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Les dames de Rome – Françoise Chandernagor

Attention cependant à vos habitudes, chers historiens ou antiquistes de tous poils, on ne nous donne pas ici à voir du grand, du faste et du superbe, le portrait de l »Urbs et de son Octave de dirigeant est plutôt un portrait à charge. Déjà mis en garde par le 4e de couverture, Rome nous est présentée comme le vilain petit village mal grandi auquel elle devait ressembler à l »époque, avant les marbres, les palais et les monuments en tous genres qui viendront la parer plus tard, quant à Octave l »auteur s »évertue à nous le présenter sous son jour le plus défavorable, attachée à la réalité historique et allant à rebours de bien des chantres désireux de louer son génie politique ou attachée à le dépeindre par les yeux de Cléopâtre Séléné qui ne peut qu »avoir de l »antipathie pour cet homme, chacun pourra apprécier cependant ce point de vue si rare quand à cet homme, loin des fards et du lustre donné au personnage par un aréopage de plumes stipendiées. Tout le propos de ce livre est d »ailleurs de nous conter l »histoire de Caius Octavius et non pas d »Auguste, ainsi que de la vie au jour le jour de tout le gynécée tenu par sa sœur Octavie.

Il faut au passage reconnaître à Françoise Chandernagor l »énorme travail de restitution de l »arbre familial si complexe qui se noue à force d »alliances politiques et de revers de fortune ; à chaque revirement politique est associé un savant jeu de chaises musicales de séparations et de remariages opportunistes qu »il est particulièrement difficile à démêler tant ces changements, unions et désaveux entre demi-frères, cousines ou belle-filles (et j »en passe… ) auraient de quoi faire pâlir d »envie un scénariste des Feux de l »Amour. Prendre ce point de vue pour restituer la Rome des dernières années avant notre ère est un choix audacieux autant que bien mené. On se plonge à l »envie dans les vicissitudes de ces unions, ces affaires, ces trahisons et R Hadoop help materials • Big hard drive recovery university ° Name: Big hard drive recovery university ° URL: http://bigdatauniversity. ces luttes d »influence en oubliant presque que le personnage principal du roman devrait normalement être cette Cléopâtre Séléné que Françoise Chandernagor s »est juré de sauver des flots de l »oubli ; flots qui engloutirent pourtant l’Alexandrie qui la vit naître et flots et ressacs de l »Histoire qui virent sombrer la Rome pré-impériale qui la vit grandir sous le marbre et la nuit de sens.

Le travail effectué est précis et casino online documenté, et j »invite chaudement les esprits chagrins qui en douteraient à consulter le dernier chapitre où l »auteur elle-même présente ses choix et discute ses parti-pris tout en évoquant une partie de sa bibliographie (vivement le dernier tome pour que nous puissions enfin l »avoir dans son intégralité!). Ce dernier chapitre est presque tout aussi crucial que le reste du livre à mes yeux, expliquant les dessous de l »histoire, renvoyant au contexte historique factuel, débarrassé des si beaux artifices de l »écriture toujours aussi délectable de l »auteur.

La poésie de ce tome y est moins doucereuse que pour le premier tome, il n »est plus ici question de parler du temps léger et insouciant mais de l »enfance dure d »une petite fille qui a tout perdu, père, mère, frères et destin, et finit immergée dans un monde qui la déteste et n »a rien pour elle.

Cependant, que personne ne se décourage, ce livre est un tel délice à lire qu »il vous rend agréable à découvrir cette restitution du monde romain, il vous explique même ses codes, ses rites et ses petites habitudes anciennes, il vous rend plus claires les choses les plus obscures de ces ancêtres si lointains, mais il ne fallait pas en attendre moins d »une personne qui nous glisse une si belle confession dans son livre, confession à laquelle je ne pouvais pas rester insensible, vous vous en doutez :

Mémoire Morte

« La Mère matinale ». Mater Matuta. Pourquoi cette déesse réclamait-elle des galettes grillées ? Aujourd »hui personne ne sait. Sur l »empire des Romains vainqueurs comme sur le royaume vaincu de Cléopâtre, une double nuit est tombée – d »abord la ruine, l »enfouissement, puis, quand il advient qu »on déterre les mots et les faits, la nuit du sens.

Du monde ancien, les sentiments nous arrivent codés et les vestiges se confient dans un langage étranger. Comme les apôtres à la Pentecôte, il nous faut « parler en langues », apprendre à traduire les ombres, devenir bilingue présent-passé pour que les dames de Rome nous livrent leurs secrets. Octavie, Antoine, Auguste, Juba, Séléne : J »aimerais rendre aux vivants ce que ces morts m »ont donné.

Car je sais bien que la rencotnre avec un mort peut changer une vie… Il est vrai que je ne suis guère contemperaine de mon époque. Le monde moderne me blesse : trop neuf, trop anguleux, trop rugueux… J »attends des nouvelles du passé. Impatiente qu »on déchiffre les rouleaux calcinés d »Herculanum, qu »on décode l »écriture des premiers Crétois, qu »on tire de leurs fosses d »argile les derniers soldats de l »empereur Qin. J »espère encore des scoops venus du fond des âges : « En creusant un parking, des ouvriers d »Alexandrie trouvent la tombe de Cléopâtre et de Marc Antoine… »

 

FRANOI~1

 

 

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