Suite, remake, reboot

If Beale Street could talk : La pureté, l’amour et le racisme

If Beale Street could talk est une adaptation du livre éponyme de James Baldwin, ici réalisé par Barry Jenkins dont le précédent film, Moonlight, avait gagné l’Oscar du meilleur film en 2017. If Beale Street could talk est un drame familial mettant en scène un jeune couple noir sur le point d’avoir un enfant et, en parallèle, l’évolution d’une procédure judiciaire visant à libérer l’homme du couple, emprisonné pour un viol qu’il n’a pas commis. 

If Beale Street could talk Si Beale Street pouvait parler

Barry Jenkins revient donc avec un nouveau film traitant du racisme et de la vie difficile à laquelle la population noire doit faire face. De nombreux films traitent de ce sujet mais peu arrivent réellement à porter le message aussi loin et aussi bien qu’ils le devraient, or ici il y a un maître aux commandes, un réalisateur dont le dernier film était un chef-d’oeuvre récompensé comme il se doit. Ainsi, If Beale Street could talk avait sur lui de lourdes attentes, tant il semblait inimaginable de décevoir avec le talent dont Jenkins avait déjà fait preuve. 

Malgré ces attentes fortes, Beale Street arrive à surprendre et à toucher. En effet, la magnifique histoire d’amour, réellement belle sans pour autant paraître totalement surfaite, est l’une des histoires les plus sincères de ces dernières années et ne tombe donc jamais dans un ton mielleux et cliché. À elle seule, cette histoire d’amour aurait pu faire le film, mais c’était sans compter le récit poignant délivré à côté. 

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Même si l’histoire d’amour est superbe, le mélange James Baldwin-Barry Jenkins a forcément toute une dimension idéologique très forte. C’est donc dans cette optique que la partie criminelle est instaurée, afin de ne pas rendre le film aussi sublime, et mensonger pas la même occasion, et de représenter le réel et les difficultés inhumaines et injustes auxquelles font face les Noirs. Les deux récits, romantique et criminel, s’entremêlent merveilleusement bien et permettent le développement d’une empathie de la part du spectateur et ainsi de créer toute la force du film. 

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Le titre If Beale Street could talk est expliqué dès le début du film par une citation de James Baldwin qui explique plus ou moins cela : Beale Street est la rue où tous les Noirs américains sont nés. De cette manière, le film qui nous est présenté prend directement une tournure anodine, où l’histoire racontée n’est pas unique et isolée. L’amour, la beauté, la joie tout comme la tristesse et l’injustice deviennent alors représentatifs d’un catégorie de la population. If Beale Street could talk ne prend donc pas l’allure d’un film identitaire aux dénonciations violentes, mais tout au contraire, celle d’une ode à la vie des Noirs qui ne se limite pas à la prison et à la pauvreté, mais qui n’est pas le quotidien banal d’une personne blanche. L’injustice est d’autant plus frappante et révoltante qu’elle n’est pas mise en avant, une sorte de façon de montrer à quel point elle est inhérente à la vie de cette population qui ne la découvre pas du jour au lendemain, et doit vivre avec pour toujours. Ainsi, si le film ne crie pas directement au racisme, ne joue pas un rôle moralisateur, le message n’en est pas moins superbement délivré. 

De plus, If Beale Street could talk se munit d’une forme magnifique : la photographie due à James Laxton, la musique de Nicholas Britell, le jeu de tous les acteurs est là pour sublimer un film qui aurait pu se contenter de se reposer sur son histoire. C’est donc par cette forme que la vraie magie du cinéma opère, en nous proposant des scènes d’une immense pureté, maîtrisées à la perfection. Cependant, rien ne sort vraiment du lot et aucune innovation n’est réellement proposée. Si tous les éléments cités sont excellents, il leur est difficile de se targuer d’une identité et d’une singularité, fait regrettable sans pour autant nuire à l’immense qualité du film. 

If Beale Street could talk Si Beale Street pouvait parler

If Beale Street could talk est donc excellent et a clairement sa place dans les nommés pour l’Oscar du meilleur film. Si Barry Jenkins n’arrive pas réellement à recréer un chef-d’oeuvre digne de Moonlight, il nous livre tout de même un film qui arrive à nous transmettre correctement un message que tant de films n’ont pas réussi à transmettre, en nous proposant une perfection plastique qui ne peut qu’ajouter du bon, sans aller jusqu’à l’exceptionnel. 

Terence

Rédacteur depuis janvier 2019. Actuellement en Licence Arts du Spectacle.

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