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Game of Thrones 5×06 : Unbowed, Unbent, Unbroken

Deuxième partie de saison pour Game of Thrones, et la tension ne se relâche pas…

ATTENTION SPOILER TRANSITIONNEL

Dans l’épisode précédent, nouveau plot twist chez Daenerys : décidée à reprendre la main sur Meereen, elle décide de le faire tel un ver dans la pomme, en réouvrant les arènes de combat et en acceptant de se marier Hizdahr zo Loraq, chef d’une grande famille de Meereen. Jorah, toujours avec Tyrion, fait escale à Valyria, mais tombant dans une embuscade tendue par les Hommes de pierre, des lépreux en phase terminale, Jorah est touché par ceux-ci et la maladie commence à se répandre en lui… Ramsay Bolton finalise les détails de son mariage avec Sansa, et Jon Snow décide de s’allier avec les Sauvageons pour affronter les Marcheurs Blancs, obtenant même des navires de Stannis…

Cette semaine, pas de Stannis, Jon Snow, ou Daenerys : Arya revient, toujours plus malmenée par Jaqen H’ghar dans la maison des Sans-Visages. Sansa se marie, à contreecoeur, avec Ramsay. Jorah et Tyrion continuent leur chemin à pied, mais ce n’est pas de tout repos, tandis que Jaime et Bronn arrivent aux Jardins Aquatiques, demeure du prince de Dorne, où vit Myrcella. Enfin, la guerre d’influence Lannister-Tyrell continue, plus ardue que jamais ; Cersei reçoit par ailleurs Littlefinger qui lui propose un arrangement…

©HBO
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Deuxième partie de saison, et qui dit rapprochement vers la fin dit cristallisation des tensions et exacerbation des désirs. La première partie avait été riche en intensité et en développement de ces intérêts permanents qui meuvent les personnages, et la seconde partie n’est pas pour contredire ce qui fait la force scénaristique, physique, morale, psychologique d’une série comme Game of Thrones, de surcroît avec une fin d’épisode plutôt choquante. Il est temps, avec cet épisode qui met en valeur ces passions au regard des actions politiques, de passer à la vitesse supérieure, et c’est sous l’angle de la stratégie, de la mise au point (ou au poing ?) et de la mise à l’épreuve pour les personnages, décisions qui vont forcément et fortement impacter les personnages qu’ils sont et seront à partir de maintenant. Comme le dit Jaqen H’ghar : « A girl is not ready to become no one, but she is ready to become someone else ».

Arya, donc. Après un épisode d’absence, pendant lequel on peut déduire qu’elle a continué la tâche si gratifiante de nettoyer des cadavres, elle continue de vouloir prouver sa valeur et sa détermination à Jaqen H’ghar qui ne la juge toujours pas prête pour l’épreuve d’initiation. Ce passage d’Arya chez les Sans-Visages, où il n’y a ni mère ni père, où le seul dieu vénéré est le dieu Multiface, soit un dieu instable, multiple, sans identité ou personnalité propre, et que l’on pourrait tout aussi bien imaginer transgenre (ce qu’Arya cherche aussi, quelque part, après s’être elle-même faite passer pour un garçon), continue de ressembler à un nouveau schéma initiatique pour Arya après celui, avorté, à la cour de Port-Réal, où elle a vu son père mourir, et celui, plutôt rude et sur le tas, du voyage avec Sandor Clegane, où elle a vu sa mère mourir et son « protecteur » rester mourant au milieu d’une plaine. Mais à la différence des schémas paternels et maternels, celui des Sans-Visages, ce schéma serait un anti-schéma, pour qu’en devenant personne, en abandonnant son soi futur, passé, présent, ses amours et ses haines, comme le déclame Jaqen H’ghar, elle n’ait plus d’autre schéma à suivre que le sien, celui-ci étant d’ailleurs déterminé par la vengeance envers Cersei ou Joffrey, entre autres. La série nous a laissé patienter sur la première moitié de saison, jouant avec les attentes de fans qui n’attendent que de voir Arya atteindre son but. Il semble que le processus s’enclenche définitivement pour Arya, qui va connaître une nouvelle étape de sa mise à l’épreuve Sans-Visage

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Sa soeur, Sansa, ne peut pas en dire autant niveau liberté de mouvement et d’expression. Ayant vu toute figure familiale, paternelle et maternelle mourir, elle s’est retrouvée avec la figure tutélaire la moins fiable du monde, Littlefinger, et tente de reprendre pied dans sa vie en devant épouser la figure maritale la moins réjouissante du monde, Ramsay Bolton. Elle est non seulement, une nouvelle fois, mise à l’épreuve du mariage, mais aussi à l’épreuve de sa sexualité : Ramsay Bolton n’est pas le courtois Tyrion Lannister… Sansa, qui a enfin fait un choix décisif en décidant de rejoindre Littlefinger, s’est automatiquement désisté de son pouvoir d’action en se mettant sous la coupe de celui-ci. Revenue à Winterfell, la question sera de savoir quelle sera sa propre orientation stratégique dans un univers où elle apparaît depuis bien trop longtemps comme une victime, mais aussi, paradoxalement comme une sorte de protégée des dieux, qui n’a jamais, même en étant restée à la cour de Port-Réal du temps de Joffrey, été véritablement en danger de mort, ou en tout cas a été protégée si ce fut le cas. Sansa serait donc constamment mise à l’épreuve, et ce mariage avec Ramsay en est une nouvelle preuve, et ce n’est pas le final qui contredira cela…

Quant à Cersei, elle nous offre, par le prisme de ses entrevues avec Littlefinger d’une part, et Olenna Tyrell d’autre part, une maîtrise stratégique et une mise au point implacables dans le jeu des trônes.  Cet épisode montre à quel point Cersei est de retour aux affaires, souhaitant affirmer sa mainmise sur le pouvoir, au détriment de tout, de l’approbation de son fils à son alliance avec les Tyrell. Contrairement aux personnages, Cersei est dans une position relativement stable dans sa précarité (car ce qui définit Game of Thrones, c’est aussi la précarité des situations)… en tout cas pour le moment. Le retour d’Olenna Tyrell, personnage expérimenté si il en est, annonce une volonté d’action du côté de Hautjardin qui souhaite mettre au clair les choses quant à leur position dans le conflit qui ravage les Sept Royaumes. Mais la tâche s’annonce ardue quand en face il y a la Reine mère qui contrôle toutes les affaires courantes (le procès de Loras dans cet épisode est là pour faire comprendre que l’intérêt, les croyances et sa propre peau comptent plus que tout) et un Roi gamin qui fait plus office de poupée de chiffon qu’autre chose…

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Jaime et Bronn, eux, arrivent enfin à Dorne, et eux représentent le manque de stratégie et de mise au point, préférant la mise au poing ; ainsi que le dit Jaime : « j’aime improviser ». C’est en effet le cas, quand leur chemin croise celui des insurgés de la veuve de Oberyn, à peine plus au point… Enfin, du côté de Jorah et Tyrion, le côté La Croisière s’amuse s’est transformé en Koh-Lanta (ou Hunger Games, c’est selon). L’un, touché par les Hommes de Pierre, est mis à l’épreuve du temps, qui lui est compté, puisqu’il est malade et n’a aucun guérisseur sous la main ; avec les libertés prises avec le livre cette saison, Jorah est plus que jamais en danger. L’autre est aussi mis à l’épreuve du temps, mais cela est continuel chez Tyrion, que tout le monde a voulu tuer, de sa famille (qui le recherche toujours pour le meurtre de Joffrey) à Catelyn Stark, et quand ce n’était pas le cas, il s’y exposait en giflant Joffrey. Tyrion est le funambulisme incarné, le personnage par lequel les nerfs des fans sont mis à l’épreuve en permanence. Ce sixième épisode ne déroge pas à la règle, mais laisse voir une qualité classique mais toujours aussi savoureuse du Nain : sa rhétorique, qui lui a permis (outre de montrer le talent de Peter Dinklage) de se sortir de périlleuses situations sans forcément se salir les mains (par exemple au duel que Bronn remporte pour lui aux Eyrié). Constamment traîné dans la boue, il s’en tire toujours, et de surcroît grandi, au moins sur le plan de l’esprit. Tyrion apporte l’intelligence, à défaut de la morale sur laquelle il crache depuis longtemps, à un Jorah qui lui apporte la main armée. Ces deux-là nous offrent des péripéties, de l’humour, et de l’incongru, par le duo improbable autant qu’absurde qu’ils forment. La suite de leurs aventures s’annonce dangereuse, et sera à scruter de près…

Un sixième épisode qui maintient la vitesse de croisière actuelle de la série. La suite la semaine prochaine !

Leo Corcos

Critique du peuple, par le peuple, pour le peuple. 1er admirateur de David Cronenberg, fanboy assumé de Doctor Who, stalker attitré de David Tennant.

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