Ex Machina – Des dieux et des machines
En salles depuis un mois, toujours à l’affiche dans certains cinémas, pourquoi ne pas jeter un œil sur le thriller d’anticipation d’Alex Garland ?
Dans
Ex Machina, le créateur de BLUEBOOK, le Google du film, fait gagner à l’un de ses employés, Caleb jeune programmeur de talent, la possibilité de passer une semaine en sa compagnie et de participer à la plus grande expérience de sa vie, effectuer le test de Turing sur la dernière intelligence artificielle créée par le génie.
Tiens, encore un film sur le thème du robot humanoïde et les questions récurrentes, les robots ont-ils une conscience ? Si oui, comment peut-on le prouver ? Si le Chappie de Blomkamp détonnait par son vocabulaire de la rue et son innocence enfantine, l’Ava de Garland s’éloigne bien de cette naïveté et joue les femmes fatales.
Ava (Alicia Vikander), telle Eve, représente l’intelligence artificielle humanoïde dont tous les geeks rêvent. La tentatrice et la prochaine étape de l’évolution arrivera bien assez tôt sans qu’on puisse y échapper. Son intelligence dépasse l’entendement et on dit souvent que se montrer intelligent c’est savoir s’adapter, et elle prouve par bien des moyens qu’elle réussit ce test haut la main. Conçue par un génie de l’ingénierie mécanique (Oscar Isaac), Ava était faite pour être la femme parfaite. Vikander, ancienne ballerine, mimique superbement la démarche mécanique de l’androïde tout en lui insufflant une aura éthérée.
La relation entre Ava et Caleb (Domhnall Gleeson) prend une tournure assez prévisible sentie et voulue. De fait, ce sont leurs entretiens qui posent le cœur du problème et laissent paraître un malaise, en sachant qu’elle est une machine, peut-elle être quand même perçue comme une humaine et surtout où se situe la ligne de la moralité/normalité concernant l’attraction que Caleb peut éprouver ? Ex Machina philosophe sur l’essence même de l’être humain dans un dialogue qui inclut le spectateur, et ne sort pas des sentiers battus dans son concept. La fin justifie les moyens, et c’est au spectateur de réfléchir aux réponses possibles en sachant pertinemment que si réponse il y a, elle n’est pas universelle. En revanche, ce spectateur intervient tellement dans cette réflexion, qu’on n’arrive pas à percevoir le parti du réalisateur parfois.
Ce n’est pas la première incursion dans le domaine de l’anticipation/science-fiction pour Alex Garland puisqu’il officiait en tant que scénariste sur Sunshine, Dredd, ou 28 jours plus tard mais aussi dans Never Let Me Go. D’ailleurs, dans ce dernier, Domhnall Gleeson jouait un rôle secondaire, mais toujours avec cette once d’espoir qu’il ne lâchait jamais. Là réside la beauté de l’être humain, accroché à une croyance, il va tenter de tout faire pour y croire, quitte à distordre la réalité pour qu’elle corresponde. Caleb, il le dit lui-même, est un type « bien », et dans la nature du quidam « bien », il faut aider les autres et contrer le méchant…
Ce qui distingue le film des autres, ce sont principalement sa mise en scène et ses personnages. La tension entre le trio fait monter les doutes de chacun, à qui faire confiance ? Dans l’atmosphère lourde d’un thriller, les personnages se plient aux lois de la manipulation. De toute façon, qu’attendre d’autre d’un huis-clos ? Cette isolation avec le reste du monde retire toutefois une part de réflexion quant à l’intégration des robots. Visuellement dans son design, Ava ressemble énormément à la Eva du film éponyme (sorti en 2011 avec Daniel Brühl), en version adulte, c’est étrange. Contemplatif jusqu’au bout, Ex Machina n’a pas d’explosion ou d’effets spéciaux phénoménaux. Non, tout repose dans le détail.
(P.S. : Sinon, trop de références bibliques tuent la religion.)