus que personnages féminins forts à l’écran que toute œuvre du genre et leur offrant à chacune une back-story et une personnalité prononcée. Le pacifisme est là, la bataille entre les personnages est celle d’une idéologie qui n’est guerrière que par accident, que par la force des choses, et chaque coup tiré a des conséquences dramatiques.
Star Trek : Discovery n’essaie pas de ressembler à du Star Trek : elle en est, d’elle même : Fuller et Kurtzman proposent, comme attendu, un divertissement intelligent, impressionnant, remarquable.
AMD