Si Je Reste (If I Stay) : le chant du cygne
Poignant, bouleversant, mais un peu timoré : « Si Je Reste » vaut le détour. En salles mercredi!
« J’me baladais sur l’avenue, le cœur ouvert à l’inconnu », comme le chantait Joe Dassin. En effet, me promenant sur Hollywood Boulevard cet été, j’aperçois que s’organise une avant-première au Chinese Theater, LA grosse salle des avant-premières hollywoodiennes. Et j’y vois « If I stay » programmé, alors qu’une foule de fans attend Chloe Grace Moretz, la star du film. Il ne m’en faut pas moins pour m’intéresser à ce film. Verdict ? Ca valait le détour.
Dans cette espèce de Love Story revisité, Mia Hall (Chloe Grace Moretz) est une jeune fille timide, sans histoire, fan de Beethoven et violoncelliste émerite. C’est alors qu’arrive Adam (Jamie Blackley), qui la voit jouer, et PAF ! Ca fait des Ch… non, ça fait de l’amour, entre une jeune fille timorée et un garçon plus sûr de lui, l’une pro-musique classique ( élevée dans une famille de punk-rockeurs ), l’autre justement aussi punk-rockeur au succès grandissant. Malheureusement, un terrible accident de voiture remet tout en question, et Mia doit choisir entre rester et partir, en se remémorant ses souvenirs les plus marquants…
Dans ces films américains romantiques, souvent tirés de romans larmoyants, c’est toujours, peu ou prou, the same old story, a fight for love and glory, comme le chantait Sam dans « Casablanca ». « If I Stay » est adapté d’un livre de Gayle Forman qui, à l’image de son cousin à l’histoire terrible « The Fault in Our Stars » ( adapté aussi en film et sorti cet été ), a fait couler des larmes. En ce sens, le livre est très bien respecté, puisque plusieurs passages sont des vrais coups de boutoir contre vos tripes, et on avoue être ressorti assez bouleversé de la salle. If I Stay est un film qui va faire retourner bien des coeurs, tant par rapport à l’histoire d’amour entre les deux jeunes gens qu’à l’introspection personnelle de Mia Hall. Cependant, il est clair que « If I Stay » n’invente pas la poudre : une love story tout ce qu’il y a de plus classique, entre deux jeunes respectant l’adage selon lequel « les opposés s’attirent », apprennent à se connaître, s’aiment de plus en plus passionnément, pensent à vivre ensemble, connaissent les premières disputes, s’en remettent, s’aiment encore plus, et sont finalement confrontés à leurs choix de vie (littéralement, et dans tous les sens, dans ce film). Simple, mais efficace. Tout le film n’est qu’une projection fantasmatique de l’esprit de Mia, à la fois privilégiée par le fait de pouvoir considérer deux options, la vie ou la mort, parents ou pas parents, famille ou pas famille, petit ami ou pas petit ami, tout n’est que tergiversation. Ironiquement tragique est le fait que même quand sa vie ne tient qu’à un fil, Mia doit faire un choix. Blanc, lisse, impeccable ( peut-être trop ), le film, ne tergiverse pas, il avance, neutre, ponctué par quelques séquences musicales agréables à l’oreille, notamment l’ultime musique du film, en présence de tous les acteurs, point d’orgue à l’émotion ambiante que le reste du film s’est chargé d’imprégner. Le seul passage franchement regrettable est la présence de l’infirmière aux faux airs de Dick Halloran dans « Shining » : comme si elle avait le Don, elle susurre et prodigue ses ordres de bataille à Mia, s’improvisant guide, alors que Mia s’est déjà rendue compte par soi-même de l’importance du moment, et n’a donc pas besoin de quelqu’un pour lui faire se rendre compte de la situation… Clairement un personnage dont on aurait pu se passer, le surnaturel présent dans ce film n’ayant pas vraiment besoin d’un coup de pouce.
Chloe Grace Moretz trouve ici un rôle totalement à sa convenance, mais aussi à son statut actuel d’actrice: une jeune fille pleine de potentiel, mais encore un schouia timorée dans son rôle tragique. Mais ce n’est qu’un détail mineur, et elle fait ainsi un personnage principal très convaincant. Elle prouve ainsi qu’elle a un avenir radieux, dans quelque rôle de quelque registre que ce soit. On ne peut pas en dire autant de Jamie Blackley, assez fade en boyfriend fou amoureux, pour la simple et bonne raison qu’on dirait qu’il ne croit pas à ce qu’il dit. Un bellâtre, en quelque sorte, avec une guitare en guise de harpe. Mais c’est aussi ce genre de personnage typique de ces romans/films que nous ne qualifierons pas de « à l’eau de rose », car ce serait réducteur de les désigner ainsi sans s’être vraiment plongé dedans, mais plutôt mélodramatiques. On avoue un coup de coeur pour les parents Mireille Enos et Joshua Leonard, les parents de rêve, et le grand-père Stacy Keach, personnages bien traités dans le sens où ils ne sont ni clichés, ni artificiels dans l’histoire.
Beau esthétiquement, joliement mis en scène, bien interprété, If I Stay aurait toutefois peut-être mérité, pour se détacher d’une image de love story parfaitement lisse, une meilleure exploration de la question introspective, allonger les passages avec Mia dans l’hôpital et raccourcir un brin les flashbacks. Avec un peu plus d’exigence et de rigueur, « If I Stay » aurait pu passer du stade de bon à très bon film. Mais il nous a convaincu, c’est là le principal. Un film déconseillé de visionner aux côtés de votre petit(e) ami(e), et pour cause, mais qui s’affranchit du cucul pour faire place à une histoire poignante et bouleversante.