EVEREST : plus haut, moins fort
Histoire vraie, catastrophe humaine, Everest raconte tout ça à la fois et devrait être bouleversant, mais…
2 expéditions distinctes vers le sommet de l’Everest sont confrontées à l’une des plus violentes tempêtes de neige de l’histoire. Luttant contre l’extrême sévérité des éléments, le courage des grimpeurs est mis à l’épreuve par des obstacles toujours plus difficiles à surmonter alors que leur rêve de toute une vie se transforme en un combat acharné pour leur salut.
A la fin du film, en voyant le destin des grimpeurs en photo, on comprend que le long-métrage se calque sur les faits. Certains plans sont repris à l’identique des photos. On peut comprendre alors la volonté de proposer un film ancré dans un réalisme fort et loin des désirs trop clinquants des blockbusters type films catastrophes. Ici, point de grande scène de sauvetage, de scènes de destruction, d’envolées musicales, Everest reste sobre de bout en bout. Un peu trop peut-être. Les personnages ne sont pas des stéréotypes qui forcent l’identification et la caractérisation, la réalisation n’est pas grandiloquente, le scénario ne fourmille pas de rebondissements, en somme, Everest rappelle le cinéma d’avant, celui des Survivants de 1993. Les stars (Jason Clarke, Sam Worthington, Jake Gyllenhaal, Robin Wright, Keira Knightley) ne tirent pas la couverture vers eux, on oublie d’ailleurs quasiment que certains sont dans le film. La raison ? Derrière leur combinaison, il est difficile de savoir qui est qui. Ce souci majeur rend le film peu personnifié et tend alors à dénaturer toute la dramaturgie. Les pertes humaines paraissent n’avoir aucune importance. Le cinéma nous a habitués à appuyer chaque scène morbide par une identification forte au personnage cible car on le connaît physiquement, on le voit en peine, on connait son histoire. Dans Everest, la confusion formelle pousse à une confusion tout court. Bête contrainte, les personnages sous masque, lunette et doudounes rendent le film… moins humain. A partir de ce ressenti, il est difficile de trouver en Everest une vraie expérience humaine.
A chaque catastrophe, le film ne s’y attarde pas, on préférera le ressenti de l’instant plutôt que la psychologie. Des personnages un temps soit peu attachants disparaissent et on continue. Si on comprend assez vite que certains personnages ont un passif et un cercle familial qui les rendent plus « humains », on comprend que ces à-côtés sont purement des artifices pour renforcer la dramaturgie déjà bien handicapée. Sam Worthington n’a aucune profondeur, on sait que rien ne lui arrivera. D’ailleurs, on sait qu’il ne fera pas grand-chose du film. C’est un peu la même chose pour Gyllenhaal qui reste un second rôle peu travaillé.
Everest est prisonnier de sa sobriété. Nous, public, sommes aussi prisonnier de notre vision ultra Hollywoodienne des films catastrophes. Rien n’est de trop dans Everest, il y a simplement un manque de quelque chose, d’un GRAND CINEMA prenant, grandiose, qui prend aux tripes. Everest est juste un film très honnête, qui tend vers un réalisme bluffant. La seule astuce formelle est celle des moments de répit sonore quand on passe d’une scène incroyablement bruyante dans les montagnes à la scène de salon de Kiera Knightley attendant un coup de fil. La 3D immerge peu, la faute à une mise en scène qui semble avoir le vertige, elle prend de la hauteur pendant 30 minutes pour ensuite rester très ancrées dans la neige. On peut le voir dans une scène d’hélicoptère assez mal foutue et qui aurait pu être une scène dantesque. A trop vouloir dépecer les normes Hollywoodiennes, Baltasar Kormákur (2 Guns, Contrebande) rend une copie un poil fade de cette aventure humaine. Peut-être sommes-nous de moins en moins réceptifs à ce genre de cinéma qui se veut dénué de tout artifice grossier. Dans ce cas, Everest reste une grosse bouffée d’air frais dans le cinéma d’action et d’aventure de notre époque. 2 heures d’aventures sans temps mort qui mise beaucoup sur l’effort que sur le réconfort d’un divertissement qui sent le réchauffé. Si on reproche pas mal de choses au film, Everest reste une aventure sobre, parfaitement maîtrisée et qui ne souhaite pas révolutionner le cinéma. Everest veut simplement rendre compte d’un fait réel impensable.
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