Billions, de l’action mais pas qu’en bourse
Billions, drama judiciaire dans le milieu financier et des fonds de pension reprenait l’antenne Dimanche 19 Février sur Showtime pour une seconde saison.
La première saison de la série crée par Brian Koppelman, David Levien et Andrew Ross Sorkin (pas de liens avec Aaron Sorkin créateur de « West Wing ») était pleine de confrontations très personnelles, de combats d’égos plutôt que d’explication de techniques boursières et juridiques, on restait un peu sur notre faim. On espérait pouvoir ajouter une licence de finance à notre CV, mais on en ressortait avec un master en rhétorique.
C’est dans ce contexte de forte tension entre les deux personnages principaux que démarrait cette seconde saison, le directeur de Axe Capital : Bobby « Axe » Axelrod (interprété par Damian Lewis, Nic Brody dans Homeland) relance la lutte contre le procureur Chuck Rhoades (Paul Giamiatti) qui n’a plus rien à perdre. Que vaut ce retour ?
Déjà un peu désapointés l’année dernière, la bande annonce nous annonçait un véritable combat de coqs, et bien on n’a pas été déçus (enfin si du coup). Dès le début, on comprend que cette lutte pourrait s’arrêter si ces deux têtes de mules le voulaient. Mais non, leur désir d’écraser l’autre est trop fort. Alors démarrent des procédures judiciaires, des jeux d’avocats. C’est là que la série pêche. Ce qui était promis par Billions et ce qu’on avait un peu aperçu lors de la première saison c’était une série sur le monde de la finance avec en parallèle une histoire judiciaire entre deux personnages intéressants que sont Axe et Rhoades.
On avait apprécié la qualité des personnages : Wendy (coach chez Axe Capital et femme de Chuck) est ambiguë et son rôle est intéressant, Lara (femme de Axe) incarne bien ce rôle de femme forte bénéficiant de l’influence de son mari, quant à Axe il est l’exact opposé de Rhoades, c’est un homme en apparence bon qui sert une cause l’étant moins, et le procureur est un personnage en apparence mauvais servant une cause juste. Chacun avec leurs amis, alliés : Bryan Connerty, Wags, Kate Sacher… Ces personnages ne sont pas manichéens (gentils ou méchants), mais ambiguës, ce qui fait la qualité de la série.
Ce qu’on peut reprocher à ce début de saison est son manque d’analyse et de vulgarisation du monde de la finance, qui ne sert que de toile de fond à la lutte entre Axe et Chuck, on a l’impression que si cette série avait lieu dans le monde de la pétanque ce serait pareil. En effet, quand on parle de finance (ce qui n’arrive plus assez souvent dans le show) il est utilisé du vocabulaire très compliqué, prononcé très vite, et ça n’a au final pas d’intérêt. De plus, étant empêtré dans des problèmes personnels et professionnels, le personnage de Chuck perd de son intérêt, et les scènes où il est présent sont souvent lentes et ennuyantes.
Et petite anecdote, on entend Chuck appeler son assistante lors du premier épisode : « Donna ! », référence à peine cachée à West Wing (A la maison blanche), série qui laissait de côté les affaires personnelles des personnages pour se concentrer sur leurs actions et leur milieu (la politique), mais désolé Billions, n’est pas West Wing qui veut !
Mais il y a du bon quand même ?
Oui, tout n’est pas à jeter. Premièrement, le second épisode relève un peu le premier qui avait servi à réinstaller tous les personnages et leurs nouvelles fonctions, il rentre un peu plus au cœur du sujet mais toujours pas assez. De plus, les dialogues restent assez puissants, toujours plein de métaphores, il faut être concentré pour regarder et se laisser aller à la double lecture. Même si on peut tout de même noter que ces métaphores alourdissent la série, et sont très nombreuses et parfois trop faciles, elles restent tout de même bien trouvées et bien tournées.
Car c’est aussi un autre intérêt de la série, si la réalisation n’est pas très exubérante ou quand bien même riche en éléments techniques (pas de plan-séquence …) elle reste fine, les jeux de couleurs sont beaux et elle donne une douceur nécessaire à la série tant le milieu et les dialogues sont complexes.
De plus, le show sait se renouveler. De nombreuses séries sont devenues ennuyantes par manque de nouveauté. Mais dès le premier épisode de cette nouvelle saison on voit apparaître un nouveau personnage : Oliver Dake, chargé de déterminer si Chuck Rhoades a outrepassé ses fonctions lors de sa lutte contre Axe. C’est un personnage obsédé par son travail, les résultats et déterminé, il qui va servir de pivot entre les amis de Chuck qui vont s’éloigner de ce dernier ou encore plus s’en rapprocher.
On peut aussi féliciter Billions pour avoir introduit le premier personnage avec une identité sexuelle non-binaire à la télévision : Taylor, jeune brillant analyste en stage avec Mafee, interprété par Asia Kate Dillon (Bandy dans Orange is the New Black).
Et on apprécie l’importance que prennent les personnages secondaires, Bryan Connerty (assistant de Chuck Rhoades) notamment, son rôle devient de plus en plus riche et son importance dans le scénario devrait grandir.
Quant aux acteurs, ils sont chacun dans un registre différent, très bons, le regard transperçant de Damian Lewis (Axe), la passion animant Paul Giamatti (Chuck Rhoades), sont deux points qui montrent la réussite de ces deux acteurs à rendre leurs personnages complexes.
C’est ainsi que commence cette nouvelle saison de Billions. La série garde ses travers mais on peut rester ambitieux quant à la suite de la saison, tous les éléments sont là pour faire un show brillant, une des ambitions des créateurs, reste à savoir où cette série va aller. Quant à moi je vais continuer de la regarder avec plaisir et j’espère qu’elle saura réussir à devenir une sorte de West Wing de la finance : une série intelligente et intelligible.
https://www.youtube.com/watch?v=lS0VKs2pDfM
Billions est diffusé tous les Dimanche soir sur Showtime.
Julien Pivetta
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