Ping Pong Summer, de Michael Tully : The Eye of the Tiger
Un film peut être réussi pour plusieurs raisons. Il peut être intelligent, faire réfléchir le spectateur, l’impressionner graphiquement, et plus encore. Ce qui me plaît, moi, au cinéma, c’est le fait de ressentir des choses, j’aime que le film me touche droit au cœur, j’aime quand je me sens concerné. Cela dépend du spectateur bien sûr, mais je crois que c’est une des choses les plus compliquées a transmettre au cinéma, les sentiments.
Été 1985. Radford Miracle et sa famille posent leurs valises à Ocean City, Maryland pour les grandes vacances. Jeune adolescent solitaire mais sympathique, Rad est obsédé par le ping-pong, le hip-hop… et Stacy Summers, la fille populaire sur laquelle il a flashé dès son arrivée. Sportif médiocre, piètre danseur et a priori peu dragueur, cet été sera pourtant le sien : celui ou il va gagner son surnom de Radical Miracle.
Le premier plan de Ping Pong Summer, un placement de produit pour une marque de chaussures, fait peur. L’impression que l’on est sur le point d’assister à une comédie hollywoodienne commerciale est là, et on craint beaucoup pour la suite du film. La musique envahissante, les personnages stéréotypés (le jeune homme faible et victime, sa sœur gothique forcément insupportable et geignarde, le père un peu macho et la mère dégoulinante de bienveillance), les plans américains, tout semble réuni au début du film pour faire croire à une cuisante déception. Mais au fur et à mesure des scènes et des dialogues, un portait s’esquisse, et on comprend. On comprend que le ping-pong sera ici secondaire, que l’installation de l’univers, vraiment inquiétante au début, avait pour but de nous mener au thème essentiel du film, à savoir les conflits des différentes échelles sociales américaines.
Dans Ping Pong Summer, les riches écrasent la classe moyenne, et cette dernière finira immanquablement par écraser les pauvres, même de manière accidentelle. Le portrait est là, et au détour d’un passage bien précis du film, on se souvient : Rocky, et ses suites. Ces derniers, icônes du cinéma américain (en tout cas le premier de la saga), sont présents partout dans le long-métrage de Michael Tully.
Le passage évoqué est celui du coaching en vue du grand match de fin de film, au cours duquel on s’attend presque à voir retentir la musique de Survivor. Susan Saradon nous rappelle fortement Mickey, éternel coach de Rocky, l’adversaire nous fait penser à Apollo Creed de par son arrogance, l’entourage de Rad, le héros, est identique au schéma Paulie/Adrian. Rad, bien sûr, a le caractère de battant de Rocky, agrémenté de sa timidité et de sa douce naiveté. C’est quand l’hommage nous est révélé consciemment que les sentiments opèrent, et que l’on peut remercier M.Tully. Le sentiment d’appartenance à la même communauté, le sentiment de stress intense quand au combat final, en un mot le sentiment d’identification que l’on avait pu ressentir lors du visionnage du premier Rocky est de retour, de manière surprenante et véritablement agréable.
Bien sûr, le film, de par son envie de reproduire son modèle, passe par quelques écueils, comme celui du manque d’originalité et de la recopie du même message américain à propos de la réussite et de l’humilité comme vraie force du joueur. Graphiquement et musicalement, il est assez banal, malgré quelques très beaux plans. Mais ce qui le rattrape sans cesse est la volonté de se rapprocher du spectateur. Ce qui le rend admirable, donc, c’est sans aucun doute le cœur dont il dispose, qualité qui l’éloigne de quantités de superproductions américaines, et qui en fait un film d’auteur indépendant. Le jeu d’acteur quand à lui fonctionne vraiment bien, simple mais efficace.
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Le dernier plan, arrêt sur image sur le protagoniste et son ami, en plus de confirmer l’hommage, nous permet de ressentir un profond bonheur, et une véritable reconnaissance envers le réalisateur et son équipe.
FIN SPOILER SPOILER SPOILER
Merci pour votre création, puisse votre métrage servir à nouveau de modèle. Et plus fréquemment, je vous prie !
Le film sort le 16 juillet chez nous.
A.M.D