On a terminé

Doctor Who, saison 4 : Maturity

Qui dit Doctor Who saison 3 dit fatalement saison 4, Leo n’allait pas s’arrêter en si bon chemin.

Un cycle se termine pour Doctor Who. La fin de la saison 4 voit le départ de David Tennant après 3 saisons d’excellents et loyaux services, remplacé par l’encore plus jeune Matt Smith. C’est aussi un changement d’époque derrière la caméra avec le départ de Russell T Davies, qui a remis la barque Dr Who à flot en 2005, remplacé par Steven Moffat, le créateur de l’excellent Sherlock. Bilan.

ALERTE PETIT SPOILER : On était sortis de la saison 3 sur l’image d’un Docteur de nouveau plein de vie, après sa dure confrontation avec le Maître, espèce de psychopathe dopé à la soif de pouvoir, et qui lui en avait fait voir des vertes et des pas mûres. On se disait alors qu’il n’était pas possible que le Docteur Tennant s’en aille. Non, jamais. Et pourtant…

La série a fait un petit cadeau pour l’épisode de Noël précédant la saison 4 : Kylie Minogue joue pour l’occasion le rôle de compagne du Docteur, Martha Jones ayant démissionné à la fin de la saison 3 pour se consacrer à sa famille. Fan de la série, la chanteuse a pris son pied à pouvoir intégrer la série. Elle se révèle être un personnage assez pauvre, paradoxalement sans grande envergure malgré son statut, et seulement définie par sa candeur, et sa tête de jeune première fascinée par le héros. Mais encore une fois, ce n’était qu’un petit kiff. Cet épisode constitue un nouveau palier d’excellence pour David Tennant. A l’image de l’épisode, Tennant est drôle, aventureux, explosif, avec un soupçon de dramatique, et c’est tout ce qu’on aime. Son interprétation confère à cet épisode spécial une place parmi les plus épiques de Dr Who. Morceaux de bravoure ( un monologue de Tennant, un running gag à la Belmondo hilarant… ), explosions, tragique, tout y est ! Cela donne ainsi de bonnes bases pour la suite.

Doctor who
©BBC

La saison 4 voit le retour de Donna Noble ( Catherine Tate ), que nous avions découverte lors de l’épisode spécial suivant la saison 2. C’est une nouvelle ère dans les compagnons du Docteur : si Rose Tyler ne se définissait pratiquement que par son ultra-addiction au Docteur, et si Martha Jones, malgré une capacité de prendre les choses en main, restait elle trop dépendante au Seigneur du Temps, Donna Noble, bien que fascinée par cet homme étrange, ne se laisse pas marcher sur les pieds, et n’hésite pas à marquer sa désapprobation face au Docteur, lui reprochant plusieurs décisions. L’excellente Catherine Tate apporte ainsi une nouvelle profondeur au personnage du compagnon du Docteur, le mettant presque au même plan, et fait naître cette question, embryonnaire depuis la fin de la saison 3 : le Docteur peut-il prendre des risques avec la temporalité ? Cette question ne cessera de le hanter jusqu’à l’épisode spécial La Conquête de Mars en fin de saison. Avec Donna, le Docteur trouve une alliée de poids dans les moments difficiles lors de presque tous les épisodes, fin limier et complémentaire du Docteur, rendant l’épisode 13 terrible, vous verrez. Et quand ce n’est pas Donna qui est là pour faire se rendre compte au Docteur qu’il a un côté humain fort, c’est un membre de la famille de Donna, son grand-père Wilfried Mott ( très bon Bernard Cribbins ), vieux soldat fasciné par l’espace, émouvant de sincérité et touchant le Docteur au plus profond de son être. Tous ces ajouts se marient bien avec une autre remise en question : la série se voit plus sombre qu’à l’accoutumée. Pour sa dernière saison à la tête de Dr Who, Russell T Davies a décidé de mettre les bouchées doubles, n’hésitant pas devant l’ampleur de la tâche, et réalisant de splendides tours de force : on a le droit à l’habituel épisode flippant, cette fois dans une bibliothèque si grande qu’elle rendrait claustro n’importe qui, surtout vu que les ennemis se cachent dans l’ombre, on a l’épisode d’époque se déroulant à Pompéi ( avec la présence de Peter Capaldi ), l’épisode surprise « La Fille du Docteur » ( on vous laisse découvrir)… On a aussi droit à la rencontre avec un personnage historique : après la Reine, après Shakespeare, on découvre ici Agatha Christie, dans un épisode qu’Hercule Poirot n’aurait pas renié par son caractère passionnant. Davies s’offre même le luxe de focaliser un épisode sur le Docteur, puis le suivant sur Donna elle-même ( un épisode très frissonnant, condensant toutes les peurs secrètes des fans ). Mieux encore, à un scénario complexe et fort, il ajoute tous les personnages qui font la mythologie Dr Who, ancienne comme nouvelle série, en un double-épisode : se retrouvent au générique Jack Harckness, Martha Jones, Rose Tyler, Donna Noble, Sarah Jane Smith, le chien K-9, les Daleks et leur créateur, Davros. Mais surtout, il grossit le trait : car si le Docteur apprend des choses sur lui-même, c’est que derrière lui, et c’est ce qui fait l’ambiguité de son personnage, il voit des gens disparaître. Et pas des péquenots. Lui, le pacifiste, celui qui a pris comme nom le Docteur pour « soigner » les gens dégoûté à la vue d’une arme ou même d’un salut militaire, n’hésitant pas à se sacrifier pour la survie d’une espèce, est pourtant responsable de beaucoup de morts tandis que lui reste bien vivant. C’est ainsi qu’il s’écriera, à la toute fin de l’épisode spécial The End of Time, où il sait que son sacrifice sera ultime : « That’s not fair ! ». Le génie de David Tennant, exceptionnel de sincérité, de spontanéité, d’authenticité, y est pour beaucoup tout comme le génie scénaristique de Davies.

Il reste à parler des épisodes spéciaux de fin de saison : ils sont au nombre exceptionnels de 5, dont un double-épisode, cette fois, et sont tous de même importance, surtout ledit double-épisode marquant la fin de l’ère Tennant. Si le premier épisode spécial, Cyber Noël, est un peu en-deça, c’est en grande partie dû à la très mauvaise performance de David Morrissey ( mais si, vous savez, le pas très effrayant Gouverneur dans Walking Dead ), et peut-être à la fatigue des scénaristes après une saison harassante dans tous les sens du terme. Toujours est-il que l’ambiance va crescendo, puisque après le sympathique Planète Morte, les enjeux de la fin de saison commencent à apparaître dans La Conquête de Mars. Le Docteur est confronté à la tentation, comme dit plus haut, de changer la temporalité, ce qui le changerait à jamais, lui le gardien du temps. Déchiré entre le fatum qui l’entoure, l’imminence de la catastrophe, et les Lois du Temps, le Docteur fait alors le choix crucial de prendre les choses en main et de ne pas céder à la fatalité. Hélas, le destin en a décidé autrement… Et c’est à la fin d’une bataille épique, dans les deux derniers épisodes ( où, anecdote, apparaît l’ex-James Bond Timothy Dalton ), où plusieurs fois il croit avoir vaincu, que le Docteur voit se réaliser la prophétie : « He’ll knock three times, and then you’ll die. Your song is ending, Doctor ». Tennant part alors sur un déchirant « I don’t want to go », dernier geste de classe, nous faisant presque croire à l’existence du Docteur, et comme si il n’avait pas envie de partir, lui aussi, du casting de cette série toujours pleine de surprises.

Christopher Eccleston était un très bon Docteur. Tennant nous a fait rapidement surmonter notre déception en placant la barre à un degré d’excellence que son successeur Matt Smith devra atteindre avec force efforts. Au terme d’une saison passionnante et interminable de suspense et de questionnements profonds, David Tennant, Face of the Doctor, tire sa révérence. A Matt Smith maintenant de prendre le relais d’une série qui prend et nous fait prendre son pied. Nul doute qu’avec Steven Moffat à sa tête, et avec la série Sherlock à l’esprit, le filon n’est pas prêt de s’épuiser.

Leo Corcos

Critique du peuple, par le peuple, pour le peuple. 1er admirateur de David Cronenberg, fanboy assumé de Doctor Who, stalker attitré de David Tennant.

3 réflexions sur “Doctor Who, saison 4 : Maturity

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