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Gotham, saison 1 : Gordon & Bullock fightent le mal

Season finale pour Gotham ! La saison 1 de la nouvelle égérie de la FOX s’est achevée hier soir dans un final assez époustouflant. Il est l’heure du bilan pour une série qui ne partait pas gagnante d’entrée

ATTENTION SPOILER TRANSITIONNEL, ET SURTOUT SPOILER SUR TOUTE LA SAISON, Y COMPRIS L’EPISODE FINAL. LA LECTURE DE CET ARTICLE SE FAIT A VOS RISQUES ET PERILS

Dans l’épisode précédent, c’était le dénouement de l’affaire Ogre : Barbara, poussée par celui-ci à exprimer des pulsions meurtrières, le mène chez ses parents. Jason Lennon ne fait pas de sentiments et tue les parents de Barbara. C’est alors que Jim et Bullock interviennent, réussissant à sauver Barbara et à abattre l’Ogre, ce pour quoi ils sont félicités par les flics. Mais Jim n’a pas le temps de se reposer : Salvatore Maroni opère une guérilla urbaine contre les hommes de Carmine Falcone. La ville est déchirée par la guerre des gangs. Enfin, Nygma affronte les conséquences de son meurtre, tandis que Bruce se pose des questions sur son père après avoir rencontré Sid Bunderslaw et Lucius Fox, deux hommes de la Wayne Inc aux discours opposés…

A présent, la guerre des gangs continue, et des alliances improbables se forment : Jim et Bullock se voient obligés de faire équipe avec Falcone, la « moins pire option ». Le Pingouin et Butch Glizean, qui venaient le tuer, profitent de la faveur promise par Jim pour se protéger. Mais c’est à ce moment qu’une Fish Mooney new look revient, et elle est alliée à… Selina Kyle (new look aussi) et les gosses de Gotham, mais oui. Elle tente de reprendre le contrôle en capturant Falcone, Jim, Pingouin et Bullock et en les livrant à Maroni… Bruce cherche toujours des secrets, Lee doit jouer les psys avec une Barbara traumatisée et Nygma fait face aux questions de Miss Kringle…

GOTHAM: Oswald Cobblepot (Robin Lord Taylor, R) pays a special visit to Carmine Falcone (John Doman, L) in the ÒAll Happy Families Are AlikeÓ episode of GOTHAM airing Monday, May 4 (8:00-9:00 PM ET/PT) on FOX. ©2015 Fox Broadcasting Co. Cr: Jessica Miglio/FOX
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A tout seigneur tout honneur : une telle série polaristique et policière, mettant en scène une ville telle que Gotham, ne pouvait finir que dans un feu d’artifice digne de son rang. Ecrit par Bruno Heller et réalisé par Danny Cannon, les deux hommes forts de la série, cet épisode final tient absolument toutes ses promesses : du plus surprenant (une baston entre… Lee et Barbara) au plus attendu (la mort apparente de Fish Mooney, blessée et tombée de haut dans le fleuve), Gotham nous offre un spectacle total. On peut toutefois émettre quelques doutes sur le retour quelque peu in medias res de Fish Mooney, qui, on le rappelle, était touchée au flanc alors qu’elle filait en hélicoptère de l’île du Dollmaker. Cela, associé au fait que l’on savait que Fish Mooney, après les déclarations de Jada Pinkett Smith, ne serait pas dans la saison 2, nous laisse un peu sur notre faim concernant tout ce qui s’est passé entre temps. But who cares ? Rappelons nous que dans les comics, la mort, les blessures, les retours triomphants sont monnaie courante, et de ce point de vue là, le retour de Fish Mooney était essentiel, car son histoire avec Gotham, pour elle l’ex-lieutenant de Falcone, devait se finir à Gotham même, et pas dans une espèce de retraite avec les bras cassés qui l’entouraient sur l’île. On regrettera toutefois qu’une relation mentor/disciple avec Selina ne puisse pas voir le jour. Cela nous permet aussi une très jolie démonstration de jeu d’acteurs entre elle et David Zayas (Maroni), où celui-ci nous sert un discours savoureux voire hilarant avant de prendre une balle dans la tête d’une Fish « relax » (dit-elle). On sent dans cet épisode, qui aurait pu s’appeler « qui veut la peau de Carmine Falcone », la patte Bruno Heller, qu’on a pu déjà pu voir à l’oeuvre à travers le fameux épisode « du Joker », où les situations cocasses jouxtaient les situations bien plus lourdes de sens.

Gotham, surtout n’hésite pas à prendre plusieurs décisions fortes qui devraient fortement impacter la seconde saison. Ne cédant pas à une grosse facilité qui serait de mettre Bullock et Gordon en héros stoppant la guerre des gangs à eux seuls, la série laisse tout le potentiel de la ville s’exprimer pour maltraiter au mieux ses anges exterminateurs dans leurs valeurs les plus profondes. Cela commence évidemment avec l’alliance avec Falcone, que Jim décrit comme étant la « moins pire option » (et petit clin d’oeil au premier épisode quand Falcone épargne Jim), et qui entre en tension avec la faveur qu’il doit à un Pingouin qui depuis le début joue les outsiders pour mieux arriver à la tête de la ville (ce qui implique la mort de Falcone). Mais à Gotham, c’est la ville qui décide, et les affinités sont constamment remises en cause, instables : le Pingouin va finalement se rabattre sur Fish, qui elle même a abattu un Maroni qui l’a vexée et humiliée alors qu’elle lui a livré Falcone, avant d’être à moitié trahie par un Butch qui autrefois lui était loyal et choisit de ne pas choisir dans le combat qu’elle livre au Pingouin, précipitant sa chute (dans tous les sens du terme). Quant à Jim, c’est encore une fois Loeb qui lui met des bâtons dans les roues au travers d’une scène intense où un Gordon armé d’une mitraillette élimine les hommes de Loeb. La ressemblance entre Gotham et le dieu Cronos mangeant ses enfants n’a jamais été aussi vraie…

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Cela est même poussé à l’extrême par Heller et Cannon : la mort de Maroni, qui, canoniquement, est censé être le responsable de la naissance de Double-Face, montre une volonté de la série de se couper de ces mêmes canons pour recréer une mythologie dans laquelle Batman a certes sa place (en témoigne la révélation d’un passage secret en fin d’épisode, la future Batcave pour faire court), mais où Gotham sera la tête de proue, un point qui mérite d’être souligné tant les personnages ont été trimballés à droite et à gauche durant toute cette saison. Plus encore, la folie naissante de Barbara Gordon, normalement future femme de Gordon (à ne pas confondre avec la future Batgirl) mais plus proche d’Harley Quinn dans cet épisode où elle se dit responsable du meurtre de ses parents et attaque Lee, permet non seulement de faire une petite référence à Shining (here is Barbara !), mais aussi de redéfinir le paradigme de la famille Gordon : dans une ville où Batman n’est pas né, Jim est absolument seul dans son combat contre le crime. Son meilleur allié, Bullock, a lui déjà les mains pleine de suie et a plusieurs fois révélé son ambiguïté (il est d’ailleurs relâché par Fish lors du coup de filet de celle-ci), et Jim lui-même a déjà montré qu’il n’avait plus rien à voir avec le jeune naïf de début de saison (cf l’épisode précédent où il est au bord de tabasser un suspect, et l’épisode final où il frappe, tue et tire avec une mitraillette).

Vous l’aurez compris, ce qui décrit cette fresque de la gang-rène de Gotham, c’est son exhaustivité, son intensité, qui laissent à bout de souffle. La série tient son rang de polar policier, et a toujours eu le mérite de proposer des idées originales pour renouveler à sa manière l’univers batmanien (y a pas que les comics dans la vie !), sur la forme comme sur le fond. Plusieurs fils rouges se sont ainsi mis en place, et Gotham, tant la série au niveau de la coordination que la ville au niveau de la manipulation, les a plutôt intelligemment dirigés jusqu’à un tournant final : on a évoqué la guerre des gangs, avec également l’ascension du Pingouin, bien aidée par l’interprétation toute en folie de Robin Lord Taylor, mais il convient aussi d’évoquer Edward Nygma, qui au fil de ses énigmes et de ses courbettes envers Miss Kringle bascule de plus en plus du côté obscur de la Force, jusqu’à assassiner le petit copain de celle-ci, et de signer son premier message « Riddler-made » envers elle. Cela donne d’ailleurs lieu à une superbe scène de schizophrénie menée de main de maître par l’excellent Cory Michael Smith. Qu’on se le dise, Edward Nygma est vraiment un taré avec des énigmes. Enfin, Bruce Wayne, personnage certes agaçant par moments, est passé du gosse pleurnichard au gamin effronté et déterminé, qui tente ses premiers mouvements hésitants de futur détective, ce qui constitue une vraie évolution qui devrait nous amener, on l’espère, à un peu mieux apprécier un personnage auquel on a du mal à s’identifier, étant Bruce Wayne sans être Bruce Wayne, bousculés que nous sommes dans la représentation que nous avons du futur Batman. Comme pour Selina Kyle, qui passe de « Bruce, je vais t’aider à trouver qui te veut du mal » à « hey Fish Mooney, ca te dirait qu’on bosse ensemble ? » en passant par des disparitions parfois longues de plusieurs épisodes, le personnage a connu une évolution erratique (un passage à l’école et un tabassage d’un de ses camarades de classe, la randonnée traditionnelle des Wayne), mais il faut se dire que les événements qui l’ont affecté (la mort de ses parents, celle de Reginald Payne) l’ont bouleversé, et que se retenir de l’envoyer très vite au charbon doit être dur pour les créateurs. Le personnage d’Alfred (remarquable Sean Pertwee), qui bénéficie d’un vrai rôle de premier plan, du point de vue du fil rouge waynien, agit ainsi comme un véritable canalisateur du personnage.

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Malgré quelques errances scénaristiques sur les personnages (le pire étant Barbara Gordon, insupportable de bout en bout, surjouée par une médiocre Erin Richards, et sans évolution aucune qu’une crise de folie au dernier épisode), et une trop forte tendance à mettre en scène des épisodes « affaire de la semaine » formalisants, mais au demeurant très agréables et divertissants dans leur individualité, et permettant plusieurs clins d’oeil appuyés à la mythologie de Batman (le Venom, le Red Hood, L’Epouvantail), Gotham a su se débarrasser de son étiquette « origin story series » pour mieux offrir une série policière dont Batman et ses différentes veines ne sont que des prétextes au développement de sa propre mythologie d’une part, et à la volonté de la série d’être véritablement originale, et ainsi se démarquer de schémas classiques type NCIS, Chicago PD, ou encore Brooklyn Nine-Nine. En baisse d’audience mais renouvelée pour une saison 2, la série a certes pris quelques paris dans ses intrigues (Spirit of the Goat, l’épisode du « Joker »), mais a toujours laissé en place une tension entre humour implicite et polar explicite, les symboles de cela étant le duo Jim Gordon le vertueux / Harvey Bullock le repentant auxquelles on s’identifie immédiatement, sublimés par une esthétique que ne renieraient pas certains comics. Accompagnés d’acteurs au niveau (Robin Lord Taylor, Cory Michael Smith, Jada Pinkett Smith notamment), Gotham reste une série ambitieuse et divertissante que l’on espère voir perdurer quelque temps sur le petit écran

Rendez-vous en septembre 2015 pour la saison 2 !

Leo Corcos

Critique du peuple, par le peuple, pour le peuple. 1er admirateur de David Cronenberg, fanboy assumé de Doctor Who, stalker attitré de David Tennant.

2 réflexions sur “Gotham, saison 1 : Gordon & Bullock fightent le mal

  • Complétement d’accord avec cet article, cette série est géniale! Certains éléments sont maladroits, mais dans l’ensemble ça reste une bonne série avec des personnages intéressants (à part quelques exceptions). J’aime aussi beaucoup le final, en particulier Lee qui assome Barbara!

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  • Leo Corcos

    Ah, je suis bien content de voir enfin un avis positif (car Dieu sait que j’en ai rencontré des négatifs). Oui, plusieurs éléments maladroits, trop risqués et qui parfois frisent le ridicule (par exemple Fish qui s’enlève un oeil). Oui, petit plaisir de la production, la bataille de chiffonnières, mais compte tenu du fait que Barbara est insupportable, ca fait du bien !

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