Caïn : bilan de la saison 2
La saison 2 des enquêtes du policier en chaise roulante s’est conclu vendredi soir sur France 2. Après un final qui a vu un rapprochement se concrétiser entre Caïn et le lieutenant Delambre, SmallThings revient sur une saison qui ne capitalise pas vraiment sur les bons acquis de la première.
« Toujours plus borderline », nous avait promis la chaîne. Et pour voir…. on a pas vraiment vu. Frédéric Caïn tournicote beaucoup autour des suspects, a le bagout d’un bon personnage de polar français…. mais les enquêtes conçues par Bertrand Arthuys et son équipe ronronnent pour la majeure partie, et dénotent d’un potentiel sans cesse gâché.
Le diptyque « Caïn et Abel » partait pourtant d’une bonne intention : en tendant un miroir déformant au capitaine, et en « faisant venir la mort dans sa propre maison », en accueillant Patrick Libansky (un très bon Edouard Montoute) au sein même de la maison de son ex-femme. Las : après que Gaëlle souhaite prendre des distances, elle est tout simplement gommée de la partie ainsi que son fils dans la deuxième partie de saison.
Le face-à-face avec l’Inquisiteur méritait bien son diptyque, mais les rebondissements rejoignent tous les clichés du thriller psychologique, y compris les caractérisations du serial killer à la truelle faites par Borel (Mourad Boudaoud). Borel, parlons-en justement : alors qu’une saison 2 se doit de développer un peu les personnages secondaires et leur personnalité, Arthuys a pris un malin plaisir à en faire le souffre-douleur de Caïn, avec des moments « comiques » qui ont 20 ans de retard. Borel est un gros coincé, devant étudier les films pornos de Golden Jane dans l’épisode 5 sous les quolibets de Caïn. Et de plus, il est secrètement amoureux de Delarme (mal lui en prend). Ce qui donnera une scène où Borel répète sa grande déclaration dans les toilettes, comme tout collégien de 13 ans qui se respecte. Une digression qui sera oubliée dès l’épisode suivant, avec une pirouette plus honteuse que drôle, ce qui montre l’intérêt porté à celui qui est réduit au rôle de héraut des scènes d’exposition jusqu’à présent.
Le sixième épisode est sans doute l’un des plus réussis, mais en explorant le milieu du grand banditisme marseillais, du trafic humain et des flics sous couverture qui passent de l’autre côté, « Caïn » la série est un peu trop gourmande. Et ce qui aurait pu, ce qui aurait dû faire un arc aux petits oignons de fin de saison est expédié en 52 minutes, un tour de passe-passe et une arrestation d’un haut placé de la mondaine plus tard. Une guerre des gangs évitées comme par magie, ce qui évite de faire revenir le parrain local. Dommage pour l’alchimie évidente et le passé trouble esquissé entre Caïn et lui.
Lorsque l’exploration d’un Caïn revanchard qui souhaite voir celui qui l’a opéré il y a six ans se retrouver derrière les barreaux voit poindre le bout de son nez, les scénaristes se permettent de la dissimuler dans une résolution des plus banales. Et ce final… Par où commencer. Si les faces-à-faces avec une nonne qui a fait de sa différence un chemin de croix sont réussis, et ont l’air de donner du fil à retordre à Caïn, la traduction visuelle par une nonne qui se jette du haut d’un couvent et d’une autre qui prend feu sont risibles. Si une religieuse qui prend feu peut détonner sur le papier avec le « Jour du Seigneur », Caïn a toujours joué sur la psychologie et des personnages sans cesse en train de jouer leur carrière avec chaque écart. Et des écarts, Caïn s’en est permis sans jamais être inquiété : le rapprochement avec le lieutenant Delarme est traité de manière totalement opportune : Lucie se surprend à voir Caïn se retrouver chez elle, alors qu’il l’avait droguée quelques épisodes plus tôt pour prouver une théorie sur son enquête. Ajoutons à cela un Moretti aux abonnés absents, sauf lorsqu’il s’agit de faire les gros yeux, et Caïn a maintenant le champ libre et les coudées franches. Il serait bon de rappeler aux scénaristes que « Caïn » n’est pas « Castle » et les ressorts de la série ne reposent pas sur une possible romance ou coucherie entre les deux. Mais puisqu’il s’agit de la direction prise par la saison 3, on est en droit d’attendre de moins en moins de « Caïn » qu’elle surprenne. Si on ne peut pas dire que son antihéros soit rentré dans les rangs, la série confirme que c’est bien son cas.
On se retrouve donc malheureusement devant une saison 2 inégale, qui peine à construire sur son potentiel et dire quelque chose de ses personnages. Le développement du lieutenant Delambre côté perso est totalement insatisfaisant : par exemple, le sixième épisode nous apprend donc qu’elle préfère les bad boys, mais ne s’en laisse pas conter pour autant. Soupir. Incapable de définir son personnage féminin autrement que comme sidekick souvent furibard de Caïn, elle est bien la figure de proue de cette déception. Personnellement, la saison 3, ce sera sans moi.