Doctor Who 8×08 : Mummy on the Orient-Express
Mélange des genres cette semaine ! La série nous offre un épisode mélangeant l’aspect flippant « moffatien » avec un décor plus classique, celui de l’Orient-Express. Pour donner une émulsion aussi pure que le vortex temporel.
ATTENTION ! NOUS SOMMES ICI CONTRAINTS A UN SPOILER TRANSITIONNEL :
Dans le précédent épisode, Clara, profondément énervée par l’attitude qu’elle trouvait lâche du Docteur, avait décidé d‘arrêter les frais. Qui plus est, elle est amoureuse, et on ne peut pas dire que son petit ami apprécie ces escapades… Cet épisode pourrait donc apparaître comme son dernier…
Et en effet, l’épisode est « in the mood for » le départ de Clara : elle présente ce trip en Orient-Express comme son dernier avec le Docteur, sur un air de « Va, je ne te hais point », pour citer Corneille. Mais sur ce train de l’espace (oui, parce qu’on est dans une série de SF, donc Orient-Express de l’espace, faut pas déconner), il se passe des choses étranges : une mystérieuse momie apparaît à certaines personnes et les tue immanquablement en 66 secondes, sans qu’on puisse rien y faire…
Dans cet épisode, il flotte un parfum de mythe Agatha Christie/Hercule Poirot, mais aussi une odeur de train de retour à la vie normale et réelle pour Clara… C’est peut-être ce qui nous empêche de donner 5/5 à l’épisode : si dans l’épisode précédent Clara avait une grande importance, il n’en est pas de même pour cet épisode. Rapidement dépassée par les évènements, Clara est reléguée au second plan, celui de la gestion du stress post-traumatique, à la fois pour la fille d’une des victimes, et à la fois pour elle, toujours marquée par ce qui s’est passé sur la Lune, et en pleine crise existentielle sur sa participation aux escapades en TARDIS. Toutefois, ce choix d’écriture du personnage apparaît justifié pour plusieurs raisons : d’une part, faire souffler Jenna Coleman (quand même), d’autre part, traverser ce passage obligé de la question du rôle du compagnon du Docteur, remise en cause avec l’arrivée de Capaldi dans le rôle principal, et, enfin, au niveau de l’épisode, pour ne pas laisser un espèce de pseudo- romantisme pathétique s’installer. Par ailleurs, la série joue de ces circonstances de crise existentielle de Clara à la fin de l’épisode : c’est en effet par les mêmes moyens que le Docteur comprend l’affaire de la momie. En plus, le Docteur voit sa compagnonne remplacée temporairement par l’énigmatique mais non moins attachant mécano Perkins (Frank Skinner en guest star, connu au Royaume-Uni pour ses émissions de radio) aux côtés du Docteur. Si ca c’est pas de la prévision… Comme d’habitude dans Doctor Who, rien n’est laissé au hasard…
En parallèle à cela, l’épisode nous offre une virée sympathique à bord du plus célèbre des trains… de l’espace. Après l’excellent épisode sur Agatha Christie dans la saison 4, il fallait, pour respecter et rendre hommage à l’immense patrimoine britannique, faire un sort à l’Orient-Express. Et c’est réussi ! Un point qu’il convient d’évoquer pour cet épisode-ci : le décor. En effet, Doctor Who est une série BELLE. Depuis son retour en 2005 jusqu’à aujourd’hui, soit près de 10 ans, la série n’a eu de cesse de se moderniser, conservant son côté kitsch totalement assumé, mais s’adaptant complètement aux nouvelles moeurs esthétiques de son temps. Cela s’est vu avec le TARDIS, qui a connu plusieurs changements selon les Docteurs. Mais au niveau des épisodes, la série se distingue par son originalité décorative, ancrant ses intrigues dans des environnements qui, bien que science-fictionnels, apparaissent plus vrais que vrais. Et quand il convient d’évoquer des endroits un peu plus célèbres (comme l’époque shakespearienne, l’époque romaine, ou encore l’Orient-Express), la série ne manque jamais de rendre hommage à son patrimoine cinématographico-culturel… avant de le bouleverser par du surnaturel !
L’époque Moffat/Capaldi est une époque visuellement splendide, et dans cet épisode, le jeu de lumière et d’obscurité s’associe bien avec l’atmosphère tendue créée par la momie. Surtout, la série veille à ne pas tomber dans le trop sombre oculaire pour créer du sombre métaphorique, celui que des personnages comme la momie ici, sinistre personnage dans le lumineux train. C’était déjà le cas avec l’épisode The Empty Child (écrit par Moffat), auquel, en disant « Are you my Mommy ? », Peter Capaldi fait référence dans un face à face avec la momie à couper le souffle, littéralement : le petit garçon masqué amenait l’obscurité sur son passage, face à la lumière (du tournevis sonique) du Docteur. Ceci posé, bienvenue à bord de l’Orient-Express, où il fallait évidemment que quelque chose ne tourne pas rond, et où est mise en scène dans toute sa viscéralité la plus grande peur humaine : la mort ! Bien mené, surprenant et intrigant, l’épisode aurait toutefois mérité 3-4 minutes de plus au montage, le final étant bouclé un peu trop en hâte. Léger détail qui ne nous empêche pas d’apprécier le voyage.
Si il y a des épisodes dont il faudra se souvenir à l’heure du départ de Peter Capaldi, celui là arrive dans les premiers. Fort heureusement, un tel départ est quelque chose qu’on a le temps de voir venir. Car Peter Capaldi, dans son style très Dr House, livre une de ses meilleures performances, tout en justesse de ton, oscillant parfaitement entre le côté extraterrestre arrogant et le côté humain attachant, celui d’un personnage seul et profondément marqué. Comme le dit l’épisode, il est celui qui malgré son nom doit faire des choix impossibles, des choix parfois terribles qui font toute l’ambiguïté du personnage : quelqu’un qu’on adore et qu’on veut adorer, mais qui, malheureusement et malgré tout, a des casseroles aux pieds et des cadavres sur les bras. « The Impossible Man » avec « The Impossible Girl », ca sonne bien, non ? Eccleston oscillait théâtralement entre masque triste et masque joyeux, Tennant l’avait splendidement compris dans ses tirades toutes aussi théâtrales, Smith le faisait contraster avec sa folie ; Capaldi le pousse à l’extrême, en prenant un peu de chacun de ses prédécesseurs. A l’instar de ces Tennant ou Smith, il n’a pas eu besoin de beaucoup de temps pour assimiler son rôle et pour lui insuffler cette touche si caractéristique à son genre d’actorat. Si on a mentionné le peu d’importance qu’elle a dans cet épisode, Jenna Coleman se rattrape toutefois par son charisme et sa faculté à jouer sur la corde sensible. Enfin, on l’a évoqué avec Frank Skinner : cet épisode se dote d’acteurs dans un second rôle très talentueux. Il convient d’évoquer la chanteuse Foxes et sa reprise de Don’t Stop Me Now de Queen, le sérieux David Bamber dans le rôle du Capitaine Quell ainsi que le touchant Christopher Villiers dans le rôle du Professeur Moorhouse. Des noms peu ronflants sur le papier, mais l’avantage des séries, c’est que c’est ici que leurs qualités seront le mieux mises en valeur !
Encore un épisode de très bonne facture, donc, pour Doctor Who. On en veut encore des milliers et des milliers comme ca ! A la semaine prochaine pour…
https://www.youtube.com/watch?v=a9nIXbK_25c
Points positifs :
– Du réchauffé mais une bonne ambiance.
– Gus.
Points négatifs :
– Pas d’épisode avec le Docteur seul, c’est vrai qu’il est dit que du temps a passé, mais c’est vraiment une facilité scénaristique que Clara soit là par rapport au précédent épisode.
– Des personnages-décors.
– Le Doc VS la momie.
– La réconciliation entre le Doc et Clara bâclée : « je suis accro donc je pardonne ».