Border : Un ratage presque complet
Border est un film suédois réalisé par Ali Abbasi et est l’adaptation de la nouvelle Gräns de John Ajvide Linqvist.
Le film raconte la vie d’une femme, Tina (jouée par Eva Melander), douanière dans un port, caractérisée par sa laideur et par un odorat surdéveloppé qui lui permet de repérer des objets sensibles chez les différents voyageurs. L’apparition d’un voyageur transportant des vidéos pédopornographiques et d’un voyageur ayant un aspect et des capacités étrangement similaires à Tina vont chambouler son quotidien.Peu à peu, le spectateur comprend que Border cherche à transmettre tout un folklore nordique et des idéaux dans l’ère du temps, une réflexion sur l’écologie, l’intolérance et la différence, notamment à travers ses personnages. Ainsi, c’est à travers le personnage de Tina que tout le film se lance dans une dialectique pseudo-engagée qui s’avère de plus en plus mauvaise. Le film a cependant un fond assez correct, qui fait malheureusement face à une forme qui gâche une énorme partie du film.
Le film se caractérise donc par un fond assez sympathique, essaye de transmettre des idées et des valeurs de vivre-ensemble,… Sauf que ce fond est en réalité trop simpliste. Face à des œuvres de plus en plus innovantes et complexes, Border est un intrus chez qui l’argumentaire est basique et qui tente de traiter de plein de sujets complexes sans jamais réellement les approfondir. Pire que ça, le film se contredit au cours de son avancée, mettant en lumière une prise de position fragile et une argumentation non-terminée, une sorte de politiquement correct inutile et inintéressant qui tente parfois une antithèse à ses idées originales pour offrir un contrepoint tout aussi binaire que le reste. La seule partie qui surpasse un peu le vu et revu est l’apparition d’une quête identitaire, thème qui ne peut que se renouveler puisque ladite quête est propre à chaque individu.
De plus, le film essaye de jouer sur tous les tableaux et n’arrive à en maîtriser aucun. Contemplatif, romantique, fantastique ou policier, autant de styles différents que le film essaye d’aborder, comme pour tenter de garder le spectateur éveillé par une variation de rythme assez moyenne, d’autant que le côté contemplatif et romantique est tout simplement gâcher par l’esthétique du film.
En effet, si Border n’innove en aucun moment au niveau photographique et se contente simplement de filmer l’environnement tel quel, le choix de faire des personnages aussi laids et répugnants piétine toute tentative de créer un minimum de beauté. Les personnages de Tina et Vore nous tirent vers une intimité nauséabonde que l’on ne veut pas voir et qui arrache des mimiques de dégoût au spectateur, qui rit parfois nerveusement pour combler un malaise ambiant qui ne se justifie à aucun moment. Toute notion d’un amour beau et pur est tout bonnement abandonnée au profit d’une bestialité horrible qui débouche sur des scènes qu’on aurait souhaité ne jamais voir de notre vie. De la même manière, l’introduction de ces personnages dans un cadre naturel et verdoyant au calme reposant finit par gâcher cette atmosphère pour arriver au même dégoût qui caractérise la totalité du film. Ni amour ni beauté dans ce film qui disait promettre une histoire aux allures de conte.
Bien évidemment, le mal ne s’arrête pas là. En choisissant d’introduire une enquête policière prenant racine dans un milieu immoral et repoussant, à l’image du reste du film, on ne fait que pousser le malaise un peu plus loin. Cela reste tout de même la partie la plus intéressante, que l’on voit au final très peu, et qui a le mérite d’utiliser les capacités hors-normes de Tina et de laisser tranquille le spectateur avec toute la partie dite romantique. L’enquête policière apparaît presque comme un soulagement, ce qui est un comble étant donné qu’elle traite de pédopornographie, mais qui a le mérite de ne pas nous infliger le rapprochement de Tina et Vore.
Border est donc un film extrêmement mal géré, peut-être cherchant à être trop respectueux de la nouvelle d’origine. On ne devrait pas laisser la possibilité de créer de telles horreurs, tant le fond plat et vide se fait annihiler par une forme qui, dans ses grands moments, est tout au mieux banale, sinon exécrable.
Terence