Rencontre avec l’équipe du film The Riot Club
A l’occasion de la sortie en DVD/Blu-ray (5 mai) du film réalisé par la danoise Lone Scherfig, The Riot Club, voici un aperçu de la rencontre organisée avec l’équipe du film : la réalisatrice et les acteurs Max Irons et Sam Claflin lors de leur passage à Paris, le 2 décembre 2014. (Spoilers)
Rencontre avec Max Irons
Emmanuelle (@regardezmoica) : Comment êtes-vous arrivé à faire ce projet ?
Max Irons : On m’a envoyé le scénario. La première fois que je l’ai lu, je me suis dit que je n’avais pas envie de faire ce film parce que je trouvais l’histoire vraiment déplaisante. La valeur qu’on accordait aux gens de ces clubs les rendait séduisants. Puis j’ai réalisé qu’il s’agissait plus d’une métaphore en ce qui concerne la violence et le débat sur les riches et les pauvres. Beaucoup de personnes m’ont dit qu’elles sont ressorties du film insatisfaites et presque malheureuses. Il n’y a pas de « happy ending » et quand on y pense, dans la vie, il existe deux sortes de justice ; si vous êtes aisé et privilégié, souvent vous vous en sortez bien peu importe ce que vous faites.
Emmanuelle : Certaines personnes du gouvernement anglais ont fait partie de ces clubs…
David Cameron, George Osborne, Boris Johnson, tous faisaient partie du Bullingdon Club d’Oxford. Ce club a inspiré le film, il est connu pour la destruction de restaurants. Ils ont brûlé 50 pounds devant un sans abri, détruit une Aston Martin puis ils sont partis en laissant un chèque. Ces choses se sont réellement produites et par ceux qui dirigent notre pays. Je pense qu’il est important d’en parler. Quand on leur pose la question à propos de leurs actes lorsqu’ils étaient dans le club, ils ne répondent pas ou alors « nous étions jeunes ». J’ai envie de dire, vous n’étiez pas si jeunes, vous aviez 22 ans, vous étiez bien éduqués et privilégiés… Nous avons eu des émeutes à Londres, il y a 3 ou 4 ans. Ces jeunes adolescents de 16 ans qui ont reçu peu d’éducation, qui n’ont pas d’argent ou peu d’opportunités dans la vie, ont cassé des vitrines etc… Le gouvernement leur a donné 3 ans de prison. Alors qu’ils avaient fait exactement la même chose, mais pas à 16 ans. A 22 ans. Pas quand ils étaient pauvres. Riches. Pas quand ils n’avaient aucune opportunité. Plein d’opportunités. Est-ce normal ? Je ne le crois pas.
Mélanie (@SmallThingsFr) : Votre personnage, Miles, est celui auquel on pourrait le plus s’identifier. On ressent de l’empathie pour lui. Cependant, selon vous, est-il si innocent et défait de toute responsabilité ?
Non. Le problème de Miles c’est qu’au fond, c’est quelqu’un de bien. Il est intelligent mais il n’agit pas. Il sait quelles sont les bonnes choses à faire mais il ne les fait pas. C’est une autre forme de péché mais cela reste quoiqu’il arrive, un péché. Donc il est coupable. Rappelez-vous, lorsque Lauren (Holliday Grainger) arrive lors de la scène du dîner et que pendant le conflit, Miles lui répond « C’est à toi de voir », vraiment ?! Il savait très bien ce qu’il aurait du dire ou faire au lieu de prononcer cette phrase atroce. Il est coupable, malheureusement.
Mélanie : La scène du dîner est très intense. Comment était l’ambiance sur le tournage ? Était-ce compliqué à tourner ?
Non vraiment pas parce que nous avions eu des répétitions, nous connaissions bien nos dialogues donc nous savions où nous nous dirigions. Les acteurs étaient tous tellement bons, nous étions libres et nous pouvions improvisés. Donc l’atmosphère était ce qu’elle devait être. Nous avons tourné chronologiquement et une telle scène prend toute la journée… lorsque Alistair (Sam Claflin) se tient debout sur la table et crie « Je hais les pauvres », ce jour-là était très difficile puisque vous êtes assis là à écouter ces mots encore et encore et tout le monde est énervé. Donc au moment où on arrive à la destruction du restaurant, nous sommes tous dans une humour détestable.
Mickaël (@TheRealMicky147) : Si vous pouviez choisir un seul mot pour décrire le film ?
Répulsif. Ce qui n’est pas une mauvaise chose. Au début, on apprécie ces jeunes gens, ou disons plutôt qu’on est intéressé par eux. Puis plus on les regarde, plus on se sent proche d’eux. Putin, en fait non ! (rires)
Rencontre avec Lone Scherfig
Mickaël : Était-ce compliqué de diriger tous ces acteurs ?
Lone Scherfig : C’était la meilleure partie du tournage. Ils sont tous très différents, ils viennent de classes sociales, de nationalité, d’éducation différentes. Ils étaient extrêmement gentils entre eux, humbles et travailleurs. Quand on lit un scénario, on sait qui doit parler et quand comme au théâtre. Mais cela ne se ressent pas dans le film grâce à leur talent d’improvisation. Ils sont tous devenus amis. Je n’ai pas pu leur dire au revoir lorsque nous avons terminé de tourner le film donc mon cadeau était de les inviter au restaurant quelques mois après, leur offrir une « réunion ». Sauf qu’ils s’étaient déjà tous revus depuis. A la fin du tournage, ils sont restés durant 3 jours ensemble, à boire j’imagine. (rires)
Mélanie : Vous avez vu la pièce de théâtre Posh écrite par Laura Wade (scénariste du film), qu’en avez-vous pensé ? Qu’est-ce qui vous a donné envie d’en faire un film ?
Je l’ai vu 2 fois. La première fois, c’est comme si beaucoup de choses m’avait échappé parce que c’était une pièce très « British » qui se déroulait dans un théâtre très chic à Sloane Square, un quartier très élégant. La deuxième fois, c’était dans le West End de Londres, ce fut plus simple à comprendre pour moi et le public était plus jeune et compréhensif. Je me suis dit que quelqu’un devrait en faire un film et que ce quelqu’un devrait être moi, si j’en ai l’opportunité. Et Laura Wade a dit aux producteurs que j’étais la première sur sa liste pour diriger le film donc c’était parfait. J’ai adoré travailler avec elle, voir la transformation de sa pièce en scénario, c’est un processus important. On sent dans la deuxième partie du film que cela provient d’une pièce mais le début est très différent.
Emmanuelle : Quelle était la réception du film en Angleterre ?
Au moment de la sortie du film, j’étais à l’étranger. Je ne recevais pas la presse anglaise et depuis quelques années j’évite les critiques parce que je suis trop sensible. Ce n’est pas parce que les critiques ne m’importent pas mais plutôt parce qu’elles m’importent trop. Mais concernant le film, il y eu beaucoup de débats, ce qui est génial. Et beaucoup d’attention pour cette nouvelle génération d’acteurs.
Rencontre avec Sam Claflin
Mélanie : Votre personnage, Alistair, évolue beaucoup tout au long du film. Il s’affirme et devient de plus en plus sombre. Quel était le plus intéressant pour vous à jouer un tel rôle ?
Sam Claflin : Je pense que le plus intéressant était d’avoir à le comprendre. Je devais interpréter un personnage dont le monde ne m’était pas familier : le type de personne que sont ses parents, ceux avec qui ils traînent, l’école où il a été etc… tout ça m’a aidé à comprendre pourquoi il était aussi coléreux, frustré. Lorsque j’ai lu le premier jet du scénario, la séquence d’ouverture qui l’introduit n’était pas là. On le voyait juste comme quelqu’un étant constamment énervé. Et j’ai dit « Non, il faut avoir au moins un aperçu, même minime, de ce qu’est sa vie » avec ses parents qui obtiennent ce qu’ils veulent. Et on a la directe impression avec cette scène précisément que son frère, qui est l’ex Président du Riot Club, lui a fait de l’ombre toute sa vie. Il a toujours été jaloux de lui et n’a pas été aimé autant par ses parents. Le Riot Club était pour lui sa première chance d’être entendu, de se sentir voulu.
Mélanie : Pendant la scène du dîner, il prend le contrôle jusqu’à un point de non retour. Cependant, il s’en sort bien à la fin. A quel point pensez-vous que cette dernière scène reflète une réalité glaçante ?
C’est effectivement une dure réalité. La dure réalité de la vie. Plus vous êtes riche, plus vous pouvez vous payer un bon avocat. Plus votre avocat est bon, mieux vous vous en sortez. Regardez les nouvelles aujourd’hui, cet athlète sud-africain qui a tiré sur sa petite amie s’en tire plutôt bien. C’est quelque chose de terrifiant. Pour en revenir au film, les parents d’Alistair sont des gens influents et riches qui peuvent demander des faveurs au juge. Même s’il n’est pas nécessairement question d’argent, les gens aisés ont ce pouvoir sur les autres. Je trouve ça dégoûtant. Lors de la scène du dîner, le propriétaire du restaurant dit aux jeunes du Riot Club qu’ils « ne sont pas mieux que ces jeunes qui cassent des vitrines ». Ce qui est vrai. S’ils faisaient partie d’une classe sociale inférieure, ils iraient probablement en prison. Le fait est qu’ils ont de l’argent et qu’ils l’utilisent pour obtenir ce qu’ils veulent. C’est terrible mais cela donne un film intéressant… je pense.
Mickaël : Pendant la scène du dîner, c’était comment de tout casser ?
Vous voyez la scène de la destruction du magasin dans Zombieland ? C’est exactement ça, c’est aussi marrant que ça en a l’air (rires). Evidemment elle était chorégraphiée, à tel moment ils voulaient capturer telle ou telle action mais globalement ils nous disaient « Enlever la tapisserie des murs ». Etre dans cette pièce durant 2 semaines et demi, c’était dur et fatiguant.
Mélanie : Chacun des membres du Riot Club a sa propre personnalité. Selon vous, lequel de ces personnages, à part le vôtre, est le plus sombre ?
Bonne question… je dirais Hugo (Sam Reid) parce qu’il connait la vie du Club et le Club est sa vie. Il ne peut survivre sans lui, ainsi cette obsession, quelque chose d’aussi noir, n’est jamais une bonne chose pour personne. La noirceur en lui est subtile, c’est notamment pour cela que j’aurais aimé jouer un tel rôle. Il y a un sens caché à tout ce qu’il fait, c’est un grand observateur. Alistair veut être entendu mais a l’impression qu’il ne peut pas. Tandis qu’Hugo ne veut pas être entendu, il aime rester dans l’ombre et apprécie regarder les gens. Ce qui est flippant. (rires)
Emmanuelle : C’est une année importante pour vous, Hunger Games : La Révolte, The Riot Club, Love, Rosie. Comment avez-vous appréhendé tous ces films ?
Je me suis marié également dans tout ça. J’ai fini le tournage de Love, Rosie un vendredi et commencé le tournage de The Riot Club le dimanche. Une semaine avant la fin de ce tournage, nous avons eu un weekend de 2 jours où je me suis marié. Retour au travail le lundi et on a fini de filmer. Puis j’ai eu 2 semaines de repos avant d’attaquer le tournage de Hunger Games. Donc ce fut une période très chargée, même en ce moment avec toute la promo. Mon cerveau est éreinté, j’ignore de quel film nous sommes en train de parler (rires). C’est très désorientant mais tout aussi incroyable à savoir que je serai dans 3 films. Beaucoup d’acteurs ne font pas 3 films en l’espace de 3 mois dans toute leur carrière, notamment des films aussi différents. Je me sens très chanceux.