Critiques de films

Adama, film d’animation made in France

Adama film d’animation français de 2015, réalisé par Simon Rouby a été diffusé hier soir sur france 4. Il est temps d’en faire un petit sujet, ne serait-ce que parce qu’il a été finaliste au festival du film d’animation d’Annecy et parce qu’il est 100% français !

L’histoire est relativement simple : un petit garçon, Adama, vivant dans une tribu reculée de l’afrique de l’Ouest, est en adoration devant Samba, son grand frère. Alors quand Samba décide de partir pour devenir guerrier (« soldat ») contre l’avis de son peuple, Adama fait tout pour le retrouver et le ramener dans leur village.
Disons le tout net : ce film est beau et déchirant. Poétique et cruel. Mignon et atroce.

Car le contexte est bien la 1ère guerre mondiale, et même précisément Verdun, là où les tirailleurs sénégalais avaient été envoyés au front pour éviter que les blancs ne se fassent tuer.

Adama suit un parcours géographique et initiatique pour aller retrouver son frère et le ramener à la maison. Ce petit garçon qui ne connaît que la simplicité des jeux d’eaux, et la vie à base de récoltes et rites initiatiques réalisés par les vieux sages du village va découvrir la vie occidentale, la voir s’imposer à lui, sans filtre, sans clé pour la comprendre. Mais le film n’est heureusement pas l’histoire du « petit noir qui découvre la belle vie des petits blancs ». Non, là, on est dans le conte basé sur des faits réels. Un conte oui, mais plus proche des frères Grimm que de Disney.

adama

Au cours du film, on réalise qu’Adama se dirige droit vers une guerre et probablement un des moments les plus sanglants de la guerre : la bataille de Verdun. On a peur pour lui. Ce petit bout qui fonce droit devant dans l’unique but de retrouver son frère, va-t-il survivre ne serait-ce qu’une seconde au front, sans aucune expérience de la guerre, sans armes, et sans intention de la faire, cette guerre ?
Plusieurs africains qu’il rencontre au gré de son voyage vont le mettre en garde contre « le monde du souffle », sans que l’on sache exactement ce qu’est ce « souffle ».
Et puis un rappel, pour nous, spectateurs, frappant : lors de la 1ere guerre mondiale, l’utilisation d’armes chimiques était autorisée. Ainsi on voit la projection de gaz moutarde, affreuse vision de ce qu’est la guerre presque plus terrifiante que les armes à feu.
D’ailleurs, ce film sans aucun discours engagé est un clair appel à la paix. Beau et terrifiant.

Petite point sur l’aspect technique de ce film : il s’agit d’une animation un petit peu particulière, notamment par les techniques et textures utilisés qui peuvent dérouter au premier abord.
En ce qui me concerne, dès les premières images, je pensais à de l’image de synthèse assez mal réalisées (des saccades donnant l’impression qu’il manque des images pour fluidifier les mouvements des personnages), puis en avançant, vu l’aspect pinceau des textures, je me suis dit que c’était de la peinture animée. La saccade est toujours là mais cela donne des plans larges plutôt magnifiques.
Après recherches (merci wikipedia !), il s’avère que c’est un petit mélange de différentes techniques d’animation. En ce qui concerne les personnages, ils ont d’abord été sculptés puis scannés pour ensuite les animer sur ordinateur. Cela donne une épaisseur réelle aux personnages, plutôt intéressantes.
Il n’y a pas de détail concernant les paysages mais je pense qu’ils s’agit de peintures, ou d’images texturées pour donner l’impression que c’est une peinture.
Quoiqu’il en soit, après le temps d’adaptation nécessaire sur cet aspect légèrement saccadé des personnages, on oublie vite ce défaut (ou cet effet de style ?) pour se plonger dans l’histoire.

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Et justement, en parlant d’histoire, parlons de la fin :

Attention, SPOILER! Pour ceux qui souhaitent le voir, passez votre chemin !

Comme je l’ai déjà signalé, ce film est un conte. Il est important de le préciser car pour moi, la fin peut avoir 2 significations différentes.
Je ne l’ai pas expliqué, mais avant que le grand frère parte combattre, il était en train de subir son rite de passage à l’âge adulte, rite interrompu lors de l’arrivée d’une mouette, signe de mauvais présage. Ainsi, les anciens du village considèrent que Samba est possédé.
Retournons au moment où Adama retrouve son frère, en plein coeur du no man’s land de Verdun, où les avions tirent sur les quelques soldats encore debout.
Une fois Samba dépossédé grâce à un autre africain, Abdou, qui a pu terminer le rite, les 2 tentent de fuir la guerre et de rentrer chez eux. Abdou, ayant déjà déclamé qu’il connaissait tous les chemins par la terre, les airs et aussi sous la terre leur ouvre un accès souterrain, en plein champ de bataille ce qui leur permet de retrouver en un clin d’oeil leur village. Vous voyez là, l’aspect onirique du conte. Or, en s’engouffrant dans ce souterrain, une explosion au même moment les ensevelit sous des gravats. Ils se tirent des gravats puis retrouvent leur village. Et ici, vous voyez l’aspect cruel du conte. On peut tout à fait choisir d’imaginer que les 2 frères sont morts sous ces gravats et que le retour au village se fait en rêve ou qu’il s’agit de leur fantôme, ou alors, on accepte l’aspect onirique du conte et ils rentrent effectivement chez eux, bien vivants, juste à temps pour la récolte. C’est au spectateur de choisir.

Ce film est à voir, il est d’ailleurs dispo en replay sur france 4 pour encore 13 jours.

Iris

Picarde, 2e des 3 fans français de Dr Who, sériephile, dessinaniméphile, x-phile et motion designer de métier

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